12 mai 2013

L'âge roman - 1ère partie : la sortie de l'esclavage

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Avec l'effondrement de l'empire romain s'est ouvert une nouvelle étape historique, allant du 2ème siècle après Jésus-Christ jusqu'au 15ème siècle. C'est la période de la féodalité, née sur le terreau des invasions barbares et développant les arts roman et gothique.

Historiquement, ce qui précède la féodalité, le fameux « moyen-âge », c'est l'esclavage, dont l'empire romain formait le plus haut degré de développement. L'esclavage naît lui-même directement de l'âge de fer, période où le soufflet de forge permet de fabriquer des outils de fer ; l'agriculture, la domestication et l'élevage deviennent des démarches généralisées en certaines parties du monde.

Avec le développement des techniques, différents métiers s'affirmèrent, de manière indépendante de l'agriculture. Avec la naissance de ces artisans pratiquant différentes techniques de fabrication, apparaît pour la première fois la marchandise, le marché pour la vendre et l'acheter, et la monnaie comme forme facilitant les échanges.

Cependant, il n'y avait pas que des petits producteurs ; certains devinrent particulièrement aisés, et il se développa également des grands propriétaires fonciers.

Les paysans, restés en arrière socialement, car dépendant d'une économie encore primitive, passèrent sous la coupe de ces riches propriétaires ; ne pouvant rembourser leurs prêts, les paysans devenaient esclaves, après avoir vendu leur famille et abandonné leurs terres.

Dans certains cas en Égypte, ce passage au statut d'esclave afin de rembourser ses dettes restait seulement temporaire. L'empire romain formera le statut de « gladiateurs » selon le même principe, comme statut d'esclave temporaire (devant regagner assez pour payer ses dettes, se racheter, etc.) avec comme fonction de lutter par les armes dans des joutes dans des arènes.

Friedrich Engels explique ainsi :

 L'accroissement constant de la production, et avec elle de la productivité du travail, accrut la valeur de la force de travail humaine ; l'esclavage qui, au stade antérieur, était encore à l'origine et restait sporadique, devient maintenant un composant essentiel du système social ; les esclaves cessent d'être de simples auxiliaires ; c'est par douzaines qu'on les pousse au travail, dans les champs et à l'atelier. 

(L'origine de la famille, de la propriété privée et de l'Etat)

L’État est directement né de ce processus. L'empire romain est né comme institution violente préservant la division entre maîtres et esclaves, mais c'était également le cas des États esclavagistes de l'Orient ancien, de la Grèce antique, dont la fameuse « démocratie » ne concernait que les propriétaires d'esclaves, les « maîtres ».

C'est cette situation spécifique d'une minorité parasite pouvant s'orienter vers les sciences qui a permis le développement des connaissances. L'esclavage a été une étape nécessaire dans l'histoire de l'humanité. Engels rappelle cela en expliquant :

“ Ce fut seulement l'esclavage qui rendit possible sur une assez grande échelle la division du travail entre agriculture et industrie et, par suite, l'apogée du monde antique, l'hellénisme.

Sans esclavage, pas d’État grec, pas d'art et de science grecs ; sans esclavage, par d'Empire romain. Or, sans la base de l'hellénisme et de l'Empire romain, pas non plus d'Europe moderne. 

(Anti-Dühring)

L'antiquité grecque a produit ainsi la base culturelle-idéologique pour les avancées techniques, morales, culturelles, ouvrant ou développant de nombreuses branches du savoir, telles les mathématiques, l'astronomie, la mécanique, l'architecture, la médecine, etc.

Mais cela est également vrai d'autres grandes civilisations, comme la Chine et l'Inde. Les objets d'art, les chefs-d'œuvre de la littérature, de la sculpture et de l'architecture que nous a légués l'antiquité, font à jamais partie du trésor de la culture humaine.

Néanmoins, cette situation où existaient des artistes et des intellectuels ne pouvait pas être généralisée, de par la nature anti-démocratique des régimes d'alors.

Tous les États esclavagistes étaient militaristes et tendaient constamment à la guerre, puisqu'il fallait toujours plus d'esclaves, en raison de l'importante mortalité de ces personnes surexploitées. Tout le système reposait sur les esclaves et se nourrissait de la vie et des morts des esclaves par le travail ; les grands ouvrages, comme les Pyramides, se fondaient sur l'usage généralisé de l'esclavage.

C'est ainsi que l’État esclavagiste réalisait les systèmes d'irrigation, les routes, les ponts, les fortifications, les monuments, etc.

En Orient, il arrivait même qu'il n'y ait pas de grands propriétaires fonciers, l’État lui-même devenant un gigantesque propriétaire foncier, en raison, comme en Égypte, de la gestion nécessaire de l’irrigation par un puissant État central.

“ L'irrigation artificielle y constitue la première condition de l'agriculture, et ceci est l'affaire des communautés, des provinces ou du gouvernement central. 

(Lettre de Friedrich Engels à Karl Marx du 6 juin 1853)

C'est ce que Karl Marx a appelé le « despotisme asiatique ». L'Etat est lui-même le « maître » absolu des esclaves, d'où la figure du pharaon et l'idéologie religieuse allant avec, fournie par une caste de prêtres et par des théoriciens du droit (par exemple le code du roi Hammourabi datant du 18ème siècle avant notre ère – il y a un bloc monumental désormais au musée du Louvre, composé de 282 articles – les lois de Manou dans l'Inde antique, etc.).

La couche dominante, aristocratique et autocratique, profite alors de l'exploitation généralisée pour satisfaire des caprices individuels, amasser des trésors, construire des ouvrages militaires et mettre sur pied des armées, bâtir et entretenir des palais et des temples somptueux.

Ainsi, l’État naît avec le rôle de maintien de l'ordre dominant. L’État est le garant de la sécurité des maîtres, comme dans les grandes latifundia romaines ou des centaines, voire des milliers d'esclaves travaillaient sur de grands domaines agricoles.

Lénine explique :

“ C'est seulement quand la première forme de division de la société en classes, l'esclavage, est apparue, quand une classe d'hommes, en se consacrant aux formes les plus rudes du travail agricole, a pu produire un certain excédent ; quand le propriétaire d'esclaves s'est approprié cet excédent qui n'était pas absolument indispensable à l'existence misérable de l'esclave ; quand, de la sorte, l'existence de cette classe de propriétaires d'esclaves s'est affermie, et pour qu'elle pût s'affermir, il fallut que l’État apparut. 

(L’État et la révolution)

L'utilisation de l'esclavage dans le domaine agricole ruinait également les paysans libres, en raison du faible coût de production revenant aux propriétés esclavagistes. Et cela malgré que les outils utilisés par les esclaves restaient extrêmement rudimentaires, en raison de la passivité complète des esclaves dans le travail.

Or, c'est la masse des petits producteurs libres qui composaient l'armée et supportaient le poids principal des impôts nécessités par la guerre. Leur mécontentement et leur opposition étaient strictement parallèles aux révoltes d'esclaves, dont la plus fameuse est celle conduite notamment par Spartacus (74-71 avant notre ère).

Par conséquent, une nouvelle forme sociale apparut. Les maîtres morcelèrent leurs grands domaines en petites parcelles, remises à des anciens esclaves ou des citoyens ayant perdu leur liberté, avec une redevance à payer.

C'est la forme qui sera généralisée par la suite, celle des serfs, au Moyen-âge. La généralisation de cette forme va aller de pair avec l'établissement d'une nouvelle idéologie dominante : le christianisme.

Le christianisme naît comme traduction à l'époque de la protestation des esclaves, des masses ruinées de la paysannerie, des artisans et des déclassés contre l'esclavage et l'oppression.

Le christianisme répondait aussi à l'état d'esprit de larges fractions des classes dominantes qui avaient conscience de leur situation sans issue et qui tendaient à l'établissement du servage en remplacement de l'esclavage.

C'est pourquoi le christianisme n'était pas une idéologie de révolte armée ; tout en adressant des avertissements sévères aux riches et aux puissants, le christianisme de la chute de l'Empire romain exhortait à l'humilité et à la recherche du salut dans la vie d'outre-tombe.

Dans ce qui deviendra la France, ce sont les barbares francs qui vont établir et généraliser le régime social fondé sur le servage et l'idéologie chrétienne. C'est la période historique des « carolingiens », dont les figures les plus connues sont Pépin le Bref, Charles Martel et Charlemagne.

Ce sont les carolingiens qui vont instaurer le principe du statut de « vassal » allant de pair avec la réception d'un « fief », c'est-à-dire le principe de la féodalité.

Et c'est Charlemagne qui va attribuer aux monastères et églises des fonctions très importantes dans la constitution des valeurs d'éducation et de religion.

C'est cela qui va être le détonateur du christianisme comme idéologie de la classe dominante et de la naissance de l'art roman, issu de la constitution par l'aristocratie elle-même d'une élite religieuse.