4 sep 2009

Apprendre des leçons de Mariategui sur le romantisme du fascisme français!

Submitted by Anonyme (non vérifié)

Il y a quelque chose d’étonnant à voir que le romantisme du fascisme français a été analysé et compris par un homme qui se trouvait loin de là, paralysé et bloqué dans une chaise roulante.

Le péruvien José Carlos Mariategui (1894-1930) a saisi des choses qui n’ont pas été comprises, ou tout au moins pas assez, en Europe à cette époque : la dimension de l’époque entière.

Mariategui a vu que la révolution socialiste touche ce qu’il y a de plus profond dans les êtres humains ; elle produit des valeurs, valeurs qui doivent être portées et levées comme un nouveau drapeau.

Il a compris que le fascisme prétendait porter une « nouvelle manière de vivre », et il a analysé ses prétentions, montrant une compréhension pour la volonté de mettre bas l’ancien ordre des choses, mais démontrant la vacuité du romantisme fasciste, puisqu’il était purement anachronique à l’époque de la révolution socialiste.

Mais il y a quelque chose de plus étonnant : la manière dont Mariategui a exprimé son point de vue, ou plus exactement quelles armes théoriques il a employé.

Il est bien connu que dans le mouvement communiste, la question de la culture a été soulevée dans un processus commençant dans les années 1920-1930 (avec par exemple Brecht et Gorki, culminant dans le réalisme socialiste dans les domaines de l’art et de la littérature) et finissant avec la Grande Révolution Culturelle Prolétarienne en Chine Populaire et les leçons de Mao Zedong dans les domaines idéologiques et culturels.

Comment Mariategui a-t-il déjà compris ces points dans les années 1920 ?

La même question peut être posée avec sa compréhension de comment les fascistes mettent en avant l’aspect subjectif, et de la violence comme outil révolutionnaire nécessaire.

Il est bien connu que le mouvement communiste a dû atteindre Mao Zedong et sa théorie de la guerre populaire, et les expériences des guerres populaires dans le monde dans les années 1960-1980.

De nouveau nous devons demander : comment Mariategui a-t-il compris ces points, déjà dans les années 1920 ?

La réponse est : Mariategui ne pouvait pas encore les comprendre de manière scientifique, de manière parfaite, alors il a utilisé des outils théoriques qui n’étaient pas marxistes, mais dont il a changé la signification.

Il a utilisé Bergson et Sorel, deux penseurs français appartenant à des écoles idéalistes, dont les pensées sont clairement pré-fascistes, et qui ont joué un grand rôle dans la fondation des constructions théoriques du fascisme.

Sorel est devenu anti-marxiste, parce qu’il pensait que les vues de Karl Marx sur la Révolution n’étaient pas assez profondes : il voulait que la révolution prolétarienne ait un aspect spirituel. Et en raison de cela, Sorel voulait que la lutte de classe développe des mythes puissants, pour mobiliser les masses.

Mariategui était marxiste et connaissait les enseignements de Lénine : ses analyses du Pérou sont totalement scientifiques. Mais il a vu qu’il avait besoin de davantage de concepts, aussi a-t-il utilisé les thèses de Sorel pour expliquer le besoin de la révolution socialiste d’avoir, disons, un « romantisme révolutionnaire. »

Mariategui n’a pas dit que la révolution socialiste avait besoin de mythes – il était matérialiste. Mais il souligné le fait que la révolution socialiste doit être aussi « puissante » idéologiquement que la religion.

De la même manière, il a utilisé la thèse idéaliste de Bergson quant à l’intuition pour mettre en avant les nouveaux « sentiments » du révolutionnaire. Un romantisme révolutionnaire qui ne sera pas vu avant les années 1960…

Les leçons de Mariategui sont ici étonnantes : il a étudié les monarchistes français de l’Action française, il a étudié les positions de Drieu La Rochelle, peut-être le principal écrivain des années 1920-1930, qui a compris que le choix était entre fascisme et communisme (mais qui a choisi le fascisme).

Il a touché une dimension qui n’était alors pas vue en France – et c’était clairement un mauvaise chose contre le fascisme. En ce sens, quand nous lisons le « Feu follet » de Drieu La Rochelle, on ne peut que penser : Drieu La Rochelle aurait dû devenir un communiste, et pas un fasciste !

En ce sens, la thèse de Mariategui nous aide aussi beaucoup pour comprendre le Parti Communiste du Pérou et les thèses de Gonzalo.

Les documents de Gonzalo sont pleins de passion et d’images révolutionnaires. Il est facile de reconnaître de nombreuses images de la bible, que Gonzalo a transformées d’une manière littéraire en armes idéologiques révolutionnaires.

Gonzalo a souligné, de la même manière, la nécessité de ressentir un engagement individuel qui soit absolu, correspondant à l’époque révolutionnaire. C’est pourquoi il a souligné le devoir de lever la bannière de l’optimisme révolutionnaire.

La même chose apparaît en ce qui concerne la question de la violence : Gonzalo souligne, comme en fait tous les dirigeants révolutionnaires des années 1960-1980 qui ont compris les leçons d’Engels et de Mao Zedong, le rôle de la violence révolutionnaire, car la violence signifie pour les larges masses la libération de leurs chaînes.

Mariategui a « senti » tout cela, mais ne pouvait pas l’exprimer de manière scientifique, alors il a utilisé des armes théoriques qui n’étaient ni révolutionnaires ni prolétariennes ; Gonzalo a souligné les mêmes aspects, mais de manière scientifique.

Et nous devons comprendre ici pourquoi, lorsque Gonzalo a été arrêté, le Parti Communiste du Pérou a fait face à un recul temporaire, le fameux « détour ».

Les opportunistes ont utilisé la même forme, mais modifié le contenu révolutionnaire. Les fausses lettres de Gonzalo, produites par la contre-révolution (Fujimori et la CIA) ont utilisé la même forme romantique révolutionnaire, mais ont produit quelque chose qui n’était pas scientifique, mais simplement un mythe : la révolution serait stoppée mais recommencerait dans exactement 70 années, il y aurait des cycles révolutionnaires, etc.

Cela montre deux choses : tout d’abord que les phénomènes romantiques doivent être étudiés par les révolutionnaires, afin de comprendre comment ils sont le produit de la crise de l’impérialisme. Le groupe Nirvana et le Grunge sont des exemples de phénomènes intéressants, combinant la critique romantique du capitalisme et le pessimisme petit-bourgeois.

Ensuite, que l’aspect scientifique doit toujours être à l’esprit. Le révisionnisme de Prachanda par exemple, a combiné une forme révolutionnaire, mais au niveau scientifique, les erreurs du contenu pouvaient être vues très tôt, déjà en 2005.

En ce sens : comprenons le romantisme fasciste de manière dialectique, et levons plus haut le drapeau révolutionnaire de notre époque, plein d’optimisme révolutionnaire ! 

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