26 nov 2014

Comment comprendre notre héritage français ?

Submitted by Anonyme (non vérifié)

C'est une question culturelle d'une très grande importance. La révolution n'a jamais lieu de manière cosmopolite, elle se tient toujours dans un cadre précis, et la révolution socialiste vise le capitalisme, qui existe dans un cadre précis, celui de la nation.

Le capitalisme a, à ses débuts, donné naissance à la nation, et son propre développement a établi celle-ci. La révolution mondiale concerne donc tous les pays, mais pas considérés de manière uniforme : elle concerne chaque pays, pris un par un.

C'est pour cela que l'extrême-gauche petite-bourgeoise ne parle jamais de la France dans sa réalité économique et culturelle : elle ne parle que de faits ici et là, de la même actualité que les médias bourgeois, ou bien de valeurs abstraites, cosmopolites.

Ainsi, en enlevant le cadre national, il n'y a plus de possibilité authentique de révolution socialiste, de prise du pouvoir par la classe ouvrière de toute la société.

Lénine et Mao Zedong n'ont eu de cesse d'analyser la réalité concrète de leur pays, son développement économique et culturel, afin de souligner la dimension positive qui existait, y opposant la dimension négative. On ne retrouvera rien de cela, bien sûr, dans l'extrême-gauche petite-bourgeoise d'Arlette Laguiller, Olivier Besancenot, etc.

lesmaterialistes.com propose une explication claire, détaillée, exhaustive de Pierre-Joseph Proudhon, Jean Jaurès, la « Belle Epoque », Jean-Jacques Rousseau, les Lumières, etc. On ne trouvera rien de cela dans l'extrême-gauche petite-bourgeoise, qui s'en remet ici... aux bourgeois, à leur vision du monde, quant ils ne nient pas directement l'existence de la France (comme les anarchistes par nihilisme national, des « maoïstes » avec « l'Etat français », les régionalistes inventant des « nations » etc.).

Il faut ici d'ailleurs souligner un point important, historique. Rien n'est plus faux que de considérer comme bourgeois le fait d'assumer la culture. C'est justement parce qu'elle assume la position de classe dominante que la bourgeoisie fait semblant de porter la culture : elle veut montrer qu'elle seule est capable de maintenir la civilisation, d'où ses musées, ses cinémas, ses théâtres, ses opéras, etc.

Lien vers le dossier sur Molière, portraitiste bourgeoisEn réalité toutefois, c'est idéologique et non culturel : la bourgeoisie ne porte plus la civilisation. Elle utilise la culture pour produire de l'idéologie à son service. Le grand défi est alors de convaincre les masses populaires du caractère révolutionnaire du réalisme des romans d'Honoré de Balzac, alors que la bourgeoisie a dégoûté les masses d'Honoré de Balzac et célébré des romans décadents et élitistes pour un public bourgeois.

Ici, les masses sont bloquées, car la révolution socialiste représente pour elle la démocratie authentique. Mais on ne peut établir une démocratie véritable, populaire, sans disposer soi-même d'une culture qui lui corresponde.

Et cette culture ne peut qu'être nationale, produite très concrètement et historiquement par les masses établissant la démocratie. Un roman russe de Maxime Gorki est indéniablement démocratique, mais il n'a pas été produit par les masses françaises, qui peuvent l'apprécier, mais n'en appréhendent pas facilement tous les aspects car ce n'est pas son vécu.

Par contre, ce qui a été le produit authentiquement démocratique en France parle aux masses de France, qui en comprennent de l'intérieur la substance, les enjeux, la valeur. Molière est ainsi un auteur très apprécié et dont le contenu est indéniablement démocratique.

Est-ce à dire par là qu'il correspond à la culture de la démocratie populaire ?

Un argument erroné, apparemment juste mais erroné, serait de dire que Molière a été démocratique pour son époque mais qu'aujourd'hui, on doit en relativiser la portée, la signification.

C'est erroné pour une raison très simple : on ne peut pas relativiser ce qui est démocratique. Soit c'est démocratique, soit cela ne l'est pas.

Bien entendu, il y a des choses qui contiennent des éléments démocratiques, mais comme ce n'est pas authentiquement culturel, ce n'est pas authentiquement démocratique. Une œuvre qui reste dans le temps, dans la vie de la société, produite par les masses, est une œuvre démocratique authentique, une œuvre culturelle.

Le grand problème est que sans le Parti, les masses perdent ce qu'elles ont produit, elles l'oublient. Mais comme c'est démocratique, elles peuvent le récupérer rapidement. Le roman Le feu – journal d'une escouade de Henri Barbusse, ou la peinture des frères Le Nain, voilà ce qui parle forcément aux masses. Voilà ce qui forge leur culture démocratique, qui n'attend que cela pour s'élancer.

On dira alors, peut-être, que le style d'œuvres du passé peut sembler dépassé, voire franchement décalé. Les habits de Molière ne sont-ils pas marqués par une époque ? Mais dire cela est insuffisant : les habits d'il y a 30 ans semblent démodés également et pourtant ce qui a existé alors de manière démocratique est tout autant vivant.

Le grand problème ici, de fond, consiste en les préjugés des masses. On leur a inculqué que la culture, la vraie culture, appartenait à l'élite, que c'était au final quelque chose de bourgeois. D'où le dégoût pour les études, pour la musique classique, pour la littérature, voire pour le travail.

La tâche du Parti, et c'est fondamental, est de lever le drapeau de la culture démocratique, qui traverse les époques avec, il est vrai, plus ou moins d'intensité, mais a toujours la même substance.

Molière n'a pas abordé des questions prolétariennes, mais étant un héraut de la bourgeoisie la plus radicale à son époque, et ce fut une bourgeoisie offensive, il porte de manière authentique l'esprit démocratique, ses exigences, son contenu.

Sur le plan de la qualité, Molière est des nôtres. Que sur le plan de la quantité, il y ait des aspects qui manquent, c'est indéniable. Certains sont en germes, d'autres ne pouvaient pas être là, pour des raisons historiques. Mais il n'y pas de « culture de classe », il n'y a pas de « culture prolétarienne » et Molière n'est pas une composante d'une culture bourgeoise qu'il faudrait reconnaître de manière relative.

Il n'y a pas de « culture bourgeoise », de « culture prolétarienne », il n'y a que la culture, portant le progrès, et par conséquent les exigences du progrès, une charge démocratique. Reconnaître la valeur de cette charge, en rapport avec son époque, voilà ce qui est matérialiste dialectique. Et c'est cela qui permettra aux masses de produire de nouveaux Molière, cependant avec une charge démocratique plus intense, plus approfondie, plus marquée.

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La révolution n'a jamais lieu de manière cosmopolite, elle se tient toujours dans un cadre précis, et la révolution socialiste vise le capitalisme, qui existe dans un cadre précis, celui de la nation...