24 Jan 2015

L'Arabie saoudite, exemple typique de pays semi-féodal semi-colonial

Submitted by Anonyme (non vérifié)

Dans le monde il y a les pays semi-coloniaux semi-féodaux et les pays capitalistes-impérialistes. La profondeur du semi-féodalisme de la première catégorie de pays est très variable : il est ainsi bien plus faible en Corée (du Sud) qu'au Mali.

L'exemple de l'Arabie saoudite, dont le roi Abdallah ben Abdelaziz al-Saoud vient de mourir, est édifiant de ces pays semi-coloniaux semi-féodaux qui sont à la fois profondément féodaux, et en même temps ultra-modernes dans leur gestion du semi-colonialisme.

L'Arabie Saoudite est née récemment, sous l'impulsion de Mohammed Ibn Saoud (1710 – 1765), qui a fondé le royaume local en s'appuyant sur Mohammed ben Abdelwahhab (1703 - 1792), théologien qui fut à la source de ce qu'on a appelé le wahhabisme.

Cette idéologie est ultra-féodale, mettant le clegé en avant de telle manière que l'expression populaire religieuse soit catégoriquement réfutée : les ennemis du wahabisme sont à la fois le capitalisme qui se développe en Europe, l'Empire ottoman qui domine les pays arabes, et enfin les masses d'Arabie elles-mêmes.

Pour correspondre à ces exigences, Mohammed ben Abdelwahhab s'est appuyé sur la présence de la ville de La Mecque en Arabie, pour annoncer un Islam « officiel », centralisé et conservateur. Les wahhabites se désignent ainsi sous le nom salafis, c'est-à-dire de ceux qui ont les valeurs des premiers croyants de l'époque de Mahomet, les « vertueux anciens ».

Un autre terme employé par les wahhabites est celui de « muwahhidun » (« unitaristes »), terme rappelant ici que « l’État islamique » a, à la base, la même idéologie que l'Arabie saoudite : c'est le Tawhîd. Le grand livre de Mohammed ben Abdelwahhab est en effet le Kitâb ut-Tawhîd, le « Livre de l’unicité ».

C'est un ouvrage de grande simplicité, consistant en une série de chapitres citant le Coran et les paroles du prophète Mahomet qui ont été conservées (les Hadiths), avec un commentaire consistant en une dizaine ou plusieurs dizaines de « valeurs » résumées en une phrase chacune.

Dieu est présenté comme « un » et par conséquent toute « association » est interdite, de la même manière toute « innovation » est refusée, comme classiquement dans le monothéisme juif et arabe ; cependant, le mouvement est poussé à l'extrême, le roi et le chef religieux se portant garant de la tradition.

Ainsi, l'Arabie saoudite espère même détruire le dôme vert de la mosquée de Médine qui abrite le tombeau de Mahomet, pour placer le cercueil anonymement dans un cimetière. Rien à part Dieu ne doit être vénéré, aucun saint pas plus que le prophète.

C'est cela qui explique la destruction des mausolées en Afrique organisée par les islamistes, comme à Tombouctou. Le sens de ce culte « unique » ne tient nullement à une vision moniste du monde, comme chez Baruch Spinoza ou le matérialisme dialectique : c'est une célébration de l'ordre féodal, de la domination conservatrice par en haut.

On l'aura compris en conséquence : les descendants de Mohammed ben Abdelwahhab ont toujours formé l'élite religieuse de l'Arabie saoudite, les descendants de Mohammed Ibn Saoud formant eux l'élite politique, les deux familles évitant tout conflit par de multiples mariages tissant des liens entre elles.

Tout cela fut permis d'exister dans le monde moderne par la découverte du pétrole en 1938, et le passage de l'Arabie Saoudite d'une domination anglaise à une domination américaine. L'argent coula alors à flot, le régime ne se maintenant que par les pétro-dollars et le soutien militaire américain, alors que la famille Al Saoud empochait par exemple 2000 milliards de dollars entre 1973 et 2002.

Ce qui s'est alors passé n'est compréhensible qu'à la lumière du matérialisme dialectique.

La thèse du matérialisme dialectique est qu'un pays non capitaliste-impérialiste est de type semi-colonial semi-féodal. La pénétration impérialiste a aboli le mode de production fondé sur la reproduction simple, en formant des grands propriétaires dans les campagnes et une classe bourgeoise bureaucratique dans les villes.

Cependant, de manière tout à fait logique, il y a une concurrence voire une contradiction secondaire, voire principale, qui se développe entre le semi-féodalisme et le semi-colonialisme. C'est par exemple tout à fait flagrant en Iran, où le Shah représentait le semi-colonialisme modernisateur se confrontant au semi-féodalisme, qui organisa alors la chute du régime.

Avec le développement des forces productives ces 40 dernières années, l'affrontement entre semi-colonialisme et semi-féodalisme est même devenu d'une actualité très grave dans toute une série de pays. Il faut d'ailleurs ici, contrairement aux anarcho-trotskystes, ne pas se leurrer sur ce que représente la résistance kurde de Kobanê : si elle s'oppose au semi-féodalisme, elle est portée par des forces rentrant directement dans le jeu semi-colonial mis en place par les Etats-Unis, et à ce titre soutenu par eux.

Il faut bien comprendre par ailleurs ici que les impérialistes ne cherchent pas forcément la stabilité : provoquer des troubles leur est utile afin de diviser pour régner.

Il est typique en France de se moquer de Georges W. Bush pour avoir mené la Guerre du Golfe, de le présenter comme une sorte d'attardé ayant amené des catastrophes… Alors qu'évidemment il n'a été qu'un acteur mettant en place des stratégies extrêmement élaborées par le Pentagone (le département de la defense).

On voit bien d'ailleurs que les Etats-Unis d'Amérique ont tout à fait profité de l'existence d'Al Qaïda, les attentats de ces terroristes n'ayant absolument aucun impact historique sur le capitalisme américain, ni son impérialisme, mais permettant par contre mobilisations nationalistes et jutification « morale » et idéologique de l'interventionnisme.

Oussama Ben Laden, justement, est un saoudien qui a joué un rôle important dans le soutien américain et saoudien aux islamistes opposés à l'intervention russe social-impérialiste en Afghanistan.

Oussama Ben Laden n'a pas changé de camp, il a simplement considéré que le semi-féodalisme devait se débarrasser du semi-colonialisme : il a pris l'idéologie wahhabite au sérieux… Sans voir qu'elle n'était que le fruit, en tant que féodalisme, du colonialisme lui-même…

Ouvrir la page web du dossier La signification historique de la falsafaC'est dire ici si les pétro-monarchies, c'est-à-dire les pays semi-coloniaux semi-féodaux, par définition fascistes, mais qui plus est très riches, sont des plaies. Le Qatar et l'Arabie saoudite ont diffusé leurs idéologies religieuses autant que possible, afin de renforcer leurs propres positions : c'est ce qu'on appelle le « soft power » en langage journalistique.

Tout cela a fait perdre un temps énorme sur le plan historique. La lutte devait se dérouler contre le mode de production capitaliste, et ses appendices semi-coloniaux semi-féodaux, mais quelques décennies ont été perdues ici de par les influences des idéologies semi-féodales… et de leurs appendices les idéologies post-modernes dans les pays impérialistes.

D'ailleurs, tant les idéologues islamistes que post-modernes se fondent sur les théories inventées dans les facultés américaines et françaises (la « french theory »), avec les mêmes références (Jean-Paul Sartre, Friedrich Nietzsche, Henri Bergson, l'anticapitalisme romantique, etc.).

Il va de soi que tout cela est une anomalie qui, historiquement, n'est qu'une parenthèse avant le retour du communisme pour sa seconde grande vague, dont nous sommes bien entendu aux premières loges.

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L'exemple de l'Arabie Saoudite, dont le roi Abdallah vient de mourir, est édifiant de ces pays semi-coloniaux semi-féodaux qui sont à la fois profondément féodaux, et en même temps ultra-modernes dans leur gestion du semi-colonialisme...