2 mar 2009

Le NPA et la Guadeloupe: une position social-impérialiste

Submitted by Anonyme (non vérifié)

Besancenot, le principal porte-parole du NPA, s’est rendu fin février aux Antilles. Cette démarche est très éclairante sur la véritable nature de « l’internationalisme » du NPA, qui présente la situation économique des Antilles de la manière suivante :

« La situation aux Antilles a ses particularités. L’économie y a en effet gardé l’essentiel des anciennes structures coloniales. Elle est contrôlée par les « békés », descendants des colons blancs esclavagistes, qui font des profits fabuleux grâce à leur monopole des exportations et importations avec la France.

Mais il y a aussi énormément de points communs. Aux Antilles, à la Réunion, en métropole, comme partout, les privilégiés veulent nous faire payer leur crise. C’est cette politique, pilotée par Sarkozy et le Medef, qui rend la situation de plus en plus insupportable, et oblige les salariés à entrer en lutte pour défendre leurs conditions d’existence. » (tract NPA, « Guadeloupe, Martinique : faisons comme eux ! 
», 16/02/09)

Dans un premier temps, le NPA fait donc remarquer très justement le caractère colonial de l’économie aux Antilles.

Pourtant, le NPA ne suit pas cette logique jusqu’au bout et embraye immédiatement sur une analyse contraire et profondément erronée. En effet, le NPA rattache la réalité de la Guadeloupe et de la Martinique à celle de « la métropole » comme s’il s’agissait finalement d’une seule et même nation.

Or, la réalité nationale de la Guadeloupe, de la Martinique (comme celle de la Nouvelle-Calédonie, de la Guyane, ou de la Corse) est différente de celle de la France.

En effet, la Guadeloupe ou la Martinique se caractérisent par leur nature semi-coloniale semi-féodale.

Cela signifie que la dimension nationale de la Guadeloupe ou de la Martinique est totalement niée par l’impérialisme français qui les maintient sous sa botte, en dépit d’aménagements administratifs de façade. De même, la Guadeloupe et la Martinique demeurent fortement marquées par le féodalisme, comme le prouve l’emprise des békés sur l’économie.

Mais justement, le NPA ne prend même pas la peine de considérer la nature féodale évidente des possessions impérialistes de la France, car s’il le faisait, le NPA devrait alors assumer la nécessité de la révolution démocratique et nationale au lieu de prôner de fausses solutions réformistes

En fait, la dimension semi-coloniale semi-féodale de la Guadeloupe ou de la Martinique ne peut pas être perçue par le NPA qui, rejetant le marxisme-léninisme-maoïsme, n’a pas d’autre ambition que de s’accrocher à l’aile gauche de la social-démocratie. C’est pourquoi le NPA effleure à peine le problème colonial pour établir une comparaison avec « la métropole » qui n’a pas lieu d’être et ignorer complètement l’aspect impérialiste de la question.

C’est bien simple : le NPA ne parle absolument jamais de l’impérialisme français, ce qui révèle encore une fois son caractère fondamentalement social-démocrate.

Cette base sociale-démocrate est même commune à toute l’extrême-gauche institutionnelle qui, comme Lutte Ouvrière (LO), ne voit pas la nature semi-coloniale semi-féodale des possessions de l’impérialisme français et veut étouffer la guerre populaire des masses par une surenchère de réformisme syndical :

« Le gouvernement doit immédiatement retirer ses forces de police et donner satisfaction aux revendications des travailleurs des Antilles. » (Communiqué Lutte Ouvrière, 18/02/09).

« Soutien total au LKP en Guadeloupe et au Collectif du 5 février en Martinique : toutes leurs revendications doivent être satisfaites. » (communiqué NPA : « A Paris, le 16 février, aux côtés des grévistes en Guadeloupe et en Martinique », 16/02/09).

LO et le NPA en sont donc réduits à demander gentiment le retrait des flics et la satisfaction des revendications syndicales !

En somme, tout le projet politique de l’extrême-gauche institutionnelle consiste à ajuster les paramètres de l’oppression et de l’exploitation, à quémander des « améliorations » du capitalisme au lieu de son anéantissement total.

LO et le NPA nient que nous vivions à l'époque de la révolution, que le rôle de l'avant-garde est d'organiser l'affrontement avec l'ordre impérialiste.

Finalement, le NPA et LO ne diffèrent en rien du PS qui joue aussi la carte de la radicalité syndicale, par la voix de Ségolène Royal lors de son déplacement opportuniste aux Antilles.

Elle aussi ne tient pas compte du caractère semi-colonial semi-féodal des possessions impérialistes de la France, ce qui lui permet de tenir un discours faussement radical tout en zappant les aspects impérialiste et féodal, pourtant essentiels, de la question : « Ce qui manque c'est le geste des gros patrons qui se sont enrichis pendant des années sur le système néo-colonial ».

Or, entre « néocolonial » et « semi-colonial semi-féodal », il y a une énorme marge qui correspond à la différence entre « revendications » et « révolution »! Si on considère que les possessions de l’impérialisme français sont des néo-colonies, alors on peut promouvoir des réformes dans le cadre du parlementarisme bourgeois, comme le font le PS, LO et le NPA.

C’est précisément sur cette base que le PS, LO et le NPA peuvent développer leur discours réformiste car, comme ils font semblant d’ignorer l’aspect impérialiste et féodal, de simples réformes démocratiques (au sein du parlementarisme bourgeois auquel ils participent tous) est suffisante pour eux, sous couvert d'aller vers une prétendue mobilisation générale des masses.

En revanche, si on considère que les possessions de l’impérialisme français sont en situation semi-coloniale semi-féodale, alors le problème devient structurel et seule une révolution démocratique et nationale est à même de renverser leur exploitation impérialiste et féodale.

C’est la différence entre un Parti structuré autour de principes marxistes-léninistes-maoïstes, qui lui permettent d’avoir une analyse matérialiste de l’économie politique des possessions de l’impérialisme français, comme le PCMLM, et la gauche institutionnelle, avec son aile trotskiste, entièrement commandée par l’opportunisme politique, perdue dans le brouillard de l’idéalisme historique, et par conséquent complètement coupée des masses.

Car les masses se chargent de rappeler l’idéalisme et l’inconséquence des positions de toute la gauche institutionnelle et de son aile trotskiste. Les émeutes, les pillages de magasins sont des actions d’une guerre populaire prolongée en formation qui montrent que le prolétariat sait se réapproprier ce qui lui appartient.

Surtout, ces actions montrent que les masses de Guadeloupe ou de Martinique veulent se débarrasser définitivement de l’oppression impérialiste de la France et de sa courroie de transmission capitaliste bureaucratique sur place : les békés.

Mais le PS, LO et le NPA sont trop occupés à préserver les intérêts de la petite-bourgeoisie pour se préoccuper des masses. En effet, pour eux, il s’agit avant tout de protéger la petite-bourgeoisie en mettant en avant la distinction ultra-démocratique travailleur / patronat, au lieu de parler de lutte de classes entre prolétariat et bourgeoisie, comme l’exige une analyse matérialiste au service du peuple.

« Il est plus que temps de prendre, ici, des initiatives de solidarité avec ce mouvement social qui s'oppose directement à la politique libérale du patronat et du gouvernement. » (Communiqué NPA : « Aux côtés et avec le peuple guadeloupéen et martiniquais », 10/02/09)

« le combat continue pour s’opposer à l’offensive du grand patronat » (Pour Lutte Ouvrière, le 26 janvier 2009, Nathalie Arthaud, Arlette Laguiller)

« Il faut que ces grands patrons fassent un signe et donnent les 200 euros dès lundi matin » (déclaration de Ségolène Royal en Guadeloupe, 22/02/09)

Clairement, les discours du PS, de LO et du NPA se superposent, ils sont parfaitement interchangeables.

Pourquoi cela ? En réalité, il faut bien comprendre que les trotskystes, corrompus par leur légalisme institutionnel, leurs pratiques syndicales et leur rejet du marxisme-léninisme-maoïsme, ont toujours été condamnés à n’être qu’un Parti Socialiste bis, se contentant de pratiquer la surenchère par rapport aux propositions sociale-démocrates.

Mais aujourd’hui, une convergence aussi flagrante entre social-démocratie et trotskysme constitue une réponse collective au pourrissement avancé du capitalisme, à la radicalisation des masses, au spectre de la révolution. En fait, ce qui réunit aujourd’hui trotskystes et sociaux-démocrates est la nécessité de promouvoir la contre-révolution pour une bourgeoisie aux abois.

Face aux exigences révolutionnaires de notre époque, la « révolution » en tant que slogan opportuniste affichée jusque là par LO et le NPA disparaît soudainement et le trotskisme devient aux yeux de tous ce qu’il n’a (en réalité) jamais cessé d’être : un appendice de la social-démocratie, de la trahison sociale, en un mot de la contre-révolution.

Voilà pourquoi le PS, LO et le NPA dénoncent le néo-colonialisme aux Antilles, une situation qui n’existe pas (parce qu’elle est en vérité semi-coloniale semi-féodale), car leur priorité est de garder le système debout et de ne surtout pas toucher aux intérêts de l’impérialisme français.

Voilà également pourquoi l’« internationalisme » du PS, de LO et du NPA relève d’un paternalisme totalement anachronique qui renoue, sous une bonne couche de démagogie populiste, avec une ligne social-impérialiste en fait jamais complètement abandonnée. D’ailleurs, Besancenot n’hésite pas à parler de « France métropolitaine » (« samedi 21 : avec Jacques Bino et le LKP ») car pour lui, les Antilles font aussi partie de la France…

Ainsi, du côté du NPA, la tournée de Besancenot aux Antilles s’apparente à une visite d’inspection paternaliste d’un cadre « de métropole » dans ce qu’il considère sans sourciller comme une partie intégrante de la France. Dans cette même veine paternaliste, Besancenot relate sur le site du NPA son déplacement aux Antilles dans le style d’un carnet de voyage folklorique de globe-trotter, une manière aussi de poursuivre la starification du « leader », ce qui est très révélateur de la culture petite-bourgeoise de cette organisation (« Accueil de lutte, avec le chant devenu emblématique, « La Gwadeloup, c'est à nous... ». Ça donne plein de frissons... », « vendredi 20 – piquets de grève et barrage »).

Même paternalisme éhonté chez LO pour qui « [Les travailleurs de Guadeloupe et de Martinique] sont cette partie de nous-mêmes qui a osé engager la lutte. » (Arlette Laguiller, éditorial « Lutte Ouvrière », n°2117).

La même distribution de bons points continue avec Royal, « venue en amie des peuples antillais et guyanais » et qui écrivait dans son livre « Femme debout » : « je ne me sens pas blanche là bas...comment vous dire...je me sens antillaise », sous prétexte d’y avoir passé une partie de son enfance.

Il n’existe en vérité aucune différence de fond entre le PS, LO et NPA qui se défilent tous devant la révolution démocratique et nationale, esquissé par la révolte populaire aux Antilles, première étape indispensable sur la voie de la révolution socialiste.

Débordés par les masses, les légalistes de LO et du NPA continuent de prôner « la bonne vieille grève générale » (la formule est de Besancenot, « Interview d'Olivier Besancenot sur le sens de son voyage en Guadeloupe et Martinique ») :

« La grève générale en Guadeloupe et en Martinique est un exemple à suivre partout. » (communiqué NPA : aux côtés et avec le peuple guadeloupéen et martiniquais, 10/02/09).

« Seule la menace de la grève générale peut les faire reculer » (Arlette Laguiller, éditorial « Lutte Ouvrière », n°2117).

Pour le PCMLM, si grève il y a, il faut alors qu’elle soit dotée d’un contenu politique, et non réformiste, pour permettre aux masses de s’organiser et de renverser l’ordre semi-colonial semi-féodal imposé par l’impérialisme français.

Dans le climat insurrectionnel d’aujourd’hui, qui a déjà causé la mort d’un militant, les masses ont commencé à faire valdinguer le vieil ordre impérialiste, car la rébellion a déjà enclenché le processus de guerre populaire et porte en elle les ferments de la révolution future. Une perspective révolutionnaire bien sûr effrayante pour le NPA et Besancenot qui écrit : « Loin des clichés sur des barrages tenus par des bandes de jeune incontrôlés (qui par ailleurs existent), nous rencontrons de nombreux barrages autour desquels une vie sociale alternative se développe pour les habitants du quartier : chaque quartier tient son barrage. » (« vendredi 20 – piquets de grève et barrages »).

Alors que l’Etat impérialiste français envoie ses flics et affiche sa fébrilité face à l’étincelle populaire capable de mettre le feu à toute la plaine, le NPA montre de quel côté il penche en se détournant de la juste violence populaire.

Pour le PCMLM, ces « jeunes incontrôlés » forment justement l’avant-garde de la guerre populaire prolongée qui doit conduire les masses vers la révolution démocratique et nationale, puis la révolution socialiste.

La question est donc clairement posée : veut-on d’une ligne contre-révolutionnaire, enchaînée à l’ordre ancien et à de vieilles méthodes réformistes, ou bien veut-on d’un Parti de révolutionnaires professionnels organisés, fondé sur les principes MLM, dont la clairvoyance est nécessairement au service du peuple et répond aux exigences de notre époque?

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