Le mythe du Bund et son utilisation anarchiste
Submitted by Anonyme (non vérifié)Dans le document nantais critiquant Dieudonné cité dans l'article Interdiction de Dieudonné à Nantes ? Hourra !, on retrouve mis en avant par « l'action antifasciste de Nantes » l'utilisation du « Bund ».
Il y a lieu de parler, car il est typique de l'antisémitisme anarchiste d'utiliser l'argument du « Bund ». On trouve de temps en temps, sortant de nulle part, des références anarchistes au « Bund ». Pourquoi ?
Le Bund a été une organisation nationaliste juive existant en Lituanie, de Pologne et de Russie ; son nom en tant que tel fut « Algemeyner Yidisher Arbeter Bund in Lite, Poyln un Rusland » (Union générale des travailleurs juifs de Lituanie, de Pologne et de Russie).
C'était une organisation se revendiquant socialiste, mais dans un esprit anti-universaliste. Le Bund rejetait ainsi l'unification des masses juives avec les autres masses, prônant l'autonomie culturelle et juridique.
Le Bund prônait ainsi un sionisme mais « local », un regroupement national de type identitaire, sur la base de la langue yiddish.
C'est une démarche totalement petite-bourgeois qui plaît aux anarchistes, et comme en plus le Bund s'est opposé aux bolcheviks et à la révolution d'Octobre, cela leur plaît d'autant plus.
C'est une démarche antisémite, car niant que les personnes juives peuvent aller à l'universel. Elles devraient se cantonner à leur ghetto. Voilà pourquoi les anarchistes ne parlent jamais des personnes juives, et les très rares fois où ils sont obligées politiquement de le faire, ils utilisent le « Bund » pour masquer leur antisémitisme.
Donc, dans son document, au lieu d'appeler à la défense, de manière militarisée s'il le faut, des personnes juives, « l'action antifasciste de Nantes » utilise l'argument du « Bund ».
L'antisémitisme a toujours son « bon juif » : ici c'est le Bund. On lit donc :
« Les victimes de la Shoah dont se moque Dieudonné étaient bien souvent des juifs Polonais ou Russes du mouvement socialiste du Bund opposés au sionisme. »
Cela est typiquement antisémite à la française : on ne connaît rien à la Shoah, mais on se permet de remarques à l'emporte-pièce, et on utilise le Bund comme argument.
Remarques déjà maladroites dans la formulation, car quand on lit la phrase on peut penser que les masses juives assassinées auraient mérité leur sort si elles étaient sionistes.
Mais regardons ce que signifie ce « bien souvent ». « Bien souvent », dans cette phrase, signifie que ne constituerait pas un argument antinazi les 450 000 personnes juives hongroises assassinées, les 900 000 personnes juives ukrainiennes assassinées, les 340 000 personnes juives roumaines assassinées...
Seules les personnes juives russes et polonaises constitueraient un argument car elles seraient, « bien souvent » liées au Bund.
Et peu importe si en fait sur 6 millions de personnes il y a 107 000 personnes juives russes qui ont été tuées : il faut placer le Bund au centre, et justement comme 3 millions de personnes juives polonaises ont été assassinées, l'argument est censé passer.
Sauf que bien entendu cela relève du mythe politique que de dire que les victimes de la Shoah seraient « bien souvent » des gens du Bund.
En Russie, le Bund n'existe plus dès les premières années de la révolution russe, interdit par le pouvoir soviétique, qui reconnaissait la nationalité juive mais jamais le séparatisme.
22 ans après la révolution russe, en 1939 donc, le Bund n'existe plus en Russie soviétique.
Et si l'on prend la Pologne, le Bund n'a jamais représenté la majorité des personnes juives. Il faut tout le fantasme de l'antifascisme petit-bourgeois de 2013 pour penser qu'en 1938 les masses juives étaient organisées dans le Bund !
En 1920, le quart des bundistes rejoignent le camp de l'Internationale Communiste en devenant le « kombund » et donc rejoignent le Parti Communiste de Pologne en 1922.
En 1930, le Bund avait eu moins de 70 000 voix aux élections parlementaires polonaises. Le seul succès du Bund fut, aux élections municipales de 1938-1939 et en alliance avec le Parti Socialiste (donc contre les communistes), d'obtenir la majorité dans le tiers de 89 villes à majorité juive.
En 1939, le Bund a cependant 20 000 membres... Et il n'existe que comme outil pour le Parti Socialiste pour contrer les communistes, selon une stratégie formulée par le boucher contre-révolutionnaire Józef Piłsudski...