24 juin 2014

Le fascisme, c'est la mort de la société civile et de la culture

Submitted by Anonyme (non vérifié)

L'une des pires erreurs qu'il est possible de faire au sujet du fascisme est de penser que celui-ci s'accompagne forcément, dans sa marche au pouvoir, de très larges mobilisations systématiques de masses encadrées par des milices particulièrement brutales, pratiquant les agressions systématiques.

Le fascisme, pour triompher et se maintenir, a besoin de mettre à mort la société civile, les opinions démocratiques. Celles-ci sont déjà en fait pratiquement inexistantes dans le capitalisme, puisque toutes les opinions s'exprimant correspondent aux classes soutenant le régime.

Cependant, même ce semblant d'expression disparaît avec le fascisme. Et surtout, et c'est là l'aspect principal de cette question de la société civile, la culture est anéantie, totalement effacée afin que tout ne serve plus que l'impérialisme le plus agressif.

C'est là précisément le point qu'anarchistes et trotskystes ne comprennent pas. Selon eux, le fascisme consiste en une prise du pouvoir par des gangsters qui sont achetés ensuite par les grands capitalistes.

Or, en réalité, l'extrême-droite est directement organisée par la fraction la plus agressive de la bourgeoisie impérialiste. Cette fraction entend guider l’État elle-même et donc supprimer l'expression des autres fractions bourgeoises, sans parler de la petite-bourgeoisie ou de l'aristocratie ouvrière.

Si ce n'était que cela, on pourrait comprendre la position selon laquelle tout cela est très secondaire. Toutefois, pour supprimer les opinions bourgeoises concurrentes, le fascisme supprime également la culture, pour ne tolérer que des expressions directement en soutien au régime, ce dernier étant marqué évidemment par le militarisme et l'expansionnisme.

Pourquoi supprimer la culture ? Justement afin d'assécher toutes les possibilités d'exprimer des opinions historiquement en désaccord avec la ligne unique de la fraction la plus agressive de la bourgeoisie.

Par exemple, le fascisme entend ouvrir une perspective néo-gaulliste, en partenariat avec les impérialismes allemand et russe. Cela signifie qu'il va devoir intervenir dans les domaines culturels afin de faire en sorte que cette perspective apparaisse comme « naturelle », surtout au plan historique.

Par conséquent, cela ne va pas seulement perturber des fractions bourgeoises opposées : cela va déranger et amener à la confrontation des gens reconnaissant la valeur de la culture et n'acceptant des « réécritures » totalement abstraites de l'histoire ni l'effacement d'aspects de la culture.

Prenons un exemple concret différent : le fascisme va, en France, forcément s'appuyer sur le catholicisme. Il n'a par conséquent aucune envie qu'on souligne l'importance historique de la peinture flamande, pas plus que d'ailleurs du mouvement hussite de Bohême ou auparavant de la philosophie arabo-persane pour la préservation de la philosophie grecque.

http://lesmaterialistes.com/pcmlm-pour-democratie-populaireTout cela ne colle pas avec la conception d'une France unie depuis Clovis, naturellement catholique, etc. Par conséquent, il y a ici un conflit démocratique, dont l'une des expressions a été la bataille récente autour de la publication d'un ouvrage niant le rôle de la philosophie arabe en ce qui concerne la diffusion en Europe de la philosophie grecque.

Des gens pas forcément révolutionnaires, puisque membres de structures institutionnelles, se confrontent ici avec le fascisme et sa démarche. C'est très limité, mais c'est important dans une démarche globale, dans la bataille de positions contre le fascisme.

Le cœur de la bataille antifasciste, c'est donc la bataille pour l'expression authentiquement démocratique et pour la culture. Cela n'a donc rien à voir, naturellement, avec « l'antifascisme radical » qui développe un discours « ultra » teinté d'actions individualistes totalement coupées de la culture générale des masses.

Bien entendu, dans ce processus de « révolution culturelle » conservatrice, le fascisme utilise les mobilisations de masses, de manière inévitable. Mais cela ne consistera pas nécessairement en des actions directement violentes. Ainsi, tant le chauvinisme en 1998 pour la coupe du monde de football en France que celui qui aura lieu dans deux pour la coupe d'Europe de football (également en France) relèvent de la fascisation.

Il n'est pas bien difficile de voir que le football et son culte irrationnel relèvent de la négation de la culture et de la civilisation. Par conséquent, cela aide le fascisme.

On comprend aussi bien sûr que le fascisme agit par action de blitzkrieg, de guerre-éclair, alors que l'antifascisme agit sur un laps de temps plus long : la culture demande à être digérée, assimilée, cela prend du temps !

Et c'est le sens de la publication sur lesmatérialistes.com de dossiers culturels. Ce sont des armes idéologiques de grande importance. Il en va de la crédibilité, et de l'utilité dans la pratique d'aujourd'hui et surtout de demain.

L'antifascisme qui se dit « radical » est un cul-de-sac ; c'est du cinéma coupé de la bataille de positions au sein de la société française. Ce n'est pas sérieux, ce n'est pas conséquent. Qui a l'ambition de l'antifascisme comprend nécessairement la publication des dossiers, leur valeur pratique, par la théorie comme guide pour l'action. C'est une question de culture.

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