8 mar 2013

Où en est la libération de la femme en France ? (1) Introduction

Submitted by Anonyme (non vérifié)

En ce 8 mars, nous célébrons la journée internationale de la femme. 

Les femmes communistes de France doivent se saisir de la question de la libération de la femme et du féminisme. D'une part, parce que le féminisme en France a connu un développement particulier de par l'héritage de ce qu'on appelle hors de France la « French Theory » (qui regroupe entre autres Simone de Beauvoir, Michel Foucault et Gilles Deleuze), d'autre part parce que le marxisme-léninisme-maoïsme revendique l'importance de la libération de la femme dans l'existence des révolutions. Friedrich Engels disait ainsi :

« Quiconque est tant soit peu familiarisé avec l'histoire sait que les révolutions sociales sont impossibles sans le ferment féminin. ».

Cette date est donc l'occasion de débuter une série de documents sur l'état des luttes pour la libération de la femme et du féminisme en France.

Avant de rentrer dans le vif du sujet, un bref et récent historique du développement idéologique du féminisme en France s'impose.

Dans les années 1930-1940, le courant majoritaire au sein de la bourgeoisie est celui du féminisme maternaliste ou féminisme différentialiste. Ce courant affirme la nécessité de reconnaître la spécificité de la femme dans ce qu'elle a de doux et d'aimant et de profiter du prestige de la maternité pour améliorer la condition féminine.

C'est contre cette affirmation que s'élève la voix de Simone de Beauvoir, philosophe et romancière issue de la grande bourgeoisie. Elle publie en 1949 le célèbre livre Le deuxième sexe. Cet ouvrage est un manifeste existentialiste, l'existentialisme étant un courant philosophique petit-bourgeois qui met en avant l'individu, individu qui est le seul moteur de ses choix, de ses actions, de son destin (autrement dit libre de toute doctrine) et qui se débat dans un monde absurde.

C'est dans ce cadre que Simone de Beauvoir écrit la fameuse phrase : « On ne naît pas femme, on le devient. » qui va par la suite ouvrir la voie au concept de genre. En effet, même si elle ne l'emploie jamais dans ses écrits, c'est elle qui, la première, pose la construction sociale des identités féminines et masculines.

Selon elle, la biologie ou le marxisme ne constitue pas des explications satisfaisantes à la situation des femmes : la première étant utilisée pour inférioriser les femmes et la seconde limitant l'étude de la condition des femmes à une étude des rapports de production et à la propriété privée.

Ce raisonnement la pousse à proposer une autre explication se basant sur l'existentialisme : comme l'individu est le seul moteur de ses choix alors il suffit que les femmes le veulent pour pouvoir se libérer, indépendamment de la réalité.

Cette idée que développe Simone de Beauvoir est très importante : elle reflète l'idée qu'il existe un système d'oppression différent du capitalisme et spécifique à la condition des femmes. Une telle vision du monde va finir par imprégner la majorité des courants féministes actuels.

Aux alentours des années 60 naît le féminisme « matérialiste » qui prétend continuer la réflexion sur la libération des femmes d'un point de vue marxiste. En réalité, ceci ne reste qu'une prétention, car le féminisme « matérialiste » explique seulement perfectionner l'analyse en traitant correctement la question de la libération des femmes. Plus précisément, il affirme qu'il existe en réalité deux systèmes d'oppression indépendants : le patriarcat et le capitalisme.

Notons déjà ici le caractère révisionniste de ce courant puisqu'il affirme compléter le marxisme qui ne se suffirait pas à lui-même, et le caractère droitier dans la mesure où le marxisme n'est considéré que comme une méthode d'analyse qu'il convient d'adapter. D'ailleurs, une grande partie de ses militantes vient du milieu trotskyste.

Le féminisme « matérialiste » tente de sauvegarder une apparence marxiste en affirmant l'existence de la « classe » des femmes et de la « classe » des hommes, sur le même modèle que la classe ouvrière et la classe capitaliste, mais qui leur sont totalement indépendantes. L'objectif pour ce courant est alors de détruire deux systèmes parallèles : le système patriarcal et le système capitaliste.

La question qui se pose alors est celui de la forme que la lutte va prendre grâce à cet « apport ». Très vite, le féminisme « matérialiste » va se retrouver confronter au concept du genre.

Le genre fait référence au fait que les identités féminines et masculines seraient uniquement des constructions sociales et indépendantes du sexe biologique qui, lui, n'aurait absolument aucune influence sur ce que nous sommes. Ce concept est arrivé en France au travers des travaux des universitaires de Paris 8 Saint-Denis (concentrant les intellectuels petits-bourgeois d'extrême-gauche) qui viennent des « genders studies » développées aux Etats-Unis, prenant elles-mêmes appui sur la « French Theory » (qui ont connu leur essor déjà à l'époque à l'université de Paris 8, lorsqu'elle était la faculté expérimentale ouverte à Vincennes par la bourgeoisie après mai 1968).

La « French Theory » met en son centre l'opposition entre les minorités et la majorité, la « marge » et le centre de la société. Alors, quand elle bute sur la question de la femme, elle est adaptée en intégrant le concept de genre pour caractériser le fait que les identités féminines et masculines ne seraient que des constructions sociales. La lutte des femmes devrait alors se centrer sur le combat de chacune et de chacun contre les normes sociales imposées par le patriarcat.

Le genre va rapidement être intégré au féminisme « matérialiste » pour lutter contre les « identités genrées ». Or, cette association d'un soi-disant marxisme et avec le concept anti-marxiste du genre met en évidence à quel point le féminisme « matérialiste » n'a rien à voir avec le marxisme.

Ainsi, lorsque Friedrich Engels énonçait cette célèbre phrase : « la femme est le prolétaire de l'homme », il réaffirmait l'importance pour le marxisme de s'intéresser aux catégories générales et non aux individus...

Et, dans le cas de la femme, de l'importance de comprendre qu'elle était l'objet d'une oppression particulière du fait de sa capacité à procréer.

Oppression qui naît avec « la victoire de la propriété privée sur la propriété commune primitive et spontanée » (L'origine de la famille, de la propriété privée et de l'Etat). Et la propriété privée existant dans le capitalisme, une réelle lutte pour la libération de la femme ne peut se faire sans lutte contre le capitalisme. Autrement dit, les deux systèmes d'oppression que sont le capitalisme et le patriarcat sont interdépendants.

Cette vision du monde est donc à l'opposé de celle du féminisme « matérialiste » et de celle du féminisme basé sur le concept de genre.

Dans les années 1990 en France, le concept du genre donne d'ailleurs naissance au queer. Le queer fait appel au concept dit de déconstruction de la « French theory » pour adopter, comme moyen de détruire la construction sociale des genres, des pratiques déviantes, et notamment des pratiques sexuelles déviantes.

Toutes ces tendances existent encore aujourd'hui, ayant évolué en différents courants : le féminisme social-démocrate, le féminisme queer et le lesbianisme politique.

Dans les prochains documents, nous étudierons chacun de ces courants pour comprendre l'incapacité de ces prétendus féminismes actuels dans la lutte pour la libération de la femme.

 

>>  2e partie - Le féminisme social-démocrate

Publié sur notre ancien média: 
Mots clés: 
Les grandes questions: 
Rubriques: