12 nov 2013

PCMLM - Déclaration 47 - La Bretagne et la question nationale

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Déclaration 47 à propos de la Bretagne et de la question nationale au format PDF

Il n'existe pas de question nationale bretonne, mais une question démocratique bretonne qui ne peut être résolue que dans le cadre de la révolution socialiste en France. Telle est la position scientifique concernant la Bretagne, ses masses et son histoire.

Il y a ainsi deux aspects : tout d'abord, l'affirmation de la culture historique des masses de Bretagne et sa reconnaissance comme composante de la révolution socialiste, ensuite la réfutation des conceptions petites-bourgeoises idéalistes, voire fascistes, qui font du « peuple breton » un « peuple prolétaire ».

La Bretagne et sa culture

Les communistes se fondent, en effet, sur la définition classique de la nation, élaborée par Joseph Staline :

« La nation est une communauté humaine, stable, historiquement constituée, née sur la base d'une communauté de langue, de territoire, de vie économique et de formation psychique qui se traduit par une communauté de culture. »

Il apparaît ainsi que la Bretagne a été assimilée à la nation française. Il n'y a pas eu de bourgeoisie nationale qui se soit développée, sur la base d'un marché fermé. L'inexistence d'une langue bretonne développée et unifiée témoigne de cela, tout comme l'intégration absolument pacifique et populaire à la France depuis plusieurs siècles.

La Bretagne a un statut équivalent aux autres régions de France sur le plan juridique. Son intégration économique n'est pas différente non plus. Il n'y aucune différence de citoyenneté. Il n'y a pas de bourgeoisie bretonne, mais une bourgeoisie présente en Bretagne, ou liée historiquement à la Bretagne sur le plan culturel.

Toutefois, il existe un parcours historique tourmenté, donnant à la Bretagne historiquement des spécificités dans le cadre national français. La noblesse bretonne a ainsi tenté de préserver son indépendance, et à cela s'ajoute la dimension celtique des origines de la culture bretonne.

Il existe ainsi une dimension populaire à la culture bretonne, indéniable, cependant celle-ci relève de la culture démocratique n'ayant pas atteint son stade national. Elle doit donc être reconnue, ce que l’État bourgeois n'a pas fait, sans cependant se voir accordée une dimension nationale.

Les prétendus continuateurs d'un chemin breton

Il est évident, à voir l'histoire de la Bretagne, que celle-ci aurait pu former une nation dans un autre contexte, et plus précisément si le féodalisme n'avait pas été ébranlé par la monarchie absolue. Il est significatif que le rattachement de la Bretagne se déroule à la veille de l'apogée de François Ier, qui a pavé la voie à Louis XIV.

Pour cette raison, des couches sociales de Bretagne se sont posées comme « continuatrices » de la formation sociale non terminée. Il s'agit, en fait, de couches petites-bourgeoises en concurrence avec la bourgeoisie, et s'appuyant sur le nationalisme afin de profiter d'un appui des masses.

Elles ont masqué leur contenu de classe derrière toute une mythologie nationale.

La première forme de cette démarche a été de type catholique et romantique, suite à la révolution française. Le prolongement de cela a été le développement d'un authentique mouvement fasciste en Bretagne durant les années 1930-1940, au nom d'un mythe racialiste.

La seconde forme a consisté en une « pression » réalisé par l'intermédiaire de l'utilisation idéologique du concept de Bretagne. Cela se révèle au fait que les programmes que l'on trouve ici ne dépassent pas l'autogestion et l'affirmation d'une base locale, ce qui revient à mettre en avant de nouveaux notables à la place des anciens.

Pour cette raison, les courants qui ont formé cette ligne idéologique sont ouvertement petit-bourgeois : Parti Socialiste Unifié, Ligue Communiste (devenu Ligue Communiste Révolutionnaire, puis Nouveau Parti Anticapitaliste), populistes de la Cause du peuple, etc.

Afin de contrer l'affirmation de la dictature du prolétariat et de renforcer l'idéologie petite-bourgeoise de l'autogestion et du « contrôle » de la production, ces courants ont soutenu la conception de « décider à la base », où que l'on soit et sans prendre en compte l'ensemble : au lycée, en entreprise, et également régionalement.

Ainsi, en avril 1979, le 3e congrès de la Ligue Communiste Révolutionnaire votait à la majorité absolue l'adoption des mots d'ordre « Vivre, Travailler, Décider au pays » et « Pour l'autonomie socialiste ».

La question « nationalitaire »

Le point essentiel dont il faut partir est qu'à partir du moment où l’État français existe, alors les communistes de cet État doivent s'unifier, et le cas échéant intégrer dans le programme révolutionnaire les tâches nationales.

Il est justement révélateur que les idéologies indépendantistes et autonomistes bretonnes naissent en dehors de cette problématique communiste, et également contre elles. On y retrouve systématiquement tant une attitude romantique que des revendications « autogestionnaires ».

Au lieu que le cœur soit l'idéologie, la science, la pensée-guide, la « nation » se voit attribuer une « qualité » particulière, qui transformerait toute lutte quantitative en démarche foncièrement révolutionnaire. En réalité, il n'en est rien et seule l'idéologie permet les avancées historiques.

Le détonateur culturel a été la guerre d'Algérie et le trotskysme, cette dernière idéologie dans sa variante « Ligue Communiste » produisant la conception selon laquelle tout ce qui bouge serait rouge, justifiant le spontanéisme au nom d'une vaste perspective « anti-impérialiste ».

Cette démarche s'oppose fondamentalement au matérialisme dialectique qui raisonne en terme de classes, et qui considère que la question nationale n'est pas socialiste, mais simplement démocratique.

Le trotskysme a produit une idéologie « nationalitaire » qui, au nom de la révolution permanente, apporte une confusion fondamentale pour ce qui touche les questions démocratiques d'un côté, les questions socialistes de l'autre.

Le trotskysme, qui est celui de la Ligue Communiste a ici directement été au service du social-impérialisme russe des années 1960-1970 et de ses tentatives d'affaiblir ses concurrents impérialistes. Il a également et surtout été au service des couches petites-bourgeoises ou bourgeoises tentant de se renforcer en s'appuyant sur une « cause nationale » mobilisatrice.

En défense de la culture populaire

La question bretonne est ainsi une culture démocratique et populaire. L'existence de cette culture entravant le développement du capitalisme, la bourgeoisie l'a affaiblie par la force, afin de disposer d'une main d'oeuvre adaptée.

Le développement du capitalisme était cependant inévitable et il faut réfuter le romantisme d'une Bretagne idéalisée des années 1960, ou bien du 14e siècle.

Au début de son affirmation il y a de cela dix ans, le PCMLM avait pris en compte cette dimension, tout en acceptant les thèses émises par les fractions révolutionnaires les plus avancées de Bretagne.

Les années 1990 avaient en effet été marquées par le retour d'un puissant radicalisme révolutionnaire, autour des thèmes classiques du Front de Libération de la Bretagne et de l'Armée Révolutionnaire Bretonne, qui avaient mené une importante série d'actions illégales à la fin des années 1970 et au début des années 1980.

Voici ce que disait alors le Manuel d’Économie Politique, au début des années 2000 :

« La ligne révolutionnaire s'oppose à une Bretagne « régionale » favorisée par l'Union Européenne ou le fédéralisme etc., elle rejette ces illusions de la gauche de la bourgeoisie nationale, comme elle rejette la droite de la bourgeoisie nationale, qui prône une unité « celtique » et défend une culture fondée sur la période pré-nationale de la Bretagne géographique.

L'existence de la nation bretonne ne peut exister qu'en tant que mouvement de libération nationale, sous la direction de la classe ouvrière, alliée à la paysannerie et la petite-bourgeoisie, et éventuellement une partie de la gauche de la bourgeoisie nationale.

La bourgeoisie nationale est incapable d'assumer la nation : la droite de la bourgeoisie nationale est obligée de chercher dans le passé (les « celtes »), tandis que la gauche de la bourgeoisie nationale est obligé de chercher dans le futur (une « région » reconnue au sein de l'Union Européenne, une fédération européenne, etc.).

Une tâche des communistes de France est de soutenir la lutte de la nation bretonne pour sa reconnaissance et son droit à l'autodétermination. »

L'histoire a cependant montré que les positions considérées comme étant celles de la droite et de la gauche de la bourgeoisie nationale bretonne ne relevaient pas de celle-ci, qui n'existe pas, mais de couches petites-bourgeoises et bourgeoises prétendant justement être celle-ci.

Après l'explosion en 2000 du McDonald's de Quévert ayant causé la mort d'une employée, le radicalisme breton s'est effondré sur lui-même, basculant ouvertement dans le réformisme radical lié à la Ligue Communiste Révolutionnaire et étant dépassé en terme de dynamique par les courants « identitaires » se développant à l'extrême-droite.

Les cultures populaires ne peuvent aller à rebours de la culture nationale historique

L'erreur essentielle et révélatrice du radicalisme breton est qu'absolument jamais il n'y a eu d'étude scientifique de la nation bretonne ; celle-ci se révèle être un mythe politique.

Étant un mythe ayant une utilité pour des couches bourgeoises et petites-bourgeoises en concurrence, il n'est guère étonnant que, avec la crise générale du capitalisme, le radicalisme breton revienne à ses racines ultra-conservatrices et abandonne son vernis « gauchiste ».

Ce vernis avait d'ailleurs la particularité de mélanger une fascination bourgeoise pour l'Union Européenne et l'esprit typiquement petit-bourgeois de la décentralisation, de l'autogestion, etc.

Dans Bretagne rouge, organe de la Ligue Communiste Révolutionnaire, on pouvait ainsi lire en décembre 1976 :

« Pour nous, détruire l’État bourgeois, c'est aussi détruire la France, création historique des classes dominantes aristocratiques et bourgeoises.

C'est la remplacer par une fédération socialiste, basée sur l'association autodéterminée de nationalités et de régions – et compte-tenu du lien étroit entre les luttes révolutionnaires à l'échelle de l'Europe, dépassant le plus vite possible le cadre actuel de l'hexagone. »

La construction bourgeoise de l'Union Européenne tombant à l'eau devant l'inévitable concurrence inter-impérialiste, le radicalisme breton ne pouvait ainsi que repartir directement dans l'option principalement nationaliste et non plus simplement régionaliste.

Plus la crise générale du capitalisme s'intensifie, plus le radicalisme nationaliste s'accentue, mélangeant revendications sociales et nationales, puis les assimilant, le tout au service de la réaction.

C'est une direction réactionnaire qui puise sa source dans la négation du rôle progressiste de la bourgeoisie française, c'est-à-dire en définitive la négation tant de l'apport des Lumières que du matérialisme historique et dialectique.

Les cultures populaires ne peuvent aller à rebours de la culture nationale historique ; la culture bretonne ne peut exister qu'en appuyant la culture nationale française, portée aujourd'hui par la classe ouvrière de tout le pays qui assume le niveau de civilisation développé jusque-là.

Et par la suite cette culture bretonne s'unifiera et fusionnera avec la culture française, qui elle-même fusionnera avec toutes les autres cultures, dans le cadre de la naissance de la république socialiste mondiale.

Parti Communiste Marxiste Léniniste Maoïste [France]
Novembre 2013

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