7 avr 2012

Après Toulouse, la déconfiture des Frères Musulmans au Bourget

Submitted by Anonyme (non vérifié)

L'ouverture hier de la Rencontre annuelle des musulmans au Bourget, en banlieue parisienne, organisée par l'UOIF (Union des organisations islamiques de France), est d'une importance particulière au lendemain de Toulouse.

Cet événement consiste en 6 000 m² de conférence et surtout d'échoppes vendant divers produits, avec 100 000 personnes y venant. C'est un moment important pour l'UOIF et sa politique d'implantation (justement très faible en banlieue parisienne).

Cela montre également l'état du rapport de forces entre les tendances musulmanes.

En effet, l'UOIF est la section française, en quelque sorte, des Frères Musulmans. Elle avait été vivement soutenu par Sarkozy il y a quelques années. En échange, l'UOIF s'intégrait de manière institutionnelle, par exemple avec une fatwa contre les émeutes en 2005 (nous en avions parlé : « L'UOIF lance une « fatwa » contre la juste révolte populaire ! »).

Et là, il y a quelques jours, Sarkozy avait prévenu l'UOIF par une lettre à son prédident : « Je ne tolèrerai pas que puissent s'exprimer au cours d'une manifestation publique organisée sur le sol français les porteurs de messages d'appels à la violence, à la haine, à l'antisémitisme, qui constituent des attaques insupportables contre la dignité humaine et les principes républicains. »

Six orateurs n'ont ainsi pas pu rentrer en France, Tariq Ramadan a été accepté en France mais le ministre de l'intérieur a souligné son rôle présenté comme néfaste.

Au lendemain de Toulouse, même pas un mois après, c'est très parlant. Les masques tombent et on peut y voir très clair.

En effet, les salafistes et les Frères Musulmans ont les mêmes objectifs : un Etat islamique. Mais la différence est que les salafistes prônent la guerre ouverte (sous le masque de la défense de la communauté) et les Frères Musulmans la marche dans les institutions (pareillement, au nom de la défense de la communauté).

Les deux tendances ont mis pareillement en avant le concept d'islamophobie, Le problème est que les attaques de Merah bouleversent la donne car elles politisent inévitablement la démarche islamiste.

Ce qui était masqué par la « défense de la communauté face à l'islamophobie » apparaît clairement comme politique et non plus comme culturel. Merah et les salafistes ont torpillé des années de travail des Frères Musulmans.

L'affaire Qaradawi est emblématique. Nous avons déjà parlé du fait que le gouvernement a fait en sorte qu'il ne vienne pas en France, et surtout qu'il représentait une pensée totalement réactionnaire, ancrée dans l'antisémitisme.

Or, Qardawi est le responsable du « Conseil européen de la fatwa et de la recherche », qui est... la direction de l'UOIF.

Et là on retrouve évidemment Tariq Ramadan, invité au Bourget, et grand admirateur de Qaradawi, ce qui est logique puisqu'il s'agit des Frères Musulmans.

Voici ce que dit Ramadan par exemple :

« Toute personne, musulmane ou non, qui a étudié les sciences et le droit islamiques contemporains, sait quelle est la contribution de Yussuf Al-Qaradawi au débat et combien certaines de ses propositions juridiques sont novatrices. J’éprouve un profond respect pour l’homme et le savant et serait le dernier à m’en cacher »

Et là, les actions de Merah ont politisé l'Islam, ce qui est une aberration si l'on parle de la religion en général, mais ce qui est logique si l'on parle des Frères Musulmans...

Tariq Ramadan apparaît comme un activiste politique au service des Frères Musulmans, tout comme Alain Gresh du monde diplomatique. Le concept d'islamophobie se révèle avoir été un outil tactique en direction des « islamo-gauchistes. »

Bref, tout le savant plan de marche au sein des institutions apparaît au grand jour alors qu'il devait être dépolitisé au possible, pour que cela passe le mieux possible.

Or, là, c'est devenu impossible, au point que l'extrême-droite voit une brèche : tant le Front National que le Bloc Identitaire ont ainsi tenté d'interdire la réunion du Bourget. Une réunion pourtant appelée « Foi, réforme & espérance »...

C'est ce qui explique que par exemple, lorsqu'en 2009 Tariq Ramadan rencontre « par hasard » Dieudonné et Soral à la réunion annuelle de l'UOIF, il fasse par la suite un communiqué où il explique ne pas être d'accord avec eux, tout en précisant :

« Il importe ici de clarifier les choses. J’ai défendu, et je continuerai à défendre, le droit de Dieudonné à s’exprimer.

En 2005, j’ai dit et répété publiquement que l’on ne pouvait pas accuser Dieudonné d’antisémitisme alors que, procès après procès, il était blanchi de ces accusations. Ma position, il y a quatre ans déjà, était claire déjà : je n’étais pas d’accord ni avec le contenu ni avec la forme de certaines interventions de Dieudonné mais je m’opposais – et je m’oppose aujourd’hui encore – à toute forme de diabolisation qui empêcherait le débat et la confrontation d’idées. A tous ceux qui me reprochent de rencontrer Dieudonné et Soral (samedi dernier ou auparavant), je réponds que, sur le plan des idées, le rejet, l’ostracisme et la mise au ban définitive ne font pas partie de ma philosophie et de ma compréhension du débat démocratique. »

Dieudonné arrange Tariq Ramadan, donc il ne le critiquera pas, et même le soutiendra comme « fer de lance » d'un discours qui est, d'une certaine manière, aussi celui des Frères Musulmans.

Avec Merah, tout cela n'est plus possible.

Et c'est là qu'on voit comment Tariq Ramadan marchait en binôme avec son frère Hani Ramadan, bien entendu invité par l'UOIF aussi, en tant que directeur du centre islamique de Genève, et se situant bien entendu lui aussi dans la logique des Frères Musulmans...

Voici par exemple ce que dit Hani Ramadan tente de contourner l'affaire Merah pour mettre en avant la logique de la « défense de la communauté face à l'islamophobie », dans un grand tour de passe-passe relativiste.

Il s'agit pour lui de sauver son approche, à tout prix, donc de modifier la nature des faits, afin de faire en sorte que tout revienne dans le sens qui l'intéresse. Il lui faut passer pour moral, donner des gages à l'ordre social, tout en mobilisant en faveur de sa propre cause:

« Pour ce qui est des faits, il n’existe pas de mots assez forts pour condamner l’acte barbare et raciste qui consiste à tuer de sang-froid trois enfants et un enseignant au motif qu’ils sont juifs. Cette action ne trouve aucune justification, cela doit être clair. Un geste de folie qui contredit les principes les plus sacrés de l’islam. Et nous ne pouvons que nous associer à la douleur des familles des victimes, nos frères et sœurs dans l’humanité.

En revanche, pour ce qui est du traitement médiatique et politique de l’événement, il révèle incontestablement la force des lobbies sionistes : Nicolas Sarkozy, François Hollande et les autres candidats à la présidence se sont précipités pour exprimer leur solidarité, geste qu’il serait bien naïf  de ne pas lier aux enjeux de cette période électorale. La presse, elle, a retenu son souffle. Tout semble s’être arrêté en début de semaine autour d’un événement qui sacre le caractère unique de la souffrance juive, dogme incontournable du penseur Elie Wiesel.

Pourtant, combien d’autres enfants sont massacrés par des armées prétendues régulières de par le monde ? » (Enfants de Toulouse, enfants du monde)

Avec Merah, c'est tout ce genre de construction qui tombe en pièce. La stratégie des salafistes a « révélé » la stratégie des Frères Musulmans.

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