27 juil 2014

« Antiracisme » ethno-différentialiste, « anti-colonialisme » et agenda islamiste

Submitted by Anonyme (non vérifié)

La manifestation parisienne qui a eu lieu hier à Paris en « soutien à Gaza » est absolument exemplaire. On y a eu en effet la convergence tout à fait logique de trois courants politiques nouveaux, datant de cette dernière décennie, l'ensemble formant une étape historique à comprendre absolument, car relevant d'idéologies de type post-modernes.

Pour quiconque veut le triomphe du matérialisme, il y a là un phénomène dont il faut comprendre la substance.

De fait, trois courants ont poussé à la manifestation parisienne d'hier, qui a rassemblé 5 000 personnes et s'est terminé dans l'affrontement de 300 personnes avec la police. Le paradoxe étant bien entendu que cette manifestation était censée être interdite, ce qui en pratique n'a pas été le cas.

Le premier courant vient de l'extrême-gauche, principalement du Nouveau Parti Anticapitaliste et de la CNT, c'est-à-dire en pratique de courants post-trotskyste et post-anarchiste. Il formule des thèses ouvertement anti-universalistes et ethno-différentialistes, qu'il présente comme de l'antiracisme et de la « déconstruction coloniale ».

Le second courant consiste justement en les « anti-coloniaux » ne venant pas de l'extrême-gauche, à savoir les « Indigènes de la République » ou encore le « collectif Cheikh Yassine », du nom du fondateur du Hamas.

Le troisième courant consiste en les islamistes, qui ont leur propre agenda, plus ou moins contradictoire. Ainsi, Dieudonné est proche de l'Iran qui diffuse un islamisme chiite, tandis que les associations liées aux Frères Musulmans, notamment de Turquie, propagent un islamisme sunnite, qui n'est de fait qu'un courant parmi d'autres de l'islamisme sunnite puisqu'il y a les salafistes « quiétistes », ceux qui veulent le djihad, etc.

Tous ces gens ont un agenda relativement différent. Les « anticoloniaux » d'extrême-gauche espèrent influencer les populations d'origine immigrée des quartiers populaires, tandis que les mêmes mais non d'extrême-gauche tentent de former une sorte de grand lobby de la bourgeoisie moyenne et basse et de la petite-bourgeoisie, à chaque fois d'origine immigrée, surtout arabe.

Les islamistes, de leur côté, entendent soit gagner des points, soit pour les mouvements liés aux Frères Musulmans et au Qatar, à appuyer le Hamas qui est dans une situation très difficile après le coup d'État militaire anti-Frères Musulmans en Égypte.

Mais tous ces gens se rejoignent, par l'anticommunisme. Ils formulent une « critique » de la société, dont les traits idéalistes et petit-bourgeois se rejoignent. Ils rejettent la notion de progrès, l'idée même d'universalisme. Ils n'ont pas d'objectif à long terme, ils vivent dans la critique subjectiviste du moment présent.

On n'est guère étonné alors de retrouver la religion et la fascination qu'elle exerce, à la fois comme refuge et comme moyen de protestation, Karl Marx ayant fabuleusement souligné les deux aspects dans son fameux passage sur « l'opium du peuple » :

« La détresse religieuse est, pour une part, l'expression de la détresse réelle et, pour une autre, la protestation contre la détresse réelle. La religion est le soupir de la créature opprimée, l'âme d'un monde sans coeur, comme elle est l'esprit de conditions sociales d'où l'esprit est exclu. Elle est l'opium du peuple. »

Et cet opium, les apprentis-sorciers post-modernes s'imaginent l'utiliser, alors qu'en fait leur nature petite-bourgeoise les y ramène tout simplement, car leur idéalisme vaut bien l'idéalisme religieux. Ce dernier étant par contre trop contraignant pour les « post-modernes », ils se contentent de le soutenir, de l'utiliser comme vecteur de sa « critique ».

On a là un phénomène idéaliste qui saute aux yeux, qui voit en une jeune femme voilée d'un quartier populaire non pas un individu appartenant aux masses populaires en général, vivant personnellement des contradictions culturelles et idéologiques, mais une sorte de nouveau sujet révolutionnaire. Le simple fait de mettre un voile est stylisé en « révolte »: il faut tout l'idéalisme post-moderne pour nier autant la complexité de la réalité.

Dans les faits donc en tout cas, idéologiquement et socialement, tous ces phénomènes petits-bourgeois se rejoignent. Il y a d'ailleurs des « ponts » soi-disant « anti-impérialistes » très nombreux. Ainsi l'ambassade de Bolivie à Bruxelles a invité cette semaine les « Indigènes de la République » pour la rupture de jeûne du Ramadan, en présence des ambassadeurs de l’Équateur et du Nicaragua. L'année dernière une telle célébration avait été organisé à Paris en mode « iftar antifasciste » par des militants « anti-coloniaux » d'extrême-gauche.

Les « Indigènes de la République » rejettent également de leur côté Dieudonné, mais comme un concurrent, ils ne le combattent pas, et en appellent d'ailleurs à « une lecture décoloniale de la Shoah, cette religion civile européenne ».

Car tous ces gens ont refusé l'offensive de la société contre Dieudonné, qui s'est matérialisée dans une réponse étatique plus que mièvre. Ils ont mis en avant l'équation « Valls = Dieudonné », et encore, au mieux! Car au fond ils pensent que Dieudonné agit dans le bon sens, permettant à de nouvelles choses d'émerger, de nouvelles « critiques ».

Tout cela est fondamentalement irrationnel, complètement idéaliste.

Tellement irrationnel que ces gens croient être à la « tête » de quelque chose alors qu'ils ne font que servir l'agenda des islamistes.

Le NPA croyait pouvoir « gérer » ces manifestations et s'en servir pour redorer son blason mal en point depuis le fiasco des dernières élections. Lui qui avait appelé dans un grand élan populiste « au-delà des divergences (légitimes) qui peuvent exister au sein du mouvement de solidarité, l'unité la plus large doit se réaliser contre l'offensive sioniste », se retrouve totalement débordé par les islamistes.

Ainsi, les émanations françaises des Frères Musulmans ont totalement pris en main la manifestation (comme celle de Barbès la semaine dernière), y assurant d'un côté le « service d'ordre » et la faisant dégénérer d'un autre côté.

Dieudonné de son côté organisait ce jour une « conférence Palestine » avant la manifestation. Plus de 300 personnes se sont acquittés des 5 euros de droits d'entrée pour y entendre Dieudonné expliquer que « la montée de l'antisemitisme a été inventé par le système car le système est sioniste ».

Cette hégémonie culturelle islamiste avec ces trois forces en présence n'est pas un aspect propre à Paris. Il se passe, à des degrès divers selon les situations locales, plus ou moins la meme chose dans toutes les villes ayant connu ce genre de manifestation.

Mais ces tendances négatives seront nécessairemment rejetées par les masses progressistes qui ne veulent pas du fascisme, quelle qu'en soit la forme. Rassembler ces masses dans un large front démocratique rejetant tant la décadence post-moderne que la dictature des monopoles dont elle est un des aspects, telle est aujourd'hui la tâche des progressistes.

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