Aristote et la philosophie première – 1re partie : l'ouvrage «La métaphysique»
Submitted by Anonyme (non vérifié)La métaphysique est une compilation de textes attribués à Aristote.
La métaphysique est une compilation de textes attribués à Aristote.
Le titre de l'oeuvre désigne soit « après la physique », soit « au-delà de la physique ».
Aristote pose déjà le principe de la connaissance atteignant l’universel, par l’intermédiaire de la sensibilité accumulée.
« La métaphysique » n'appelle pas simplement à connaître les choses et leur fonctionnement, mais également à saisir leur nature et le caractère naturel de celle-ci.
Lénine a bien vu qu'il existe un parcours allant d'Aristote à Hegel.
De quoi parle Aristote dans « La métaphysique » ? L’œuvre consiste en fait en toute une série de réflexions sur les modalités propres à la mise en mouvement depuis le début de la chaîne.
out changement change quelque chose, par quelque chose, et en quelque chose.
La conception d'Aristote, c'est que l'être de chaque chose, c'est son accomplissement.
La substance immobile, c'est le moteur premier, qui meut mais n'est lui-même pas mu, qui s'accomplit lui-même et porte le principe universel du mouvement comme accomplissement. S'intéresser à cette substance mobile, c'est comprendre comment les choses peuvent exister.
Il faut bien voir une chose très particulière : d'un côté, Aristote dit que la substance la plus authentique n'a pas de matière, de l'autre que l'accomplissement ne se déroule que dans la matière.
Dans le livre XII, Lambda (Λ), il dit de manière formelle que :
« Aussi, Platon ne se trompe-t-il pas quand il dit qu’il y a [pure hypothèse, qu'Aristote réfute] autant d’Idées qu’il y a de choses dans la nature, si, toutefois, il y a des Idées différentes pour des choses telles que le feu, la chair, la tête, etc.
Le processus est le suivant : vue de la réalité => réalité composée de choses qu'on peut décrire => l'essentiel de ces choses est ce qui compte le plus => l'essentiel de ces choses existe en raison d'une cause => cette cause porte l'accomplissement de ce qui est causé => le fait d'aller de la cause au causé est porté par Dieu qu'on peut résumer par la formule cause=causé, modèle complet d'accomplissement.
Aristote a été réellement compris par la falsafa arabo-persane, avec Alfarabi, Avicenne, Averroès.
Il est frappant de voir qu'à de nombreuses dans « La métaphysique », Aristote souligne plusieurs une erreur, en disant qu'elle reviendrait à se perdre dans l'infini. L'appréhension de l'infini est systématique chez Aristote, et c'est paradoxal, car pour lui l'univers a éternellement existé, parallèlement au moteur premier.
L’ interprétation du chapitre XV du Capital a une valeur décisive : selon la manière qu’on a de le comprendre, on a une vision particulière du capitalisme. Selon qu’on considère que la crise de ce dernier soit inévitable ou non, qu’elle prenne telle ou telle forme, on a des conclusions politiques fondamentalement différentes, s’appuyant de fait sur une compréhension radicalement différente du marxisme.
Au début du chapitre XV, Karl Marx réaffirme le principe de baisse tendancielle du taux de profit. Pour faire court, rappelons ici simplement que les capitalistes introduisent toujours plus de machines dans la production. Ils pensent ainsi rogner sur les dépenses de salaires, mais comme la vraie richesse vient de l’exploitation des ouvriers, ils scient la branche de l’arbre sur laquelle ils sont assis.
Immédiatement après les deux phrases sur le taux de profit, Karl Marx ajoute une phrase capitale :
« Ce qui d’un autre côté accélère à son tour l’accumulation, quant à la masse, bien que le taux de l’accumulation baisse avec le taux du profit. »
Le chapitre XV implique tellement de choses qu’en 3-4 pages, on a déjà la base de la conception de Rosa Luxembourg et celle d’Eduard Bernstein.
Pourtant, il reste encore à voir comment on en arrive à la crise du capitalisme : pour l’instant, on a seulement somme toute des déséquilibres (d’où Eduard Bernstein), ou bien une réduction ininterrompue du nombre de capitalistes (d’où Rosa Luxembourg).
Karl Marx, pour commencer, constate la chose suivante dans la seconde partie du chapitre XV. Les capitalistes peuvent soit mettre de côté des ouvriers, soit renforcer leur exploitation. Dans le premier cas, le taux de profit baisse, dans le second il augmente.
Or, même en augmentant le taux d’exploitation des ouvriers restants, on ne rattrapera pas le niveau d’exploitation acquis lorsqu’il y avait plus d’ouvriers. La baisse tendancielle du taux de profit semble inéluctable.
Voici un long passage dans lequel Karl Marx explique la nature de « crise » propre au capitalisme. Il faut ici bien faire attention : ce n’est pas une définition terminée, il reste une sous-partie, on n’en est ici qu’à la fin de la seconde sous-partie.
Il ne faut jamais perdre de vue que la question de la nature de la crise n’exige pas simplement une « logique » adéquate ; c’est indéniablement avant tout une question politique.
C’est la lecture politique de la réalité qui va prédéterminer la manière de saisir la crise du capitalisme et ses modalités. Cette question a pour cette raison été celle des grands débats dans l’Internationale Communiste dans les années 1920.
La sous-partie « Excédent de capital accompagné d’une population excédentaire » est aussi longue que les deux précédentes prises ensemble ; elle dispose qui plus est d’un addenda tout aussi long, qui fournit cependant des éléments secondaires, des précisions.
Elle est le prolongement direct de ce qu’a dit Karl Marx auparavant et présente les traits généraux de ce qu’est la crise du mode de production capitaliste au sens strict.
Immédiatement après avoir précisé dans quelle mesure la surproduction de capital n’est pas une « surproduction absolue tout court », Karl Marx précise dans quel cas elle serait une surproduction des moyens de production, une surproduction absolue.
Il faut comprendre la chose ainsi selon lui :
Jean-Sébastien Bach arrive à un moment historique où son activité peut être le produit de deux pôles contradictoires. Il y a, d'un côté, une véritable base luthérienne sur le plan musical.
Eugen Varga, au lendemain de la guerre, était un cadre considéré comme ayant de la valeur dans le contexte d'évaluations économiques. Il fut à ce titre du voyage de la centaine de conseillers accompagnant Molotov, en juin 1947 à Paris, pour discuter avec la France et la Grande-Bretagne au sujet de la question des aides.
Quelles étaient les thèses formulées dans Les changements dans l'économie du capitalisme comme résultat de la seconde guerre mondiale ?
Eugen Varga publia le premier chapitre de l'ouvrage dans la revue de l'Institut, en juillet 1944. Puis, quatre autres chapitres furent publiés par la suite, jusqu'en septembre 1945.
L'impact de l'ouvrage d'Eugen Varga fut tel qu'il fut décidé en mars 1947 d'organiser une discussion à ce sujet. Eugen Varga publia le même mois un article sur les « démocraties de nouveau type », affirmant que leurs Etats n'étaient ni capitalistes, ni socialistes, mais une forme radicalement nouvelle.
L'année 1947 fut celle où les partisans d'Eugen Varga furent contrés ; l'année 1948 fut celle de l'analyse du vargisme, Eugen Varga étant condamné comme relevant de « l'idéologie bourgeoise-réformiste ».
En apparence, le vargisme émerge donc en 1945, s'affirme ouvertement en 1946-1947, étant réfuté en 1947, puis vaincu en 1948. Dans les faits, Eugen Varga ne fut pas en mesure de publier d'ouvrage en 1951 et 1952, et pratiquement aucun article en 1948, 1949, 1950 et 1953, lui qui auparavant réalisait une avalanche d'ouvrages et d'analyses.
Le premier novembre 1951, 400 économistes se réunissent dans le bâtiment du Comité Central du PCUS(b), afin de travailler sur un manuel d'économie politique considéré comme nécessaire à établir, sous la supervision de Konstantin Ostrovitianov. À cette occasion, un rapport fut notamment établi sur la question de la possibilité et du caractère inévitable des guerres inter-impérialistes dans la période actuelle. Le point de vue d'Eugen Varga fut noté.
Eugen Varga feignit de saluer l'ouvrage de Staline et ses enseignements, lors d'un discours à l'Institut d'économie. Il n'en était rien en réalité et il s'empressera, dès qu'il le pourra, d'attaquer publiquement les chapitres cinq et six, qu'il prétendait reconnaître encore, donc, en 1952 :
Le concept du capitalisme monopoliste d’État formulé en Union Soviétique est une définition qui ne se veut pas moins qu'une nouvelle définition du capitalisme. Il y a le capitalisme, l'impérialisme, et il est censé y avoir un nouveau stade, caractérisé par une fusion entre les monopoles et l’État.
Il y a là une double remise en cause de l’idéologie communiste : dans l'affirmation de l’indépendance de l’État par rapport aux classes d’un côté, dans l'affirmation de la fusion entre cette entité « indépendante » et une classe de l’autre.
En 1963, Eugen Varga publia les Essais sur l’économie politique du capitalisme. Il y développe certaines questions du capitalisme monopoliste d’État, et notamment le fait que selon lui celui-ci soit un prolongement de l'impérialisme.
Il y aurait le capitalisme, l'impérialisme, puis le capitalisme monopoliste d’État :
« La transition finale au capitalisme monopoliste d’État commença seulement durant la Première Guerre mondiale (…).
Les Essais sur l’économie politique du capitalisme forment un ouvrage important, car il s'agissait d'une puissante contribution à l’idéologie révisionniste ayant alors triomphé en URSS. Eugen Varga agit ici comme l’un des passeurs, comme l’une des figures historiques contribuant à accorder la légitimité satisfaisante à la nouvelle idéologie.
Dans les Essais sur l’économie politique du capitalisme, Eugen Varga rétablit bien entendu également ouvertement par ailleurs sa théorie comme quoi l’État en pleine guerre est capable de « planifier », même s’il précise que ce n’est pas dans un sens soviétique. Il la généralise en affirmant que l’Inde a également un plan désormais où l’État est capable d’avoir un réel effet sur l’économie :
Dans les Essais sur l’économie politique du capitalisme, Eugen Varga affirme de manière ouverte son soutien au parlementarisme. C'est là tout à fait conforme, dans sa substance même, à la démarche de Nikita Khrouchtchev, mais c'est surtout la conclusion logique du capitalisme monopoliste d’État.
Eugen Varga formule également dans les Essais sur l’économie politique du capitalisme une thèse absolument essentielle au révisionnisme de Khrouchtchev. Il remet ouvertement en cause la thèse selon laquelle les luttes de libération nationale auraient besoin d'être dirigées par la classe ouvrière guidée par son Parti Communiste. Cette thèse serait « contraire aux faits ».
Eugen Varga fut porté aux nues par le révisionnisme, et cela dès qu'il y eut la marge de manœuvre pour le faire. Il reçut l'ordre de Lénine dès 1954, à l'occasion de ses 75 ans. Il reçut également ce qui s'appelait encore le prix Staline, ce qui est très ironique dans la mesure où célébrer Eugen Varga un an après la mort de Staline, c'était ouvertement attaquer ce dernier.
Le dossier sur Eugen Varga publié par Les matérialistes est une contribution à la fois significative et majeure au mouvement communiste internationale.
Eugen Varga est une figure importante du Mouvement Communiste International, en tant qu'économiste extrêmement actif et prolifique. Basculant à droite, il devint le théoricien de la ligne qui sera celle de Nikita Khrouchtchev.
Eugen Varga est né le 6 novembre 1879 à Nagytétény, une petite ville à une trentaine de kilomètres de Budapest, la capitale de la Hongrie, dans ce qui était alors l'Autriche-Hongrie. Son père était instituteur, il perdit sa mère très jeune en raison de la tuberculose.
Eugen Varga est historiquement lié à une philosophie de type moderniste, tout à fait représentative du milieu des jeunes intellectuels artistes hongrois et tchèques du début du siècle. L'opposition à l'Autriche combinait une orientation favorable au socialisme, mais aussi une dynamique portée, en connaissance de cause ou non, par la bourgeoisie nationale.
Lors de la révolution, les communistes de Hongrie furent immédiatement pris à la gorge. La production industrielle était tombée à 5 % de celle d'avant-guerre, les troupes tchèques et roumaines occupaient les charbonnages. En refusant le traité de Versailles, le nouveau régime était de facto en guerre, avec une opposition armée supervisée et épaulée par l'impérialisme français.
Eugen Varga écrivit également au sujet de la révolution hongroise L'organisation économique de la république hongroise des conseils, ainsi que La question agraire dans la révolution prolétarienne hongroise. Il le fit cependant en Russie, où il dût émigrer.
L'Institut qu'Eugen Varga rejoignit existait depuis peu de temps ; il était le fruit d'une intense activité intellectuelle, notamment autour de Theodore Rothstein.
Eugen Varga écrivit en 1921 des études particulières comme La situation économique de l'Europe continentale et La situation politique et sociale de l'empire britannique, mais surtout il réalisa en quatre semaines, en mai, une petite brochure d'une soixantaine de pages intitulée La crise de l'économie mondiale capitaliste.
La crise de l'économie mondiale capitaliste fut une œuvre ayant un vrai retentissement, de par son lien avec le congrès de l'Internationale Communiste en 1921. Le point de vue d'Eugen Varga tournait dans cette période autour d'un axe très précis : le décrochage complet des pays d'Europe centrale, c'est-à-dire notamment l'Allemagne, l'Autriche, la Hongrie, la Pologne.
Eugen Varga, après avoir donc dressé une vue d'ensemble de la situation dans La crise de l'économie mondiale capitaliste en 1921, conclut cet ouvrage sur la thèse suivante. Les sociaux-démocrates ont selon lui tort de penser que le capitalisme est en train de redémarrer ; ils sont aveuglés par le démarrage de 1918-1921 qui ne s'appuie que sur les espaces ouverts par la fin de la guerre.
Dans La période du déclin du capitalisme, Eugen Varga visa à faire le portrait général du schéma caractérisant la crise capitaliste en cours. Son objectif était d'autant plus complexe que, comme il le reconnaît lui-même alors, le capitalisme ne se redresse pas, malgré une amélioration certaine de l’économie des États-Unis, de l'Angleterre, du Japon et de la France.
Eugen Varga synthétise concrètement sa conception en s'appuyant sur le principe du déséquilibre.
Auparavant, de par la hausse de la productivité et la croissance du marché mondial, les déséquilibres existant de par la nature chaotique de la production capitaliste finissaient immanquablement par se résorber d'une manière ou d'une autre.
Eugen Varga aborde la France dans La période du déclin du capitalisme en expliquant sa situation assez paradoxale. Voici ce qu'il en dit, annonçant de manière tout à fait juste, en 1922, l'effondrement de 1940.
« Les rapports économiques de la France sont plus avantageux que ceux de l'Angleterre dans la mesure où elle dispose d'une plus grande base agricole, et qu'elle peut s'auto-approvisionner en denrées lors d'une récolte normale.
En mai 1924, Eugen Varga reprit le cours de son analyse dans Montée ou déclin du capitalisme. C'était là un tournant pour lui, car sa méthode touchait ici sa limite. Eugen Varga était obligé de constater que la situation est très complexe, trop complexe ; il ne parvenait plus à en faire une description générale en s'appuyant sur des statistiques, comme auparavant.
Il était obligé de reconnaître qu'il était dépassé :
Les trois brochures eurent des réceptions qu'il faut prendre en compte, sans les surestimer. Si La crise de l'économie mondiale capitaliste fut largement lu, il n'en fut cependant nullement question lors du troisième congrès, Eugen Varga lui-même n'intervenant pas.
Eugen Varga fut beaucoup plus présent lors du cinquième congrès. C'est lui qui fit le long exposé sur La situation économique mondiale, où il exposa la ligne de l'Internationale Communiste selon laquelle on est bien dans le déclin du capitalisme, mais que ce déclin a des cycles et que les gauchistes ont tort de voir les choses de manière unilatérale et de croire à un effondrement capitaliste à très court terme.
Il dut pour cela faire face à une critique de Radek :
Une fois lancée dans les années 1920 dans ses analyses, Eugen Varga ne s'arrêta plus et s'orienta toujours davantage vers deux questions : la crise d'un côté, les monopoles de l'autre. Il va affiner toujours plus ses positions.
Eugen Varga avait déjà connu plusieurs critiques. Le 25 octobre 1924 la Pravda publia notamment un article de Vladimir Milioutine, le directeur de l'institut agraire de l'Académie communiste à Moscou, « Le révisionnisme agraire ». Il s'agissait d'une critique en règle de l'ouvrage publié par Eugen Varga, Contributions à la question agraire, contenant des articles et conférences réalisés en Russie, ainsi qu'un chapitre de son ouvrage de 1919, au sujet de la répartition des terres en Hongrie et de la réforme nécessaire.
Le problème dans la démarche d’Eugen Varga, c’est que sa conception ramène immanquablement à celle de Rosa Luxembourg. Cette dernière, reprenant Le capital, dit que Karl Marx n’a pas résolu le problème du démarrage de l’accumulation capitaliste. Elle théorise qu’un tel démarrage ne peut avoir lieu que par l’intégration de zones non capitalistes dans le processus.
Voici comment Eugen Varga expose sa thèse sur le chômage organique, en 1928.
« Le chômage en masse chronique au cours de la période d'après-guerre est un fait bien connu.
Nous étions disposés à ne le considérer que comme la conséquence des troubles profonds apportés dans l'équilibre de l'économie mondiale (industrialisation des pays d'outre-mer, appauvrissement de l'Europe, crise agraire).
Certes, tous ces facteurs constituent des causes partielles du chômage.
Une fois qu'il a évacué l'aspect de l'accumulation capitaliste non monopoliste, Eugen Varga limite toute la perspective au capital monopoliste. Le mode de production capitaliste ne consiste alors plus en l'accumulation du capital, mais en un système monopoliste parasitaire.
Là où Karl Marx est dialectique, Eugen Varga est mécanique. Il ne comprend pas le mouvement contradictoire du capital, en « ligne-spirale » comme le dit Karl Marx.
L’origine du problème d'Eugen Varga est qu’il a une lecture purement spatiale de la production, et qu’il oublie le temps. Il perd donc le principe du saut qualitatif, car l'espace en contradiction avec lui-même produit le temps, comme expression du mouvement.
La critique qu'a subi Eugen Varga au sixième congrès de l'Internationale Communiste va se prolonger et va connaître un moment décisif lors de la Xe session du Comité Exécutif de l'Internationale Communiste, du 3 au 19 juillet 1929.
En 1938, Eugen Varga publia Deux systèmes : économie socialiste et économie capitaliste. Et à ce titre, on y trouve une sorte de rectification, d'autocritique par rapport aux critiques faites lors du VIe Congrès et au XIe plénum de l'Internationale Communiste.
Eugen Varga, à partir de sa mise à l'écart relative dans les années 1930, se pliait malgré tout aux exigences du Parti.
Essayons de résumer, dès le départ, la démarche de Hegel, qui est difficile à saisir de par son haut niveau de problématisation. Cela est nécessaire pour comprendre son approche, qui consiste à affirmer que le fini s'auto-transforme, et par conséquent porte en lui la notion d'infini.
Hegel se situe dans le prolongement d'Emmanuel Kant ; son mérite historique, avec cette notion d'infini qu'il apporte, est d'affirmer l'espace, là où Emmanuel Kant avait déjà affirmé le temps.
La grande référence mise en avant par Hegel dans La science de la logique est la lettre dite « sur l'infini », écrite par Spinoza à Louis Meyer, le 20 avril 1663. Hegel fait de nombreuses références à Spinoza et son objectif est clairement d'approfondir le système de celui-ci, de lui fournir ce qu'il considère être comme manquant. Hegel se place en disciple et en continuateur de Spinoza.
Voici ce que dit Spinoza dans la lettre, au sujet de l'infini, dans un document d'une densité exceptionnelle
La lettre de Spinoza est extrêmement intelligente et représente l'un des plus hauts points de la conscience matérialiste humaine, à l'époque déjà cela va de soi, mais y compris aujourd'hui. Elle pose la nature infinie de la réalité, qu'une approche en termes finis ne peut pas saisir.
La connaissance est donc un processus, mais quelle est la nature de ce processus dans son fondement même ?
Lénine a su retrouver dans La science de la logique le noyau matérialiste présentant le caractère dialectique du mouvement ; il a bataillé pour retrouver les éléments adéquats. Voici comment, dans ses notes, il exprime notamment sa joie lorsqu'il est en mesure de le faire :
L'approche de Hegel préfigure le matérialisme dialectique. Il dit ainsi, de manière juste :
On comprend la situation dans laquelle se sont retrouvées Karl Marx et Friedrich Engels. D'un côté, Hegel rejetait de manière adéquate les mathématiques comme forme figée, de l'autre Hegel basculait dans une logique des choses autonome des choses elles-mêmes.
Au-delà de la critique des mathématiques pour sa nature formaliste - objectiviste et de la physique moderne pour ses conceptions idéalistes la bloquant dans son développement, Lénine puise également la dialectique de la nature dans Hegel, avec Hegel et contre Hegel.
Hegel, en ne faisant pas de la matière la base du processus dialectique, est obligé de basculer dans une série d'erreurs idéalistes, qui justement feront que Karl Marx dira de cela qu'il s'agit de tout remettre sur ses pieds.
Hegel repart donc de là où il était arrivé, par impossibilité de se rapporter à la matière en tant que telle ; il passe des centaines de pages à formuler une sorte de subjectivisme affirmant saisir les modalités dialectiques de l'existence. Les errements dans La science de la logique rendent son étude fastidieuse, malgré les éléments essentiels qu'on y trouve.
Le mysticisme a besoin d'un Dieu et chez Hegel, cela va être l'infini. Il devait immanquablement en arriver là, pour compenser l'absence de matière. Ce qu'est la matière pour le matérialisme dialectique consiste en l'infini pour la logique dialectique hégélienne, là est la différence entre le matérialisme marxiste et l'idéalisme hégélien.
On voit aisément dans quel terrible imbroglio se retrouve Hegel. Pour lui, de manière juste, une chose, prise en elle-même, est en effet la négation du fait d'être en rapport avec autre chose, et inversement dans son rapport avec autre chose, la chose est alors négation d'être simplement elle-même, les choses extérieures faisant intervenir un rapport de négation de la négation.
Concernant les mathématiques elles-mêmes, Ernst Kolman et Sonia Yanovskaya ont publié un long article au sujet de ce thème, dans la revue philosophique du PCUS(b), Sous la bannière du marxisme, en 1931.
Il ne suffit pas de prendre conscience de la réalité sociale, il faut également faire le choix de ne pas céder à la corruption, faire le choix de participer à la transformation du monde, se positionner de manière adéquate dans le rapport entre révolution et contre-révolution.
Ouvriers,
C'est un fait très remarquable que la misère des masses travailleuses n'a pas diminué de 1848 à 1864, et pourtant cette période défie toute comparaison pour le développement de l'industrie et l'extension du commerce. En 1850, un organe modéré de la bourgeoisie anglaise, très bien informé d'ordinaire, prédisait que si l'exportation et l'importation de l'Angleterre s'élevaient de 50 %, le paupérisme tomberait à zéro.
[Rédigés par Karl Marx.]
Considérant :
Le Parti Socialiste SFIO ne s'est pas unifié en faisant un saut qualitatif. Ce n'est pas un parti de type social-démocrate ; il n'a pas d'orientation déterminée.
Le Parti Socialiste SFIO est né sur un certain terrain, où il se renforce, mais il ne parvient pas à capitaliser sa présence ; il ne parvient à faire un saut qualitatif jusqu'à une présence historique dans l'histoire du pays.
Sa vie et sa mort sont un exemple qu’aucun combattant pour la liberté ne pourra oublier.
Le chant révolutionnaire « L'Internationale », hymne communiste international, date de la fin du 19e siècle, à l'époque où fut fondée l'Association Internationale des Travailleurs (A.I.T.), rassemblement des premières forces révolutionnaires mondiales.
Une fois dans la Ligue des justes, Marx et Engels ont une influence considérable en supprimant les conceptions petites-bourgeoises.
Prolétaires de tous les pays unissez-vous !
Article 1. - Le but de la Ligue est le renversement de la bourgeoisie, la domination du prolétariat, l'abolition de la vieille société bourgeoise, fondée sur les antagonismes de classe, et l'instauration d'une société nouvelle, sans classes et sans propriété privée.
L'événement qui amena la fondation de l'Association Internationale des Travailleurs fut la rencontre entre d'un côté l'activité de Karl Marx épaulé par Friedrich Engels, de l'autre le développement du mouvement ouvrier anglais et français, qui tissèrent des liens.
Avant l'Association Internationale des Travailleurs, les travailleurs avancés culturellement dans la cause ouvrière étaient dispersés et sur le plan idéologique, leurs conceptions était instables, oscillantes, partant tendanciellement soit dans le réformisme, soit dans le radicalisme.
L'opposition entre Tolain et Marx reflète dans l'A.I.T. toute une approche quant à la question révolutionnaire. Il y a d'un côté la tendance voyant les choses de manière historique, recherchant par conséquent à élaborer un savoir scientifique. De l'autre, il y a les gens qui sont ouvriéristes, s'intéressent aux revendications immédiates, tendent au pragmatisme, nient l'importance de la théorie ni de la question précise de la prise du pouvoir.
Le structuraliste se prétendant marxiste le plus connu est Louis Althusser.
Le structuralisme s'est d'autant plus développé qu'il profitait des intellectuels bourgeois faisant carrière et à qui on donnait du prestige s'ils fournissaient une conception à la fois utile pour les connaissances, mais surtout sans encadrement historique, matériel. C'est en ce sens qu'il faut comprendre l'appui unilatéral de Claude Lévi-Strauss à Georges Dumézil.
Dans Le Cru et le Cuit, Clause Lévi-Strauss affirme :
« Nous ne prétendons pas montrer comment les hommes pensent dans les mythes, mais comment les mythes se pensent dans les hommes, et à leur insu. »
C'est ensuite l'école dite de Prague qui prolongea la lecture de Ferdinand de Saussure, avec notamment Roman Jakobson et Nicolas Troubetskoï, par une série de travaux entre 1929 et 1939, dans le pays de l'est européen le plus développé sur le plan du capitalisme.
La notion d'ensemble n'est pas la seule idée associée au concept de « structure ». Il y a également l'idée d'une forme d'évolution particulière. Tout comme une langue connaîtrait une évolution linéaire, la « structure » connaît une évolution du même type.
L'idée est la suivante : la langue évolue jusqu'à ce que des différences très marquées soient visibles à l'échelle des siècles, alors qu'en même temps chaque génération comprenait pourtant la précédente. Il en irait de même pour la structure.
Le terme de structure tel qu'il est employé par le structuralisme s'appuie sur une conception formulée par Ferdinand de Saussure dans son Cours de linguistique générale, en 1916, publié à partir de notes de ses élèves.
Le précis d'histoire du Parti Communiste d'Union Soviétique (bolchévik) est le document le plus important produit par l'Union Soviétique de la période socialiste.
La Russie tsariste était entrée plus tard que les autres pays dans la voie du développement capitaliste. Jusqu’aux années 60 du siècle dernier, il n’y avait en Russie que très peu de fabriques et d’usines.
À la fin du XIXe siècle avait éclaté en Europe une crise industrielle, qui s’étendit bientôt à la Russie.
Dans les années de crise de 1900 à 1903, près de 3.000 entreprises grandes et petites fermèrent leurs portes.
On jeta à la rue plus de 100.000 ouvriers. Les salaires des ouvriers restés dans les entreprises étaient en forte baisse.
Dès la fin du XIXe siècle, les États impérialistes avaient engagé une lutte intense pour la domination de l’océan Pacifique et le partage de la Chine. La Russie tsariste, elle aussi, participait à cette lutte.
La IIe Douma d’État avait été dissoute par le gouvernement tsariste le 3 juin 1907.
À la suite du XIVe congrès, le Parti déploya la lutte pour l’application de l’orientation générale du pouvoir soviétique vers l’industrialisation socialiste du pays.
Quels sont les enseignements essentiels à tirer de l’œuvre historique accomplie par le Parti bolchévik ?
De 1931 à 1940 exista en URSS un Institut pan-union de statistiques picturales de la construction et de l'économie soviétiques, connu sous le nom d'Izostat. Cet organisme d’État avait comme but d'informer les masses soviétiques du développement du pays, au moyen d'images particulièrement travaillées.
Au début 1940, l'Izostat se transforma en Gosplanizdat, c'est-à-dire la maison d'édition d'État pour l'information économique, de planification et statistique du Comité de planification d'état de l'URSS, qui imprimait des livres, des manuels, des brochures, des rapports et d'autres documents sur des sujets économiques et statistiques.
Fils d'un important économiste autrichien, Otto Neurath avait étudié les mathématiques, les sciences naturelles et la philosophie à Vienne, avant de partir faire ses études à Berlin, sur les conseils de l'important sociologue allemand Ferdinand Tönnies. Il obtint ses diplômes pour des études sur l'histoire économique de l'antiquité, l'ouvrage de Cicéron De Officiis, ainsi que sur l'économie non-monétaire en Égypte.
Le moment-clef qui fit qu'Otto Neurath fut réellement en mesure d'avancer et d'intéresser l'Union Soviétique alors en construction fut l'ouverture par celui-ci à Vienne d'un musée de la société et de l'économie, où il monta des équipes formant des pictogrammes.
Otto Neurath appela le système d'images qu'il avait mis en place ISOTYPE, acronyme d'International System of Typographic Picture Education (Système International d'Education par l'Image Typographique) ; le graphiste Gerd Arntz joua un rôle important.
Otto Neurath voyait l'ISOTYPE comme contribution à l'unification de l'humanité, par l'intermédiaire d'un langage universel ; que sa ligne de réduction de l'information à une image ait pu si plaire à des gens liés historiquement au futurisme en dit long sur la nature subjectiviste de la quête d'un tel langage. En arrière-plan, on trouve le Cercle de Vienne.
Pierre Drieu La Rochelle représente l'obsession de la décadence telle que ressentie par un petit-bourgeois intellectuel, qui fut également un bourgeois rentier : deux aspects de sa vie privée que Pierre Drieu La Rochelle ne fut jamais en mesure de concevoir correctement.
Pierre Drieu La Rochelle dénonce Balzac et la raison sociale, mais son seul réel roman, Rêveuse bourgeoisie, se situe entièrement dans cette tradition. Il dénonce le raffinement pittoresque, mais c'est précisément le point faible de sa très grande nouvelle Le feu follet, qui décrit un dandy héroïnomane se précipitant dans le suicide.
Friedrich Engels avait noté que Balzac, un romantique, un réactionnaire, décrivait la réalité tellement méticuleusement, tellement fidèlement, qu'il bascule dans le réalisme.
On a la même chose avec Rêveuse bourgeoisie, publié en 1937, véritable expression de la contradiction au cœur de la quête d'un « socialisme fasciste » par Pierre Drieu La Rochelle.
Pourquoi Le feu follet, publié en 1931, n'a-t-il pas été considéré en France comme relevant fondamentalement de l'approche soulevée par le matérialisme dialectique ?
Si Pierre Drieu La Rochelle avait lu Karl Marx, Friedrich Engels, Karl Kautsky, les auteurs principaux de la social-démocratie, ou encore Lénine et Staline, il aurait bien vu qu'il était parlé de différentes classes, de différenciation à l'intérieur de celles-ci, même si le moteur d'un mode de production dépend d'une opposition dialectique entre deux classes.
Pierre Drieu La Rochelle est un disciple de Georges Sorel et il tente comme lui, désespérement, de maintenir la fiction de la permanence de l'individu à travers les changements sociaux. L'individu n'est pas ici naturel, et donc une composante d'un mode de production, mais une existence autonome existant de manière relative seulement dans une société donnée.
Le point de vue de Pierre Drieu La Rochelle allait dans le sens de l'unification des classes sociales, pour le maintien, la stabilité de l'ensemble social, permettant au petit-bourgeois de maintenir sa condition sociale.
Pierre Drieu La Rochelle bascule d'autant plus aisément dans l'agressivité du mythe mobilisateur de Georges Sorel que, philosophiquement, il est lui-même également un disciple de Nietzsche. Tout comme chez Sorel, on retrouve la quête de la transcendance par le « surhomme » formulée par Nietzsche.
Ce qui est le plus fou, c'est que Pierre Drieu La Rochelle ne départira jamais de cette posture romantique de type symboliste, surréaliste, décadentiste.
On est donc, avec le jeune Pierre Drieu La Rochelle, au croisement du symbolisme, du décadentisme (et donc surréaliste) et du futurisme.
La quête romantique de la fusion ultime passe nécessairement, chez Pierre Drieu La Rochelle comme tous les romantiques, par la question du corps.
Une preuve du romantisme fasciste de Pierre Drieu La Rochelle est son refus de la guerre. La petite-bourgeoisie a en effet besoin de stabilité, pas d'une guerre où elle serait inévitablement affaiblie, manipulée. Mais c'est également l'expression d'une volonté de dépassement.
Dans l'immédiate après-guerre, avant de devenir un théoricien d'un prétendu Socialisme fasciste, Pierre Drieu La Rochelle se fait le grand partisan de la formation d'un bloc continental européen.
L'essai Le jeune européen est une tentative de formulation romantique d'un dépassement de sa situation personnelle historique pour aboutir, à travers l'ultra-subjectivisme, à la production d'un idéalisme « pur ».
Comment Pierre Drieu La Rochelle, avec son romantisme, caractérise-t-il la société? Dans Le jeune européen, Pierre Drieu La Rochelle exprime en fait une panique petite-bourgeoise devant le monde moderne, qui se résume pour lui en deux aspects : le machinisme d'un côté, l'égalitarisme de l'autre.
La preuve que Pierre Drieu La Rochelle est un romantique, c'est qu'il n'appuie pas sa critique sur une conception raciste ou nationaliste, mais en fait le besoin de l'humanité dans son essence même.
Pierre Drieu La Rochelle formule une définition du fascisme sur le plan des idées qui sera la même pour laquelle, cinquante ans après, l'historien israélien Zeev Sternhell sera décrié par les universitaires français.
Le 6 février était un coup de force de forces d'extrême-droite, seulement Pierre Drieu La Rochelle, et avec lui la mouvance de La Lutte des Jeunes, entend expliquer l'échec de celui-ci par le manque de dimension « socialiste ».
« Le prolétariat, est-ce que je le connais ? Je ne connais pas les ouvriers, pas plus que les paysans. Mais y a-t-il là quelque chose de spécifique à connaître ? Je ne le saurai jamais. Est-ce qu'il y a des classes ? Je ne le crois pas. Pourquoi est-ce que je le crois pas ? Parce que je suis un petit bourgeois. Je tiens à toutes les classes et à aucune. Je les déteste et les apprécie toutes. »
L'antisémitisme de Pierre Drieu La Rochelle n'est au départ qu'un préjugé de petit-bourgeois et de bourgeois, pour se transformer de plus en plus en paranoïa exterminatrice
L'antisémitisme était d'autant plus nécessaire à la démagogie de Pierre Drieu La Rochelle, à sa fantasmagorie, qu'il savait pertinemment que sa vision du monde ne tenait pas debout. Il était à la fois rattrapé par la petite-bourgeoisie – converger, oui, mais sans la fusion – et par son romantisme.
Il est fascinant de voir que cette fuite en avant de Pierre Drieu La Rochelle avait été en partie devinée et annoncée dans un article de l'Humanité de janvier 1923, dans un article intitulé « Jeunes hommes d'aujourd'hui ».
Initialement, Pierre Drieu La Rochelle fréquente en effet un milieu intellectuel bourgeois et son grand ami est Louis Aragon. Les soirées et la fréquentation des prostituées accompagnent une posture rebelle d'esprit grand bourgeois au-dessus des normes.
Gilles, très long roman, très largement autobiographique, décrit les aventures décadentes, nihilistes, opportunistes d'une figure tourmentée finalement plus vide qu'autre chose, malgré des tentatives expressionnistes à prétention existentialistes.
Il est évident que dans le roman Aurélien de Louis Aragon, le personnage éponyme est Pierre Drieu La Rochelle.
La carrière politique de Pierre Drieu La Rochelle après 1934 s'avéra un fiasco complet.
D'un côté, on a un État capitaliste devenu impérialiste et cherchant à agrandir son territoire dans la zone méditerranéenne, s'appuyant sur l'implantation historique d'une vaste population, avec aussi une conception du maintien de l'ordre extrêmement pragmatique et calculatrice.
De l'autre, on a une petite-bourgeoisie urbanisée prenant la tête de masses paysannes entièrement dominées par le féodalisme, afin de former un nouvel État pour pouvoir se transformer en bourgeoisie bureaucratique.
Les trois départements français d'Algérie – Alger, Constantine, Oran - furent fondés dès 1848, alors qu'un processus de colonisation s'organisait, au moyen d'une population européenne encouragée par la France à s'installer.
Le fondamentalisme a adopté une partie des revendications communistes et de manière générale le discours anti-colonial, qu'auparavant il était absolument impossible de formuler, en raison de sa base religieuse.
Le contexte de la seconde guerre mondiale modifia entièrement la situation en Algérie et la figure clef fut alors Ferhat Abbas.
Le fondamentalisme obtient son marqueur historique en 1945.
Le Front de Libération Nationale (FLN) avait commee seul dénominateur commun le mot d'ordre « allumer la mèche ».
L'État a historiquement été débordé par la militarisation à outrance de la guerre d'Algérie.
Il est ainsi possible de résumer la démarche de Georges Sorel par cet extrait des Réflexions sur la violence :
Chez Georges Sorel, la classe ouvrière transporterait l’Esprit de la révolution. C’est un vecteur, un outil. La classe ouvrière ne fait que porter l’idée.
Georges Sorel met en avant le mythe, c'est-à-dire une image nette permettant de transcender les combattants et d'unifier les efforts individuels.
Il est nécessaire, pour Georges Sorel, de procéder à l'héroïsation de l'individu pour qu'il soit prêt à la bataille. Il ne faut pas des cadres se sacrifiant pour le Parti, mais des individus affrontant la réalité pour eux-mêmes, dans le syndicat.
Georges Sorel, dans ses écrits, ne cesse de dénoncer Friedrich Engels et Karl Kautsky, les deux successeurs de Karl Marx, reconnus tels par la social-démocratie internationale. Il se pose en opposition complète au principe de rationalité et de conscience mis en avant par la social-démocratie, qui veut une classe ouvrière organisée, avec un parti d’avant-garde.
Chez Georges Sorel, la bourgeoisie est une classe non pas qui exploite comme chez Karl Marx, avec la question du taux de profit, etc., mais simplement une classe qui, en quelque sorte, règne. La bourgeoisie, devenue abrutie à force de domination, laisserait donc la place aux gestionnaires.
A la critique de la corruption s'associe un anarchisme petit-bourgeois viscéral, typique du proudhonisme.
Georges Sorel reste un auteur marginal ; il n’a été qu’un outil historique de l’affirmation de la « révolution fasciste » comme thèse politique. Mais il exprime également un véritable travers français, mêlant incompréhension du marxisme, l'éloge de la spontanéité et du coup de force par le mépris de l’intellect, la fascination pour l’union des contraires.
Il y a cinquante ans était constitué le Parti Communiste Marxiste-Léniniste de France (PCMLF), lors d'un congrès dans les Bouches-du-Rhône à Puyricard.
Malgré l'apparence de radicalité, SHAC n'était rien d'autre qu'un mouvement moraliste agressif entièrement réformiste, totalement dénué de proposition révolutionnaire.
L'ALF était né comme rupture révolutionnaire, en-dehors du consensus dominant et de l'encadrement des syndicats et du parti travailliste. Cependant, étant une forme de lutte de classes, liée à la contradictions villes-campagnes, il fallait inéluctablement qu'il y ait un conflit avec ce consensus et cet encadrement.
Sans cela, il y aurait un mur. Ce mur, Ronnie Lee ne l'a pas vu ou n'a pas voulu le voir, espérant que la question animale reste parallèle à la société. Ce fut le rôle historique de Barry Horne de tenter de faire sauter le verrou...
Lorsque Arkangel apparut, Ronnie Lee comptait donc établir une ligne multi-directionnelle, dont l'ALF serait une composante. Ce positionnement ne fut pas accepté par le noyau dur des activistes les plus impliqués dans le mouvement.
Dans un article pour Arkangel, Libération animale, mais pas trop ?, Ronnie Lee expose son point de vue, visant à amener une radicalisation de l'ensemble du mouvement pour les animaux, par l'intermédiaire de la charge morale posée par l'ALF. Sa ligne se fonde sur le principe d'un repli de l'humanité, une ligne très marquée par les théories élaborées alors aux Etats-Unis dans la mouvance d'Earth First!, avec une utopie décentralisatrice.
Ronnie Lee ne dérogera plus à cette ligne, prônant une sorte d'évolutionnisme allant dans le sens d'un vaste recul à une forme relativement primitive de société...
Toute la seconde moitié des années 1980 est marqué par l'alternance de sabotages de base (serrures remplies de colles, dégradations aux bombes de peinture, bris de vitrines, etc.) et actions plus marquantes sur le plan technique (incendies, actions de l'ARM, etc.).
L'ALF britannique vivait par et pour l'offensive, les succès grisant son positionnement et ne permettant pas un recul théorique, rendu impossible de toutes façons par l'absence de concepts idéologiques et culturels suffisamment développés. C'était là la grandeur morale de l'ALF britannique que d'en arriver jusque-là, mais également une faiblesse terrible.
En 1983, l'ALF mena notamment une quarantaine d'actions et provoqua des centaines de milliers d'euros aux laboratoires Mimms dans le Hertfordshire, plus d'un million d'euros de dégâts au Park Davis Laboratorium de Cambridge. Elle libéra 15 chiens de l'université de Cambridge, dont on s'aperçut qu'ils avaient été issus de vols dans les rues. 5 600 animaux furent libérés cette année-là.
L'ALF britannique commença également à véritablement essaimer sur le plan international, avec notamment cinq raids menés par les défenseurs autonomes des animaux en Allemagne, ou encore les 1,4 million d'euros causé dans une attaque contre un laboratoire à Utrecht aux Pays-Bas. Une militante alla également aux Etats-Unis pour former des activistes et la première action fut la libération de 24 chats à la Howard University de Washington, dont certains étaient déjà estropiés...
Les années 1980 sont celles d'une montée en puissance générale de l'ALF britannique. Il n'y eut pas tant des actions qui firent boule de neige qu'une crise très profonde dans la société britannique, l'ALF cristallisant la dimension révolutionnaire de par sa charge morale.
L'exigence morale individuelle était le coeur de l'initiative portée par l'ALF. La libération d'animaux se présentait ainsi comme la plus haute forme d'antagonisme, car exprimant la plus haute forme de moralité possible.
Un porte-parole de l'ALF expliqua, au tout début des années 1980 que :
« Personne n'irait loin dans l'ALF à moins d'être végétarien ou végan. Les membres de l'ALF agissent comme la conscience de la nation – nos objectifs de base sont de sauver des animaux et de causer autant d'embarras que possible, notamment financiers, aux gens impliqués dans l'exploitation animale, jusqu'à ce que la loi prenne le relais. »...
L'ALF se posait initialement comme affirmation morale. Lors d'une intervention clandestine dans un laboratoire, une importante somme d'argent fut trouvée, mais elle ne fut pas emportée. Les billets furent déchirés, afin de souligner la supériorité morale de l'action.
La bataille du chien marron marqua la fin d'un positionnement antagoniste en Angleterre. Il faudra attendre les années 1960 et 1970 pour voir apparaître une contestation réelle et générale de la vie quotidienne. L'aspect le plus connu culturellement consiste en le foisonnement des mouvements de jeunesse (notamment rockers, mods, skinheads et bien sûr punks), cependant l'aspect le plus authentiquement relié aux luttes de classe fut l'émergence de l'ALF, du Front de Libération Animale.
Les mouvements de jeunesse se plaçaient en marge ou en parallèle des luttes de classe, restant dans l'esprit étroit de la reconnaissance sociale de classe au sein de la société capitaliste. C'est pourquoi le mouvement skinhead, initialement liée à la classe ouvrière et au rocksteady, au reggae, bascula en mouvement identitaire raciste de type plébéien...
C'est en Grande-Bretagne que se fondit la première association moderne de protection des animaux, la Society for the Prevention of Cruelty to Animals (SPCA) en juin 1824. La SPCA s'engage sur le terrain des conditions des animaux dans les fermes et la production, mais mena également campagne contre la vivisection, ainsi que les sports impliquant la violence jusqu'au sang et la peine de mort.
L'Animal Liberation Front est un mouvement de masse qui a émergé en Angleterre dans les années 1970. Il s'agit du produit de la lutte des classes, dans les conditions propres à ce pays alors.
L'antagonisme y était particulièrement asséché : le mouvement ouvrier avait basculé dans le réformisme ouvert des syndicats, les trade-unions, ainsi que du parti travailliste, le Labour Party ; à aucun moment les communistes n'ont su développer une ligne de masses, en raison de leur incompréhension fondamentale tant de la réalité de leur pays que du matérialisme dialectique...
Zénon d'Élée est un philosophe grec ayant vécu de 490 à 430 avant Jésus-Christ, qui est fameux pour la formulation de différents « paradoxes » au sujet de l'espace et du temps.
Ces paradoxes, très connus notamment dans les mathématiques, ont été prétextes à des remarques très régulières, le plus souvent erronées car perdant de vue ou ne connaissant pas l'arrière-plan de la démarche de Zénon.
Le collectif ne se pose pas comme organisme dirigeant, mais comme noyau agent
Notre problème n'est pas de concurrencer les syndicats, partis, partis, groupes, pour « diriger les masses », mais d'exercer une action dialectique qui contribue à la croissance politique des masses, au développement de l'autonomie, à la transformation de luttes sociales spécifiques et sectorielles en lutte sociale généralisée.
Nous nous positionnons donc comme un outil théorico-pratique au sein du mouvement général du prolétariat qui - bien que sous des formes embryonnaires et encore très limitées - tend à une transformation globale de la société...
Le mouvement des masses en Europe et en Italie a atteint un tournant décisif. Son développement spontané et impétueux a été arrêté par la manœuvre en tenaille de répression policière et de répression syndicale-partidaire. Ce qui s'est passé en France, en Allemagne et en Italie, à différents moments et de différentes manières, n'est pas un « cas défavorable », mais est le résultat de la logique même de la lutte des classes.
Il est nécessaire de comprendre clairement les termes du problème..
Les syndicats et les partis ont proclamé que c'est le moment des luttes sociales. Les poussées du mouvement de masse et la nécessité pour les organisations révisionnistes de passer à une étape supplémentaire de montée au pouvoir coïncident.
La plus grande erreur qu'il serait possible de faire ici est de penser que la Réforme a triomphé, que la guerre des paysans n'a été qu'un épisode sans importance. Bien au contraire, cette guerre a révélé l'insuffisante maturité de l'affirmation de la nation allemande par Martin Luther.
Dans les faits, le pays est resté religieusement divisé. Les protestants de type luthérien n'ont jamais formé qu'une courte majorité par rapport aux catholiques.
Voici ce que cela donne pour l'année 1555. Les zones catholiques sont en bleu, en bleu clair lorsqu'il s'agit d'une simple majorité. Les luthériens sont en rose, en rose clair lorsqu'il s'agit d'une simple majorité. En jaune clair, on trouve les partisans de Calvin et de Zwingli, c'est-à-dire la Réforme protestante, en jaune foncé les restes de la révolte hussite et taborite...
Marx écrit dans Les luttes de classe en France de 1848 à 1850 : « A l'exception de quelques chapitres, chaque section importante des annales de la révolution de 1848 à 1849 porte le titre de : « « Défaite de la révolution ! »
Mais dans ces défaites, ce ne fut pas la révolution qui succomba. Ce furent les traditionnels appendices pré-révolutionnaires, résultats des rapports sociaux qui ne s'étaient pas encore aiguisés jusqu'à devenir des contradictions de classes violentes : personnes, illusions, idées, projets dont le parti révolutionnaire n'était pas dégagé avant la révolution de Février et dont il ne pouvait être affranchi par la victoire de Février, mais seulement par une suite de défaites...
La fin des luttes contractuelles, la crise du mouvement étudiant, le déchaînement de la répression ont provoqué le relâchement, la confusion, la fuite en avant ou le retrait. C'est la conséquence du refus de regarder en face la réalité, d'échapper à la fois à la stérilité d'un activisme de plus en plus contradictoire avec les objectifs qu'on se propose, et à la sclérose idéologique qui persiste à chercher (dans le passé ou dans des situations très différentes des nôtres) des schémas d'action que nous devons dériver de la réalité qui se trouve sous notre nez.
La discussion qui s'est développée au sein du Collectif politique métropolitain, qui est résumée ici dans ses lignes essentielles, avait comme thème central le problème de l'organisation dans la métropole...
Le choix d'opposition aux paysans amenait une conséquence fondamentale dans la théologie de Martin Luther : elle fermait la possibilité d'aller vers le Saint-Esprit, de l'écouter et de l'exprimer.
C'était la ligne de Thomas Müntzer, qui y voyait un moyen pour le peuple, l'homme du commun, d'enfin s'exprimer et d'aller vers la démocratie.
Il y a donc un déplacement historique de la position de Martin Luther, d'une opposition à l’Église catholique au nom d'une libre expression en se fondant sur l'Evangile, à un piétisme intériorisé reconnaissant une vie intérieure, mais pas d'expression extérieure...
Martin Luther avait été heureux du compromis de la « Ligue souabe » représentant la haute noblesse avec les armées paysannes dites du Lac et de l’Allgäu. Mais c'était une exception et il se voyait dans l'obligation de prendre parti pour l'un des deux camps.
Son option principalement nationale lui fit prendre le parti des Princes électeurs, alors qu'il aurait préféré rester à l'écart, considérant que son positionnement religieux allait révolutionner de l'intérieur une Allemagne nouvelle...
Le problème historique du positionnement de Martin Luther, c'est que la paysannerie était déjà en mouvement et qu'avec une figure comme Thomas Müntzer capable de synthétiser ses exigences historiques, même à travers la théologie, le mouvement prenait une tournure insurrectionnelle.
L'une des prémisses les plus connues fut, dans le Wurtemberg en 1514, le soulèvement de l'Arme Konrad, le « pauvre Konrad », organisation clandestine de défense des simples gens, avait déjà été écrasé par le sang, 1700 paysans se faisant torturer et assassiner, Reinhard Gaisser émergenant comme figure révolutionnaire au cours de ce processus.
On avait affaire là à une tendance historique, une révolte anti-féodale qui ne pouvait pas temporiser avec les calculs de Martin Luther d'une réforme traversant les institutions...
La majorité de la population, toutefois, reste à l'écart des villes. En quoi consiste, à l'époque, la paysannerie ? Voici ce que nous en dit Friedrich Engels :
« Au-dessous de toutes ces classes, à l'exception de la dernière, se trouvait la grande masse exploitée de la nation : les paysans.
C'est sur eux que pesait toute la structure des couches sociales: princes, fonctionnaires, nobles, curés, patriciens et bourgeois. »...
Où Thomas Müntzer trouvait-il une telle force pour oser affirmer un tel universalisme ? Cela tient aux contradictions sociales dans les pays allemands d'alors.
Martin Luther l'avait bien compris ; il avait écrit une Lettre aux princes de Saxe sur l'esprit de rébellions ; à ses yeux, il fallait totalement isoler Thomas Müntzer, qui risquait pour lui de ruiner la Réforme en scindant les forces qui y sont favorables.
A l'opposé, Thomas Müntzer représentait justement des forces voyant comme inacceptables leur situation, où leur propre contestation se voyait happée par les Princes électeurs...
Après avoir dû fuir Allstedt, Thomas Müntzer finit par s'installer à Mühlhausen en Oberfranken. Cette ville avait 7 000 habitants et qui plus est 19 villages y étant rattachés ; son importance était alors plus grande que Dresde ou Leipzig.
A Mülhausen, l'ancien moine Henri Pfeiffer avait organisé un soulèvement populaire...
On peut se demander pourquoi Thomas Müntzer osa faire un sermon aux princes électeurs. La raison est toute simple : c'est un universaliste, qui prend la religion comme le vecteur moral de tout un chacun.
Etant véritablement démocrate, il ne cesse de vouloir s'appuyer sur « l'homme commun », mais cela signifiait également prêcher pour que les puissants eux-mêmes capitulent...
En 1961, Maurice Thorez publiait un ouvrage intitulé « La paupérisation des travailleurs français », la couverture se voyant barré d'une inscription où on lisait : « une tragique réalité ». Cet ouvrage est à la fois le produit du révisionnisme d'après 1945 et la base théorique pour toute la réflexion révisionniste dans la seconde partie du 20e siècle.
20. Briser l'anneau-Italie de la chaîne impérialiste !
Assumer la position du non-alignement !
Pratiquer la collaboration de tous les peuples sur une base paritaire !
Développer l'internationalisme prolétarien !
19. Frapper au centre !
Encercler les encercleurs !
Il faut affronter le processus de militarisation de l'usine, du territoire et de toute la vie sociale, les reliant aux restructurations anti-prolétariennes de l'économie et de l’État, également afin de démonter l'image perverse diffusée par la propagande du régime qui attribue au « terrorisme » la fonction de cause.
17. Désarticuler et détruire les appareils du contrôle social total !
Dans la phase de transition, désarticuler et saboter le processus d'intégration dans un système cohérent, totalitaire et totalisant de contrôle entre la direction technico-politique de l'Exécutif et le système afférent différencié des réseaux spéciaux, exige une ligne de mouvement articulé sur quatre points essentiels.
On ne serait sous-estimer la quête existentielle de Martin Luther, mésestimer l'enjeu humain que sa démarche représente. Il ne s'agit pas de quelqu'un réfutant simplement une quête d'argent de la part d'une Eglise bureaucratisée et peuplée d'opportunistes ; il s'agit de vivre en tant qu'humain et pour cela d'acquérir un fondement solide à sa propre existence.
Envoyé à Rome à la fin de 1510, Martin Luther n'y resta que moins d'un mois ; de manière significative, cela ne déclencha pas de révolte contre l’Église romaine et sa corruption, comme on aurait pu s'y attendre en suivant une interprétation erronée...
Martin Luther est né le 10 novembre 1483 en Saxe, à Eisleben, dans une famille de paysans, qu'il décrivit de manière suivante :
« Je suis un fils de paysan ; mon arrière-grand-père, mon grand-père, mon père étaient d'authentiques paysans. »
En fait, le père tenta de s'élever socialement en devenant mineur, à Mansfeld, avant de devenir bourgeois, ce qu'était déjà sa mère par sa famille. Le père devint même magistrat de Mansfeld...
La stratégie anti-prolétarienne condensée dans le « Plan Triennal » est élaboré et dirigé en des espaces bien précis et se transmet à travers une chaîne articulée qui pénètre l'usine et investit chaque aspect de la vie des prolétaires.
Ces espaces, véritables réseaux nerveux du pouvoir exécutif, doivent devenir des objectifs privilégiés de l'initiative révolutionnaire.
En attaquant leurs dirigeants, en balayant la mini-patrouille des « cerveaux » qui mettent au point la ligne anti-ouvrière, décourageant avec dureté les collaborateurs qui se camouflent dans les universités de la péninsule, il est possible d'amplifier au maximum les contradictions internes du front bourgeois et de mettre en échec un des instruments les plus délicats de la domination impérialiste...
Eyn deutsch Theologia assume donc une forme très poussée de panthéisme ; tout être humain porte une dignité fondamentale. On lit, dans une approche qui est précisément celle de « maître » Eckhart :
« Quand on dit que quelque chose est ou se produit contre Dieu, l’afflige et le peine, on doit savoir qu’aucune créature, en tant qu’elle est, vit, a savoir, force, capacité et autres choses semblables, ne l’afflige ou le peine ; rien de tout cela n’est contre Dieu.
Que l’esprit malin ou l’homme soit, vive et autres choses semblables, tout cela est bien et est de Dieu, car tout cela est Dieu par son essence et son origine...
La répression du Vatican mit de côté la perspective développée par « maître » Eckhart sur un plan général, mais il existait dans les pays allemands des gens considérant que cette perspective était la bonne.
La voie mystique ouverte par Eckhart fut en mesure de temporairement se maintenir en Allemagne, correspondant tant aux mentalités des pays allemands qu’aux intérêts de nombreuses forces sociales.
Une perspective plus intimiste accompagnait inévitablement le développement des villes, alors que l’Église était en même temps romaine et présentait une nature toujours étrangère avec l'émergence du sentiment national...
Le 7 novembre 2017, nous célébrons les cent ans de la révolution d'Octobre qui, en 1917, a conduit la Russie au socialisme, à travers une insurrection armée suivie d'une guerre civile entre les armées rouge et blanche. Nous disons que ce chemin est encore valide aujourd'hui ; dans chaque pays capitaliste, un soulèvement révolutionnaire doit être dirigé par le parti révolutionnaire d'avant-garde, mobilisant les masses afin qu'elles prennent le pouvoir en détruisant l'ancien État d'une manière nécessairement violente.
L'insurrection, c'est-à-dire la prise du pouvoir central, est la tâche révolutionnaire des vrais communistes ; le but n'est pas de réformer ou d'améliorer le capitalisme, mais de le renverser. L’ancien État ne peut pas être modifié, il doit être détruit et remplacé par le pouvoir des soviets, l’État socialiste...
Le monde a radicalement changé dans sa forme depuis la révolution d'Octobre 1917, mais il n'a pas changé de nature. Il est vrai que depuis cent ans, les forces productives se sont considérablement agrandies, faisant que la rupture révolutionnaire exige une dimension subjective prononcée.
Le capitalisme développé corrompt, déforme, fragmente les esprits, abîme les sensibilités, anéantit l'esprit du changement réel, authentique, comme toute affirmation morale.
Il a les moyens d'engloutir les gens dans des errements sans fin, des fétichismes aberrants, des illusions cyniques. Du culte de la petite propriété à la télé-réalité, de l'art contemporain aux modes vestimentaires, le capitalisme sait comment occuper les mentalités, fausser les rêves, assassiner la profondeur des sentiments, la densité de la sensibilité...
Cette nouvelle phase de l'organisation sociale capitaliste tend à réaliser une vieille utopie de la bourgeoisie : la possibilité de planifier le comportement des prolétaires tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'usine, au moment de la production comme dans celui de la consommation et dans toutes les expressions de la vie sociale et des rapports humains.
Dans la phase actuelle de développement, la vieille combinaison de réforme et de répression, composée à l'intérieur de la démocratie formelle bourgeoise, ne suffit plus.
La centralisation du pouvoir nécessaire à la gestion du capitalisme avancé réduit toujours davantage les espaces de pouvoir réel à « concéder » aux cadres dirigeants subordonnés, le dynamisme vertical élimine les couches intermédiaires et le choc de classe tend à se produire sur un mode net et radical entre une bourgeoisie qui a épuisé toute possibilité d'expression sociale globale (c'est-à-dire ne plus plus se présenter comme « porteuse » des idéaux démocratiques, nationaux, de valeurs éthiques ou culturelles) et un prolétariat urbain qui s'étend à la majorité de la population active...
Les maoïstes apparus dans les années 1960 en Europe occidentale et aux États-Unis ont une ligne unanime : les syndicats sont devenus une composante institutionnelle de la neutralisation de la lutte des classes.
Les syndicats ont comme tâche d'être des points d'ancrages du capitalisme au sein du prolétariat ; c'est un outil de corruption et d'amélioration de l'organisation de la production.
Les syndicats accompagnent la déformation, l'abrutissement, l'aliénation des masses dans le cadre d'un capitalisme qui parvient à se développer (avant une future crise générale)...
L’Église catholique réfute de manière ferme « Maître » Eckhart, par la Bulle In agro dominico du pape Jean XXII, daté du 27 mars 1329 qui expliqua en quoi ses thèses étaient erronées ou hérétiques.
Eckhart, quant à lui, mourut avant la publication de la Bulle. Ce que l’Église catholique lui reprochait, c'est de nier tellement la matière que sa spiritualité atteignait un même degré d'universalisme que le matérialisme.
Pour comprendre la démarche de Martin Luther (ainsi que de Thomas Müntzer, autre figure historique de la vague protestante allemande), il faut avoir conscience qu’il existait alors tout un arrière-plan idéologique et culturel propre aux pays allemands.
Tout un courant mystique s’était développé, dont la figure la plus connue est « Maître » Eckhart (1260-1328) ; il est historiquement parlé du « mysticisme rhénan » et Strasbourg en fut l’un de ses centres.
Devenu maître en théologie à l’Université de Paris, alors la plus prestigieuse, Eckhardt développa des thèses extrêmement approfondies, qui lui valurent maille à partir avec l’Inquisition et furent repoussées en partie, tout en ayant malgré tout un impact profond en Allemagne et aux Pays-Bas...
Il y a 500 ans, le 31 octobre 1517, c'est-à-dire la veille de la Toussaint, Martin Luther placardait sur la porte de l'église de Wittenberg une affiche comportant 95 thèses. Contrairement à une opinion largement répandue, Martin Luther ne se contentait pas d'y dénoncer les « indulgences », c'est-à-dire les « pardons » des péchés accordés alors par milliers par l’Église catholique romaine contre rémunération.
Ce qu'il visait avec ses « quatre-vingt-quinze thèses théologiques sur la puissance des indulgences », c'est le fait même que l’Église catholique romaine existe, avec le Pape à sa tête, en tant que force centralisée décidant de ce qui est légal ou non sur le plan religieux et intervenant dans la société pour décider de ce qui est juste ou pas...
Il est frappant de voir que l’histoire de la bataille anti-révisionniste aux États-Unis est strictement parallèle à celle en Allemagne. Comme dans ce dernier pays, on a une organisation étudiante socialiste qui regroupe la contestation, avec par ailleurs le même acronyme : SDS, pour « Students for a Democratic Society », Etudiants pour une société démocratique. Le SDS sert alors de détonateur.
L’origine du SDS est la Intercollegiate Socialist Society, né à l’initiative d’Upton Sinclair en 1905, comme branche étudiante non officielle du Parti Socialiste d’Amérique.
Cette première structure devint en 1921 la League for Industrial Democracy, la Ligue pour la Démocratie Industrielle, avant de se radicaliser et de s’unifier avec les étudiants communistes dans un front dénommé American Student Union, le Syndicat étudiant américain...
L'occupation de Libération par la mouvance autonome, conseilliste, rupturiste, spontanéiste ne produisit donc rien, à part l'éloignement définitif du quotidien qui, de toutes façons, était née de la capitulation de la Gauche Prolétarienne et ne pratiquait qu'une constestation libérale-libertaire.
Le choix était simple : il correspondait à une dénonciation par les gens se voulant alternatifs et non communistes, sans être institutionnels (des gens pareils culturellement mais acceptant une neutralité et un certain rapport avec les institutions).
L'existence de la Fraction Armée Rouge a posé un énorme problème à l'extrême-gauche française. Elle rappelait en effet les thèses qu'elle-même avait formulé ou dont elle était proche au tout début des années 1970, avant finalement de s'insérer dans les institutions.
Les rares secteurs refusant une telle insertion avaient également plongé dans l'anarchisme ou plus exactement le spontanéisme et l'ultra-gauche conseilliste ; pour cette raison, l'idéologie communiste maintenue de la RAF leur semblait quelque chose d'étonnant, de perturbant, voire de franchement dérangeant...
Le positivisme ne devait pas être un outil que pour la bourgeoisie : il devait servir également à mobiliser le prolétariat derrière la bourgeoisie. Il s'agissait impérativement d'encadrer intellectuellement et moralement le prolétariat naissant. Voici un exemple de comment Auguste Comte explique l'importance de parer à la menace communiste, dans son Discours sur l'ensemble du positivisme :
« Pour rendre justice au communisme, on doit surtout y apprécier les nobles sentiments qui le caractérisent, et non les vaines théories qui leur servent d'organes provisoires, dans un milieu où ils ne peuvent encore se formuler autrement. En s'attachant à une telle utopie, nos prolétaires, très peu métaphysiques, sont loin d'accorder à ces doctrines autant d'importance que les lettrés.
Aussitôt qu'ils connaîtront une meilleure expression de leurs vœux légitimes, ils n'hésiteront pas à préférer des notions claires et réelles, susceptibles d'une efficacité paisible et durable, à de vagues et confuses chimères, dont leur instinct sentira bientôt la tendance anarchique. »...
Il est très intéressant de voir comment Auguste Comte voit l'individu. En effet, il accepte tout à fait la séparation du corps et de l'esprit. Reprenant sans le dire l'exemple de « l'homme volant » d'Avicenne, repris pareillement sans le dire par Descartes, Auguste Comte fait une hypothèse fantasmagorique.
Il imagine un être humain sans besoins physiques aucun. À quoi ressemblerait alors cet être humain en quelque sorte pur, c'est-à-dire ici totalement spiritualisé?
La vision d'Auguste Comte, combinant individualisme et socialisation, correspond exactement à l'idéologie nationale-républicaine de la IIIe République, qui s'installera en 1870. A l'époque d'Auguste Comte, la bourgeoisie n'avait pas encore les moyens d'imposer sa vision de la morale et des mœurs ; cela sera le cas après 1870.
Auguste Comte a toujours souligné, comme ici dans le Discours sur l’esprit positif, que le positivisme est une morale, une manière d'appréhender la réalité. C'est une vision du monde, satisfaisant à des exigences.
Auguste Comte souligne bien que l'ancien système ne marche plus, qu'il en faut donc un nouveau…
Le positivisme a comme avantage de combiner le relativisme et le culte de l'expérience. C'est, si l'on veut, la différence entre Honoré de Balzac et Émile Zola. Le réalisme de Honoré de Balzac se veut exhaustif et avec une vision du monde tout à fait déterminée ; Honoré de Balzac émet des avis réguliers, il soupèse les aspects, leur accorde une valeur de manière complète.
Le positivisme est donc l'idéologie de la bourgeoisie qui a littéralement balancé par-dessus bord toute science « fermée », complète, totale. C'est une relecture complète de l'idéologie bourgeoise, une sorte de synthèse expurgée de l'idéologie bourgeoise.
C'était une entreprise de démolition apparaissant comme une construction et présentée telle quelle, ce qui fait réagir Karl Marx de la manière suivante, dans une lettre à Friedrich Engels en juillet 1866 : « Dans mes loisirs j'étudie Comte, parce que les Anglais et les Français font du tapage autour de ce type. Ce qui les marque en cela, c'est l'encyclopédique, la synthèse. Mais c'est pathétique par rapport à Hegel (bien que Comte en tant que mathématicien et physicien de profession soit supérieur à celui-ci, c'est-à-dire supérieur dans le détail, Hegel lui-même étant ici infiniment plus grand dans l'ensemble) »...
Auguste Comte exprime donc un besoin historique, celui d'annoncer une nouvelle mentalité. Il lève le drapeau de la fin de la superstition, ce qui équivaut pour lui à annoncer le triomphe de l'ère industrielle, de la conception terre à terre de l'industriel.
Comme il le dit dans son Discours sur l'esprit positif, les superstitions sont condamnées à graduellement disparaître, cédant la place à l'approche nouvelle : « A mesure que les lois physiques ont été connues, l’empire des volontés surnaturelles s’est trouvé de plus en plus restreint, étant toujours consacré surtout aux phénomènes dont les lois restaient ignorées. »...
Né à Montpellier le 19 janvier 1798, Auguste Comte fut admis à Polytechnique à quinze ans, qu'il ne put rejoindre qu'une année plus tard seulement en raison de son jeune âge. Les élèves s'y révoltèrent contre un professeur et furent expulsés ; Auguste Comte vécut alors de cours de mathématiques à Paris, avant de devenir un proche du réformateur social Saint-Simon de 1817 à 1825.
La révolution française, après avoir initialement triomphé, s'enlisa et connut la forme impériale sous la direction de Napoléon Bonaparte, à quoi se succéda la Restauration.
Face à l'aristocratie revenue, il fallait pour la bourgeoisie relancer sa bataille idéologique et culturelle. Mais tout comme l'aristocratie revenue au pouvoir avait modifié sa nature, la bourgeoisie n'était déjà plus la même.
Elle avait connu de grands progrès, elle avait saisi sa force et, surtout, elle découvrait qu'elle avait donné naissance à une force hostile elle-même grandissante : le prolétariat. Les années 1815-1848 furent ainsi marquées par l'apparition des socialistes utopiques...
C'est le réalité qui détermine la conscience et celle-ci doit saisir le principe de la synthèse pour parvenir à comprendre le mouvement de la matière dans l'espace-temps.
Nous soulignons à ce titre, parce que les communistes ont une vision plus approfondie aujourd'hui qu'auparavant, la signification qu'il y a à reconnaître la dignité de la matière vivante.
Ernesto « Che » Guevara est mort le 9 octobre 1967, exécuté quelques jours après avoir été capturé par l'Armée bolivienne. C'était là l'aboutissement de tout un parcours et de toute une série de choix idéologiques. Ernesto « Che » Guevara est, en effet, argentin ; ayant rejoint Cuba pour y participer avec Fidel Castro à la guérilla, il a par la suite fait de cette « révolution » – en fait un changement de régime seulement – un modèle idéologique.
Il s'agit d'une ligne subjective visant à lancer de l'extérieur un processus révolutionnaire, sans Parti mais avec simplement avec un noyau d'avant-garde ; c'est le principe du « foyer révolutionnaire », le « foco »...
En Allemagne de l'Ouest, l'interdiction du Parti Communiste d'Allemagne, la relance économique sous supervision américaine, l'influence néfaste de l'Allemagne de l'Est ayant basculé dans le révisionnisme et l'apparition d'un Parti Communiste allemand (DKP) pro-soviétique avaient provoqué un effondrement d'un mouvement communiste qui, de toutes manières, avait été pratiquement anéanti par le régime national-socialiste.
Aucune relance ne fut possible avant le développement du SDS – Sozialistischer Deutscher Studentenbund (Union socialiste des étudiants allemands) – qui à la suite de son rapide effondrement laissa la place à une immense vague anti-révisionniste. Le SDS était né en 1946 en étant proche des socialistes, mais il s'en éloigna rapidement, devenant le fer de lance d'une opposition de type gauchiste dans les années 1960...
Pseudo-Denys l'Aréopagite, en niant la dialectique au profit de l'unité suprême tout en reconnaissant la réalité matérielle, n'est pas loin du panthéisme. Cependant, en niant le mouvement, il ne peut pas y aboutir, basculant de ce fait dans une religiosité où c'est Dieu qui met en mouvement.
Ce mouvement est insuffisant, car la vie matérielle est nécessairement « pleine de mutabilité et d'angoisses » ; la hiérarchie permet de donner du sens et de faire en sorte « de nous unir à Dieu autant qu'il est possible »...
Lorsque Jean-Luc Mélenchon a pris l'avion pour aller à La Réunion la semaine dernière, il était en classe affaires. Quant à Mathilde Panot et Danièle Obono, élues au Parlement pour la France Insoumise comme lui, elles étaient dans le même avion, mais en classe économique.
La question de l'âge ne compte pas ici : d'abord parce que par camaraderie quand on est dans le même avion on cherche à être ensemble. Ensuite, parce que Jean-Luc Mélenchon est coutumier du fait puisqu'il déclarait en 2013 ne voyager qu'en classe affaire, lui qui a d'ailleurs un patrimoine d'un million d'euros en ayant quasiment toute sa vie uniquement fait de la politique...
La dimension panthéiste du christianisme représente l'expression de sa base dynamique, correspondant à la modification profonde de la réalité et au besoin de cette modification. Karl Marx a explicité de manière tout à fait claire le double aspect de la religion, qui est à la fois consolation et protestation, en plus d'être, en tant qu'idéologie, un reflet.
Cependant, la dimension dynamique est nécessairement atténuée, freinée, paralysée par la conception du monde qui attribue aux cieux une valeur supérieure à la réalité terrestre...
Le grand souci de l'approche de Pseudo-Denys l'Aréopagite, par rapport à la nature même de la religion, est que le principe d'incarnation utilisée afin de christianiser le néo-platonisme aboutit, de manière inévitable à une divinisation de l'être humain.
D'un côté, cette divinisation est reportée à la fin des temps, à la résurrection...
Pour mieux saisir la démarche de Pseudo-Denys l’Aréopagite, si capitale pour le christianisme, revenons sur les points essentiels. Le premier est que selon lui, il faut une hiérarchie spirituelle sur Terre imitant ce qu'il y a dans les cieux.
De la même manière que depuis Dieu, l'illumination tombe en cascade sur les anges selon leur hiérarchie, l’Église fait ruisseler sur Terre le message divin...
Le problème de l'approche de Pseudo-Denys l’Aréopagite est qu'il est obligé de pratiquer la fuite en avant, afin de maintenir l'équilibre entre un Dieu inaccessible et indéfinissable (comme chez Plotin) et une religiosité mystique (comme chez Proclus). Il est obligé, par conséquent, de renforcer le principe de l'incarnation.
Ainsi, la combinaison de l'esprit initiatique et de la théologie négative aboutit à une démarche insistant grandement sur la symbolique. Il s'agit en effet d'imiter les formes divines...
Par amour pour la vérité et dans le but de la préciser, les thèses suivantes seront soutenues à Wittemberg, sous la présidence du Révérend Père Martin LUTHER, ermite augustin, maître es Arts, docteur et lecteur de la Sainte Théologie. Celui-ci prie ceux qui, étant absents, ne pourraient discuter avec lui, de vouloir bien le faire par lettres. Au nom de notre Seigneur Jésus-Christ. Amen.
- En disant : Faites pénitence, notre Maître et Seigneur Jésus-Christ a voulu que la vie entière des fidèles fût une pénitence.
Le souci de la dimension initiatique est qu'il est nécessaire de la justifier, surtout que le message de Jésus est universel. Comment combiner un message universel avec une démarche hiérarchisée et sélective, non universaliste ?
Pseudo-Denys l’Aréopagite se voit obliger de justifier le clergé en se fondant sur le principe de Proclus : l'illumination ne touche pas tout le monde pareillement, il faut une purification qui est un cheminement avec plusieurs étapes, selon les « forces » spirituelles qu'on est capable de mettre en branle...
Pseudo-Denys l’Aréopagite est donc quelqu'un qui puise dans le néo-platonisme, mais il résout le conflit entre la conception d'un Un divin isolé (comme chez Plotin) et celle d'un monde d'en bas rempli d'entités magiques issus du Un divin (comme chez Proclus).
Il résout cette opposition entre en haut et en bas au moyen de l'incarnation, Jésus étant à la fois Dieu et homme, dans une même unité. Jésus permet donc un « appel d'air », faisant entrevoir comment accéder au divin depuis le monde matériel...
Si le christianisme apporte l'individualité, il est frappant que le protestantisme ne se développe que seize siècles après Jésus. Auparavant, on a le christianisme hiérarchisé, avec un clergé s'opposant aux laïcs.
Il y a deux raisons à cela. La première, matérielle, est que le système esclavagiste ne s'est effondré que par à-coups, que l'individu n'émergera au sens strict que par le capitalisme. Le statut de serf, intermédiaire entre l'esclave et l'individu autonome, va exister pour toute une période historique, celle de la féodalité...
Le Corpus Dionysiacum représente un ensemble de très haut niveau, formant le cœur même de ce que va être le christianisme. Lorsque Martin Luther remettra en cause l’Église catholique romaine au XVIe siècle, il se verra ainsi dans l'obligation de rejeter Pseudo-Denys l'Aréopagite.
Mais pourquoi avoir repris le nom de Denys l'Aréopagite, mentionné par Paul ? En fait, ce choix est d'une importance capitale...
L'histoire des écrits du Pseudo-Denys l'Aréopagite et de qui il est réellement est particulièrement tourmentée. D'ailleurs, l'Église orthodoxe réfute encore l'idée que Denys l'Aréopagite et Pseudo-Denys l'Aréopagite seraient deux personnes différentes ; en France, on a même temporairement également assimilé Denys l'Aréopagite, le Pseudo-Denys l'Aréopagite et Saint-Denis.
Cet aspect problématique est d'autant plus frappant que, dans ses écrits, Pseudo-Denys l'Aréopagite souligne grandement la nécessité de maintenir secret les enseignements les plus importants, voire même le cœur de la doctrine chrétienne...
Augustin, Pseudo-Denys l'Aréopagite et Boèce sont trois penseurs ayant joué un rôle historique capital, dans la mesure où ils ont été ceux qui, aux IVe - Ve - VIe siècles, ont réussi à faire du christianisme une idéologie cohérente et systématique.
Ils ont ici répondu à un besoin historique très particulier, permettant au christianisme de ne pas en rester au niveau d’une conception religieuse parmi d’autres, avec des sectes vivant à l’écart du monde de manière unilatérale...
Nous allons bientôt célébrer les cent ans de la révolution russe, la fameuse insurrection d'Octobre 1917 menée par les bolcheviks, ouvrant la voie à une guerre civile de plusieurs années entre l'Armée rouge et l'Armée blanche.
La révolution russe sera un thème qui sera abordé par de nombreux médias et également par les regroupements révolutionnaires en France, par la gauche en général. Elle sera présentée comme une tentative utopique ayant échoué, d'une manière ou d'une autre...
Augustin, avec son approche conceptuelle du césaro-papisme et du péché comme base de l'expérience réelle de l'Humanité depuis Adam, avec sa conception idéaliste du rapport entre l'Un et le Multiple, détermina pour plusieurs siècles le christianisme. Sa fusion du manichéisme et du néo-platonisme, de l'incarnation et de l'Évangile, l'a véritablement porté par ailleurs, étant à la croisée de toute une production d'une très riche intensité.
C'est la base d'une production extrêmement prolixe historiquement, avec ses polémiques, ses conseils techniques, ses nombreux ouvrages idéologiques.
Il est significatif que le mysticisme d'Augustin puise dans la clef véritable de l'idéalisme religieux, à savoir le culte des nombres. C'est la conséquence obligatoire de la conception idéaliste du rapport entre l'Un et le Multiple.
Puisque Dieu est 1, la réalité qui est multiple s'appuie sur ce 1. Les nombres, invisibles à la matière, aux corps, composeraient l'univers, aussi faut-il se tourner vers le concept de Dieu...
Le souci de l'exigence du combat du bien contre le mal, c'est que chez Augustin, ce qui compte c'est la dimension mystique ; l'idéalisme amène l'anéantissement de la matière au profit du Un divin. À ce niveau, l'œuvre véritablement massive d'Augustin en termes de quantité est parsemée de réflexions sur l'unité divine, en laquelle il faut se fondre.
C'est l'expression du néo-platonisme dans le catholicisme, au moyen d'une rencontre du manichéisme opposant le bien et le mal avec le principe de l'incarnation d'un Dieu absolu...
Pourquoi Augustin maintient-il la figure des démons ? La raison est évidente : dans une société humaine encore largement désorganisée, il faut bien expliquer que des choses mauvaises se produisent, et cela d'autant plus après l'incarnation divine du Christ.
Il s'agit d'un renouvellement du manichéisme, dans le cadre de la logique de l'incarnation, de la reconnaissance d'un Dieu uni-total...
Il n’en reste pas moins que, malgré sa prise de distance avec Platon qui est pourtant largement valorisé, il était nécessaire à Augustin de procéder à la liquidation du néo-platonisme. Il écrit pour ce faire de très nombreux chapitres dans La Cité de Dieu contre les païens, afin de dénoncer la démonologie du néo-platonisme (qu’il assimile par ailleurs au platonisme en tant que tel).
En effet, en l’absence d’incarnation divine d’un Dieu unique isolé, le néo-platonisme a dû concevoir toute une série d’étapes intermédiaires peuplés de dieux et de démons...
Il est évident qu’il était compliqué pour Augustin d’affirmer à ce point la valeur du platonisme, un courant païen, aussi a-t-il dû justifier « comment Platon a pu autant approcher de la doctrine chrétienne » qui est, faut-il le rappeler, une révélation.
Il précise par conséquent à ce sujet : « Parmi ceux qui nous sont unis dans la grâce de Jésus-Christ, quelques-uns s’étonnent d’entendre attribuer à Platon ces idées sur la Divinité, qu’ils trouvent singulièrement conformes à la véritable religion. »...
Là où Augustin tombe véritablement le masque de sa démarche de sa synthèse platonisme - manichéisme - christianisme, c'est avec son éloge de Platon, un païen pourtant. On a ici quelque chose de tout à fait similaire à ce que fit Pseudo-Denys l'Aréopagite, bien que celui-ci ait une approche différente, puisque purement néo-platonicienne à l'initial.
Dans La Cité de Dieu contre les païens, Augustin fait ainsi une présentation approfondie de la philosophie, y compris des pré-socratiques, c’est-à-dire les philosophes comme Pythagore et Thalès, qui devancent Socrate, Platon et Aristote...
On ne saurait sous-estimer l'acharnement complet d'Augustin pour disqualifier la réalité matérielle. Aux yeux de celui-ci, la réalité humaine n'est que péché, le monde n'est lui-même que le lieu du péché.
C'est le véritable fond de la démarche d'Augustin...
Le soutien à participation au régime impérial, le refus des courants populaires (comme le donatisme) et d'une religion rationaliste (comme le pélagianisme l'exigeait), tout cela imposait à Augustin de renforcer toujours plus une vision du monde où l'Humanité a un statut inférieur, relevant de quelque chose de mauvais.
C'était nécessaire, afin d'empêcher justement que prime une perspective rationaliste de la religion. Augustin se tourne de manière violente vers une intériorisation de la religion, dans une démarche résolument anti-rationaliste...
De multiples oppositions sont nées au cours de l'affirmation de cette sorte de césaro-papisme, d'intégration de la religion dans le système de domination impériale restructurée.
Augustin va appuyer de toutes ses forces l'écrasement dans la violence des chrétiens donatistes, expliquant même que face à « la barbare et violente hérésie des Donatistes, toute indulgence pourrait paraître plus cruelle que leur cruauté même ». Ce donatisme était, de fait, l'expression d'une grande radicalité...
Augustin, né en 354, émerge comme figure historique dans la continuité du tournant de Constantin. De fait, à la mort de Théodose, en 395, l'Empire se divisa avec ses fils en Empire romain d'occident et Empire romain d'orient, et cela définitivement contrairement aux apparences alors. Le processus d'effondrement continua, et en 410 les Goths pillèrent Rome.
Augustin, qui avait déjà fait la louange, le panégyrique, de Valentinien II dans les années 380, prit donc l'occasion de la chute de la ville de Rome pour rédiger, de 413 à 427, les 22 livres de La Cité de Dieu contre les païens. On y trouve une conception qui rejoint ce qui sera qualifiée bien plus tard de « césaro-papisme ».
Il faut saisir ici le contexte historique, pour comprendre la portée politique du fanatisme d'Augustin, qui formule en fait une nouvelle idéologie pour un nouveau régime, né des décombres de l'Empire romain.
Augustin est né en 354 et à cette époque, le régime impérial n'en finit pas de s'effondrer. Il est cependant déjà largement christianisé...
La grande actualité pour Augustin, c'est l'effondrement de Rome. Lui-même de culture romaine, pétri de rhétorique et de littérature latine, il a notamment voyagé à Carthage, puis Milan. Et il constate la fin de l'empire, qu'il analyse profondément dans La Cité de Dieu contre les païens, ainsi que dans De la ruine de Rome. Il oppose la puissance de Rome à celle du message du Christ ; l'effondrement de Rome est la preuve de la vanité de ce qui est terrestre...
Augustin est l'une des plus grandes figures du christianisme ; aux côtés d'Ambroise de Milan, Jérôme de Stridon et Grégoire le Grand, il est l'un des quatre Pères de l'Église catholique romaine ; avec Thomas d'Aquin, il forme le binôme suprême de l'idéologie catholique.
Né en 354 et mort en 430 en Algérie actuelle, vivant dans une société prolongeant directement les conquêtes romaines et lui-même étant d'origine berbère, latine et phénicienne, Augustin a suivi les modes intellectuelles propre à la culture romaine d'alors. Il s'est d'abord rapproché des philosophes (c'est-à-dire du platonisme), puis des manichéens, avant d'embrasser le christianisme, dont il est devenu par la suite l'idéologie...
14. La rapidité avec laquelle évolue le processus de crise – restructuration – internationalisation et la résistance offensive et tenace du prolétariat métropolitain oblige la bourgeoisie à lancer dans cette conjoncture une attaque à vaste échelle, à tous les niveaux de vie des masses.
Dans ce contexte, la lutte pour la défense des Intérêts Immédiats devient également toujours plus antagoniste avec les besoins de valorisation du capital et assume de fait toujours plus le caractère d’une confrontation de pouvoir...
L'effondrement du Parti Ouvrier Français était dans sa matrice même : sans base idéologique et culturelle, rien n'était possible. Karl Marx et Friedrich Engels espéraient que le Parti Ouvrier Français soit le début de quelque chose : ses acteurs le voyaient comme une fin en soi.
Or, de par la réalité historique, il fallait bien que le Parti Ouvrier Français aient une stratégie et une tactique. De par les réalités historiques françaises par ailleurs, il fallait se positionner par rapport à la question municipale...
Comment le Parti Ouvrier Français s'effondra-t-il par conséquent si rapidement ? C'est qu'il lui fallait bien, une fois avoir grandi, faire de la politique.
Sur le plan de la combativité, il fut aux premières loges, avec la grève des mineurs du Pas-de-Calais en 1889, la grève de Carmaux en 1892. Le Parti Ouvrier Français organisa même le soutien national à la grande grève des mineurs de Decazeville en 1886, Friedrich Engels se chargeant du soutien international...
Karl Marx et Friedrich Engels plaçaient donc leurs espoirs dans Jules Guesde, Paul Lafargue et le Parti Ouvrier Français. Ils suivaient avec attention le développement de ce qu'ils valorisaient.
Ils furent déçus et même affligés. Les qualités qui permettaient que quelque chose s'élance en France se transformaient immanquablement en leur contraire, en raison d'un pragmatisme dénué de sens politique, d'une ligne de rentre-dedans sans nuances ni contours.
La scission de 1882 avec les possibilistes avait été la première preuve de manque de sens politique. Friedrich Engels, dans une lettre à August Bebel, le 21 juin 1882, constatait ainsi : « À Paris, c'est la scission dans le parti ouvrier. Les gens de L'Égalité - nos meilleurs éléments, Guesde, Deville, Lafargue, etc. - ont été, sans autre forme de procès, mis dehors au dernier congrès. »...
Le Parti Ouvrier Français possédait une vraie dynamique historique. Aline Valette fut la première femme à parvenir à la direction d'une organisation socialiste, en l'occurrence le Parti Ouvrier Français. Elle fonda par la suite un journal qui ne dura pas, L'Harmonie sociale et fut l'organisatrice d'une Fédération nationale des sociétés féministes.
Jules Guesde lui-même prit position en faveur des femmes, alors que le mouvement ouvrier français de l'époque considérait que sa nature consistait à être ménagère. Dans La femme et son droit au travail, publié dans Le Socialiste du 9 octobre 1898, il se positionna clairement : « Assurer à la femme comme à l'homme le développement intégral et la libre application de ses facultés. Assurer d'autre part aux travailleurs sans distinction de sexe, le produit intégral de leur travail. Là est toute la solution – et elle n'est que là. »...
13. Attaque sélective et anéantissement.
Dans cette conjoncture de transition, toute stratégie spécifique de désarticulation implique nécessairement une Logique Sélective dans les attaques, une « main de chirurgien », et cela pour le simple fait que c'est la voie magistrale pour la maximisation des résultats politiques.
Il est facile de comprendre que tous les personnels ou espaces n'ont pas la même importance stratégique pour l’État impérialiste, que toutes les attaques pensables – possibles n'approfondissent et 'étendent pas de la même manière les contradictions internes à l'ennemi...
Le Parti Ouvrier Français connut une certaine montée en puissance sur le plan de l'organisation, grâce à d'un côté un engagement militant en faveur du collectivisme, de l'autre l'ouverture d'une perspective marxiste. Initialement appelé Fédération de parti des travailleurs socialistes en France lors de sa fondation au congrès de Marseille d'octobre 1879, il s'appuyait sur un découpage en six régions : Nord, Est, Centre, Ouest, Midi, Algérie.
En fait, malgré la prétention centraliste, les régions étaient autonomes et en fait cela était même le cas des groupes locaux. Ceux-ci étaient libres de se fédérer ou bien d'être simplement en contact avec la direction. Chaque année, suivant le principe instauré au congrès national de Lille en octobre 1890, le Conseil National était organisé par une différente région...
Le programme possède donc, indéniablement, une perspective marxiste. Ce qui caractérise la ligne de Jules Guesde, c'est la volonté d'aller de l'avant dans le collectivisme, ce qui équivaut à une réfutation directe de l'anarchisme. Dans le Programme agricole du Parti Ouvrier Français, on lit ainsi :
« Le Parti ouvrier, qui, à l'inverse des anarchistes, n'attend pas de la misère étendue et intensifiée la transformation de l'ordre social et ne voit de libération pour le travail et pour la société que dans l'organisation et les efforts combinas des travailleurs des campagnes et des villes s'emparant du gouvernement et faisant la loi, a adopté le programme agricole suivant, destiné à coaliser dans la même lutte contre l'ennemi commun, la féodalité terrienne, tous les éléments de la production agricole, toutes les activités qui, à des titres divers, mettent en valeur le sol national. »...
Jules Guesde et ses partisans furent donc les partisans acharnés du collectivisme, cherchant à le diffuser dans le prolétariat en présentant la révolution comme nécessité absolue. C'est cela qui permit la rencontre avec le marxisme.
Aux congrès socialistes nationaux qui commencèrent à s'organiser, la thèse collectiviste fut initialement refusée, à Paris en 1876 et à Lyon en 1878, avant finalement de triompher à Marseille en 1879. L'objectif socialiste consista alors en l'appropriation collective de tous les instruments de travail et de toutes les forces de production...
Puisque la bourgeoisie avait failli et que le collectivisme apparaissait comme nécessaire, alors il n'est, en quelque sorte, nul besoin de tactique ou de stratégie.
Jules Guesde va être celui qui va amener la naissance du Parti Ouvrier Français, historiquement la première organisation qui, en France, se revendique de Karl Marx et revendique « l'expropriation politique et économique de la classe capitaliste et la socialisation des moyens de production »...
Que signifie le collectivisme mis en avant par Jules Guesde, à la toute fin des années 1870 ? Voici comment il le définit, dans Collectivisme et Révolution, datant de 1879 :
« C’est la socialisation , ou encore, dans l’état actuel de l’Europe, la nationalisation du capital immobilier et mobilier, depuis le sol jusqu’à la machine, mis désormais directement à la disposition des groupes producteurs.
Plus de capitalistes, plus de patrons achetant et trouvant à acheter pour un morceau de pain la force de travail de millions d’hommes réduits au rôle de machines, produisant tout et manquant de tout : ou mieux, un seul patron, un seul capitaliste : Tout le monde ! mais tout le monde travaillant, obligé de travailler et maître de la totalité des valeurs sorties de ses mains...
La Commune de Paris fut, en 1871, le moment du grand tournant dans l'histoire de France ; elle marqua la naissance du mouvement ouvrier révolutionnaire en toute indépendance. Pour la première fois, la classe ouvrière s’était élancée de manière seule, sans se soumettre ou s’allier à la bourgeoisie dans une lutte anti-féodale.
Cependant, la classe ouvrière était embryonnaire, alliée à la plèbe ; l’échec de la Commune de Paris provoqua ainsi un cataclysme politique. 1871 fut une année d’une grande importance pour l’histoire du mouvement ouvrier à l’échelle mondiale ; le prix à payer en France fut toutefois un recul significatif, à tous les niveaux...
Dans la Résolution de la direction stratégique des Brigades Rouges de février 1978, il est déclaré que :
« Le principe tactique de la guérilla dans cette conjoncture est la désarticulation des forces de l'ennemi.
Désarticuler les forces de l'ennemi signifie porter une attaque dont l'objectif principal est encore celui de mener la propagande pour la lutte armée et sa nécessité, mais avec le principe tactique de la phase suivante commençant déjà – la destruction des forces de l'ennemi...
Proclus (412-185), connu en France sous le nom de Proclos, termine historiquement le cycle du néo-platonisme. Surnommé « le Diadoque » (c'est-à-dire en grec le successeur) dans le cadre de sa direction de l'école néo-platonicienne d'Athènes, il vient à l'origine d'une riche famille de Xanthe, en actuelle Turquie. Il définit sa tradition ainsi :
« Pythagore le premier avait appris d'Algaophamos les initiations relatives aux dieux, Platon a ensuite reçu des écrits pythagoriciens et orphiques la science toute parfaite qui les concerne. »
Il est le point culminant du néo-platonisme, aboutissant lui-même fort logiquement à une célébration de la magie, de rites mystiques...
Ce qui est frappant dans l'approche de Jamblique, c'est qu'il s'agit de sauver son âme. C'est tout à fait la même approche que celle du christianisme et en cela, c'est une rupture avec l'extase individuelle de Plotin qui, naturellement, se rapproche bien plus des expériences des premiers chrétiens, des ermites.
Ce qui est fascinant, c'est que se révèle ici l'importance capitale pour le christianisme de la trinité, avec le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Car ce que dit Jamblique au sujet du Démiurge, c'est que celui-ci façonne la réalité, en reprenant les éléments donnés par le Père...
8.Les organismes révolutionnaires de masse, parce qu'ils sont la manifestation du pouvoir prolétarien, expriment une légalité en tant que tel, qui se place directement face à la « légalité démocratique ».
Dans un tel état de choses, la « défense de la légalité bourgeoise » vient à être définitivement exclu de la perspective du prolétariat métropolitain...
Contrairement à Plotin dont le néo-platonisme se cantonnait dans l'absolu, Jamblique reconnaît le particulier. Il ne s'adresse pas seulement aux plus sages qui ont déjà une connexion au divin, mais à tout un chacun.
Ce qui fait l'intérêt de la position de Jamblique, c'est alors bien entendu que chaque individu, ayant une âme, doit mener sa propre quête de Dieu.
Son âme a une nature définie, une valeur de très grande importance : elle est le « moyen terme » entre l'éternel et le non-éternel, le raisonnable et le non-raisonnable, ce qui est statique et ce qui est en mouvement, entre le non-généré et le généré, bref entre Dieu et la matière...
Si Plotin penche unilatéralement pour l'esprit se séparant du corps et d'un monde « inférieur », la formation divine de ce dernier fait que Jamblique considère qu'en découvrir les secrets permet de retrouver le divin.
Jamblique a une approche plus chrétienne, comme on peut le voir, car Plotin affirmait que l'âme individuelle conservait toujours un lien inébranlable avec l'Un, dont elle était issue ; au sens strict, l'âme ne s'alliait selon Plotin jamais vraiment au corps...
Jamblique est le premier à véritablement faire du néo-platonisme une magie philosophique. Plotin, lui, revendiquait une philosophie qui, parce qu'elle était idéaliste, avait une dimension magique.
Cependant, Plotin faisait pencher sa construction intellectuelle vers l'Un, coupant court à toute activité autre que la fusion extatique vers l'un. Son modèle est celui du yogi indien, pas du mage perse.
Jamblique inverse la tendance et cela d'autant plus qu'il doit faire face à la concurrence du christianisme. Cependant, il y a l'arrière-plan toute une polémique sur la nature du monde matériel...
Tous les néo-platoniciens, après Plotin, basculèrent dans un mysticisme païen outrancier, auquel Plotin était lié mais en tentant d'en synthétiser une forme nouvelle. Rien de cela à sa suite, où le culte des dieux et la magie seront des vecteurs essentiels de la sagesse mystique.
Qu'est-ce qui distingue alors le néo-platonisme du christianisme ? Eh bien, l'origine grecque, et sans doute l'origine hindoue, c'est-à-dire dans les deux cas, une conception socio-cosmique du monde, où l'ordre social est le produit de la réalité divine et où la réincarnation est la clef de voûte de l'équilibre.
Le néo-platonisme est la conception la plus développée du paganisme antique ; il n'est plus païen au sens strict, car il a unifié l'Univers et ne s'attarde plus sur les éléments naturels, tel que le soleil, la lune, les arbres, etc. Cependant, il existe comme dans le paganisme un ordre interne à l'Univers, ce que Charles Baudelaire a célébré dans ses poèmes des Fleurs du Mal avec le principe des « correspondances ». Ce qui correspond se répond, ayant une sympathie naturelle...
Il va de soi que le néo-platonisme ressemble outrageusement au christianisme apparu juste avant lui ; en fait, les deux courants se sont nourris l'un l'autre. On ne peut nullement comprendre le christianisme, surtout le catholicisme, sans connaître Plotin et ses thèses qui forment le squelette même du mysticisme anti-matérialiste, où il s'agit de se tourner uniquement vers ce qui n'est pas matière.
Voici ce que dit Plotin par exemple sur le rapport entre l'Un, l'intelligence et l'âme (ici désigné par l'intellect) – on croirait lire une explication du rapport entre « le Père, le Fils et le Saint-Esprit » :
« L'Intelligence est belle sans doute; elle est la plus belle des choses, puisqu'elle est éclairée d'une pure lumière, qu'elle brille d'un pur éclat, qu'elle contient les êtres intelligibles, dont notre monde, malgré sa beauté, n'est qu'une ombre et qu'une image...»
Plotin appelle à l'extase dans la compréhension de la nature de Dieu ; pour parvenir à cette extase, il faut que l'âme cesse de se mêler au corps. Il y a donc une bataille et le néo-platonisme de Plotin fournit les arguments théoriques les plus « purs » de chaque religion : il y a une séparation entre le corps et l'esprit, il y a une bataille entre eux.
La religion est le levier pour comprendre comment se focaliser sur l'âme et parvenir à rejeter un corps à dévaloriser...
Ce qui caractérise la position de Plotin, c'est qu'il fournit une théorie religieuse présentée de manière philosophique.
C'est là exactement le même schéma que celui fournit par Platon dans l'allégorie de la caverne : le monde matériel n'est qu'un pâle reflet d'un monde idéal, qui lui-même a comme source le « Un » absolu, source de tout et seule réalité authentique.
L'idée de Plotin était simple, mais géniale. Puisque Aristote niait le monde « d'en haut », la seule réponse possible était d'accepter cela, mais en niant pour autant le monde d'en bas. Ne reste alors qu'un seul monde, qui n'est plus matériel et qu'il reste alors à définir.
Né en 205 à Lycopolis, ville d'Egypte sous contrôle romain, Plotin étudia à Alexandrie avant de devenir, à Rome, la principale figure du courant néo-platonicien émergeant alors.
Le terme de néo-platonicien fut conçu au XIXe siècle, Plotin et les néo-platoniciens se considérant simplement comme platoniciens ; cependant, leur méthode apportait une perspective uniquement mystique exigeant une identification précise.
Le néo-platonisme liquide, en effet, toutes les réflexions platoniciennes, pour n'en conserver que l'idéalisme tourné, non pas dans un sens politique comme avec la République de Platon, modèle de société de castes, mais dans un sens mystique...
Les néoplatoniciens n'ont jamais fait que redire ce que Platon avait dit (dans le Timée, entre autres). On sait peu de choses sur les platoniciens suivant l'effondrement d'Athènes, mais il est certain que les néoplatoniciens ne sont ici nullement originaux et n'ont jamais prétendu modifier ou renouveler Platon.
Ce qui justifie d'une certaine manière le terme, c'est qu'ils intègrent dans leur philosophie ce qu'ils pensent être la philosophie d'Aristote, pourtant opposée à celle de Platon. Il ya là un moment complexe, éminemment dialectique...
Le principe du dualisme est que le monde matériel est insuffisant et qu'il faut se tourner vers le spirituel. L'âme des individus, c'est en fait une petite étincelle de l'âme du monde, du Dieu vivant. La matière est un degré inférieur de réalité, la seule réalité authentique étant le monde spirituel.
L'âme est donc ce qui compte réellement et il s'agit d'abandonner les préoccupations matérielles. Plus on est un corps, moins on est une âme. Ce qui fait dire à Timée, dans l'œuvre éponyme de Platon : « A cause de tous ces accidents, aujourd'hui et depuis les premiers temps, l'âme commence par être sans intelligence, quand elle vient d'être unie à un corps mortel ...»
Le « Timée » n'aurait pas eu l'effet idéologique qu'il a eu s'il ne consistait qu'en un simple dualisme opposant le matériel et l'immatériel. On y trouve une « explication » particulièrement développée des niveaux d'interaction entre l'immatériel et le spirituel.
Cette explication est la seule qui « tienne debout » sur le plan intellectuel, à défaut d'être juste ; elle sera reprise par toutes les religions. Le néo-platonisme consiste précisément en l'approfondissement de cette explication...
Le « Timée » est l'œuvre de Platon dont le succès fut le plus retentissant après l'effondrement d'Athènes ; durant l'obscur Moyen-Âge européen, il sera l'unique œuvre connue réellement qui soit issue de l'antiquité gréco-romaine, et son influence sera énorme.
La raison en est que c'est une œuvre profondément mystique. Normalement, Platon œuvre à régénérer Athènes, et ce sur une base élitiste au possible ; son mysticisme est secondaire, visant à justifier l'élitisme. La disparition de cet élitisme, dû à l'effondrement du mode de production esclavagiste, a amené la récupération de son idéalisme...
Lorsque Platon et Aristote firent irruption sur la scène de l'Histoire, la cité-État d'Athènes était déjà profondément affaiblie. Sa concurrence avec Sparte avait épuisé les deux protagonistes, permettant à la Macédoine de finalement prendre le dessus. L'échec d'Alexandre le Grand à établir un empire macédonien dans la durée permit alors à Rome de former son propre empire, qui finit par vaciller sous son propre poids, ses propres contradictions.
On est là dans le contexte de l'effondrement du mode de production esclavagiste. Étaient remis en cause des décennies, des siècles, voire un, deux, trois millénaires de traditions, de psychologie, de mentalités...
L'échec du calvinisme est l'expression de l'échec du sud de la France à former une nation, malgré certains éléments constitutifs présents. Théodore Agrippa d'Aubigné lui-même vient de Pons, dans la région de Saintonge dans le Sud-Ouest de la France.
Friedrich Engels le constate bien, en comparant la situation du Sud de la France à celle de la Pologne au XVIIIe siècle. La Pologne a réussi à se maintenir en tant que nation par la dimension anti-féodale de son action, là où la France du Sud, de par le maintien complet du féodalisme, n'a pas pu se développer...
Le projet étant en échec, la perspective bloquée, Les Tragiques ne pouvaient exprimer le calvinisme français que par un ton chaotique, un fil décousu, une approche à la fois satirique et tragique, dans une impression de confusion générale. Il s'agit d'une fuite en avant, propre par ailleurs à la faiblesse idéologique du calvinisme naissant.
Martin Luther, une fois qu'il aura soutenu la noblesse contre les paysans révoltés, se précipitera pareillement dans une fuite en avant dans une sorte d'anticapitalisme romantique avant l'heure, adoptant un ton forcené appelant au massacre des sorcières et des juifs, afin de trouver une « direction » à indiquer, une perspective communautaire donnant du sens en apparence...
Cette limitation historique du calvinisme en France qui s'exprime dans Les Tragiques se lit également dans la forme du recueil. L’œuvre est divisée en sept parties, appelées livres, avec chacune un titre : Misères, Princes, La chambre dorée, Les feux, Les fers, Vengeances, Jugement.
On peut y voir, dans sa structure, un parallèle avec les sept sceaux de l'Apocalypse de Jean ; on retrouve, pareillement, des descriptions de choses monstrueuses, avant que les justes soient sauvés. Misères décrit la terrible situation d'alors, alors que Théodore Agrippa d'Aubigné se présente comme un nouveau Hannibal partant en guerre contre Rome...
En tant que recueil poétique, Les Tragiques reflètent à la fois une démarche de rupture avec le féodalisme porté par le calvinisme, mais également l'échec du calvinisme français de par la base de sa direction largement soumise à des fractions aristocratiques.
C'est une œuvre significative de tout un processus historique ayant eu une importance capitale en France, puisque conditionnant les modalités de l'affirmation de la monarchie absolue...
Les Tragiques sont ainsi une œuvre exprimant une défaite, et c'est cela qui fait son intérêt, Théodore Agrippa d'Aubigné étant une figure historique d'une grande importance pour la France du XVIe siècle.
Il fut, en effet, un des principaux activistes de la cause protestante en France, tant sur le plan militaire que sur le plan intellectuel.
C'est en ce sens qu'ont une valeur historique les écrits de Théodore Agrippa d'Aubigné synthétisant cet épisode historique que furent les guerres de religion : Les Tragiques, écrits en vers et publiés en 1616), l'Histoire Universelle, publiés dans la période 1616-1620, en prose et d'une approche plus formelle...
Nous sommes en 1616 lorsque Les Tragiques sont publiées, alors que Henri IV s'est fait assassiné en 1610, malgré qu'il ait abjuré le protestantisme en 1593. Son auteur, Théodore Agrippa d'Aubigné, figure du protestantisme et historiquement très proche de Henri IV, ne peut plus alors faire qu'un constat désabusé : « ce siècle n’est rien qu’une histoire tragique ».
Son parti, celui du calvinisme qui s'est lancé dans une grande offensive anti-cléricale, n'a pas réussi sa percée, alors que son chef même, son proche ami qu'il a toujours valorisé comme le chef des protestants, a capitulé pour devenir Roi. L’Édit de Nantes qu'il a formulé est d'ailleurs terriblement bancal et un piège se refermant sur les calvinistes...
Mao Zedong constate également une chose qui peut surprendre. En parlant des aspects de la contradiction, il en souligne l'unité. On pourrait se dire qu'il vaudrait mieux noter leur affrontement. Seulement, ce serait là aboutir au caractère indépendant, isolé d'un aspect de la contradiction – ce qui est impossible.
Mao Zedong explique cela dans un passage important : « L'identité, l'unité, la coïncidence, l'interpénétration, l'imprégnation réciproque, l'interdépendance (ou bien le conditionnement mutuel), la liaison réciproque ou la coopération mutuelle – tous ces termes ont la même signification et se rapportent aux deux points suivants : premièrement, chacun des deux aspects d'une contradiction dans le processus de développement d'une chose ou d'un phénomène présuppose l'existence de l'autre aspect qui est son contraire, tous deux coexistant dans l'unité »...
Connaître le mouvement, c'est connaître la matière. Connaître un mouvement en particulier, c'est connaître un phénomène en particulier. S'il y a des choses différentes, c'est parce que leur mouvement est différent.
Voici ce qu'explique Mao Zedong, dans un passage très important : « Toute forme de mouvement contient en soi ses propres contradictions spécifiques, lesquelles constituent cette essence spécifique qui différencie une chose des autres. C'est cela qui est la cause interne ou si l'on veut la base de la diversité infinie des choses dans le monde. »...
Michel de Montaigne se donna comme devise et comme symbole une balance avec écrit « Que sais-je ? », question formée par Pyrrhon, le théoricien du scepticisme, qui appelle à tout remetre en cause. Toutefois, rien de baroque chez Montaigne ; il ne s'agit pas de nier la vérité. Il s'agit de reconnaître qu'elle est mouvante, qu'elle est de nature politique. Il faut savoir gérer et pour cela il faut savoir évaluer. La philosophie de Michel de Montaigne, s'il fallait la résumer, consiste en une apologie de l'évaluation.
Les situations changeant toutes – Michel de Montaigne ne peut pas comprendre le matérialisme dialectique encore, historiquement – il ne donne pas un manuel, par conséquent, mais des pistes, des exemples, afin de s'inspirer, d'être capable de soupeser, d'évaluer...
Dans sa défense de Raymond Sebond, Michel de Montaigne ne parle donc pratiquement pas de Raymond Sebond. Il y parle toutefois extrêmement longuement des animaux. Raymond Sebond considérait que la religion et la Nature disaient la même chose ; quand on lit Michel de Montaigne, on a bien plutôt l'impression que l'être humain est un animal comme les autres, tout à fait dans la tradition du matérialisme. La manière avec laquelle il aborde la question des animaux est clairement athée.
Il a une réelle compassion pour les animaux, qu'on ne trouve que dans l'athéisme, qui célèbre la vie en général...
Le passage le plus connu des Essais touche, paradoxalement, la religion. Michel de Montaigne y prend la défense de Ramon Sibiuda (vers 1385 - 1436), un théologien catalan, dans un chapitre très long, bien plus long que les autres. Il semble dédié également à Marguerite de Valois, fille de Henri II et de Catherine de Médicis, femme d’Henri de Navarre, le futur Henri IV.
Ce qui est très paradoxal, c'est que Michel de Montaigne raconte un nombre incroyable de choses dans ce chapitre, mais en tout cas pas de Raymond Sebon. Il raconte avoir traduit une œuvre de Raymond Sebond à la demande de son père, qui s'y intéressait. C'est peut-être une couverture : Raymond Sebond considère en fait, dans la logique de la Renaissance, que la religion et la nature disent la même chose, que donc les sciences naturelles sont un moyen de retomber en quelque sorte sur la religion. C'est le fameux principe averroïste de la double vérité...
Avoir son avis pour soi, c'est forcément pratiquer la double vérité : on apparaît d'une certaine manière, aux yeux de l'Église, mais on a un avis personnel. Les commentateurs bourgeois ne sont jamais arrivés à trancher sur le caractère religieux ou non de Michel de Montaigne. Tout comme pour Molière, ils soupçonnent l'athéisme, mais ils voient que dans sa vie, Michel de Montaigne a respecté la religion, que dans les Essais le catholicisme est mis en avant. Ils ratent en fait le principe averroïste de présenter de manière indirecte les thèses de l'athéisme, en raison de la censure et de la répression.
On sait que chaque page des Essais contient une ou plusieurs citations d'auteur de l'antiquité, qu'il s'agit d'une oeuvre de réflexion, avec un regard critique sur soi-même. Il y a de la curiosité, un travail réel qui est fait. Or, Michel de Montaigne explique que pour apprécier la religion, il ne fait pas juger, il faut être pratiquement idiot...
L'averroïsme politique prône la rationalité, et donc, avec la critique de l'Espagne catholique et la séparation de l'Église et de la pensée d'État, on trouve le rejet des superstitions et de la torture. Cela témoigne du fait que sur le plan de la civilisation, la monarchie absolue représente une étape nouvelle.
Parmi les superstitions, Michel de Montaigne classe bien entendu la confiance aveugle en les médecins. Ce qui est préfiguré ici, c'est la critique de Molière. Voici comment Montaigne se moque de la nature des médicaments proposés : « Même le choix qu’ils font de leurs drogues a quelque chose de mystérieux et de divin. Le pied gauche d’une tortue, l’urine d’un lézard, lafiente d’un éléphant, le foie d’une taupe, du sang tiré sous l’aile droite d’un pigeon blanc...»
Michel de Montaigne travaillait dans sa bibliothèque, dans une tour de son domaine et y avait fait graver des phrases sur les poutres et les solives du plafond. On lit ainsi cette citation de Pline :
« Il n’est rien de certain que l’incertitude, et rien de plus misérable et de plus fier que l’homme. »
On y lisait aussi cette sentence de Sextus Empiricus :
« Il n’y a aucun argument qui n’ait son contraire, dit la plus sage école philosophique. »...
L'éloge de la « politique » contre le raffinement, de Sparte contre Athènes, est au cœur des Essais de Michel de Montaigne. C'est en cela qu'il faut comprendre les références aux autres pays, notamment à l'Amérique.
On sait que Michel de Montaigne, dans les Essais, a traité de la question des « cannibales » en Amérique ; c'est un argument ethno-différencialiste utilisé systématiquement dans les cours de français au lycée.
L'année 1932 a été un tournant dans l'histoire allemande, dans la mesure où elle préfigure la prise du pouvoir par Adolf Hitler.
Si elle réussit un bon score, la haute bourgeoisie osera de plus en plus à passer le cap d'un soutien à Marine Le Pen, chose considérée comme relevant encore trop de l'aventurisme.
Mais si son score en haut, si elle montre qu'elle encadre avec succès une large partie du prolétariat, alors elle montre son efficacité, sa fiabilité, et cela encore plus si un secteur de la bourgeoisie industrielle la soutient également.
C'est une raison de plus d'appeler au barrage électoral pour le second tour des élections présidentielles : il faut que Marine Le Pen perde, avec un score le plus bas possible !...
Le Front de la Patrie mit en place comme régime la République Populaire de Bulgarie, dont les deux premiers articles de la constitution constatant que :
« La Bulgarie est une République populaire à gouvernement représentatif, établie et affermie à la suite des luttes héroïques du peuple bulgare contre la dictature monarcho-fasciste et de l'insurrection populaire victorieuse du 9 septembre 1944.
Dans la République populaire de Bulgarie, tout le pouvoir émane du peuple et appartient au peuple. Le peuple exerce ce pouvoir par des organes représentatifs librement élus et par référendum. Tous les organes représentatifs du pouvoir de l’État sont élus par les citoyens sur la base du droit électoral universel, égal et direct, au scrutin secret. »...
Le Front de la Patrie tint son premier congrès du 9 au 12 mars 1945, alors que parallèlement l'Union Générale des Syndicats Ouvriers tint son premier congrès du 16 au 20 mars 1945.
En août 1945, Georgi Dimitrov fut libéré de sa fonction de député du Soviet Suprême de l'URSS. Il put alors retourner en Bulgarie le 6 novembre 1945 en Bulgarie, après 22 années d'émigration.
Il devint alors la figure majeure du Front de la Patrie, qui présenta une liste unifiée aux élections du 18 novembre 1945, réunissant les communistes, le Parti Agrarien, l'Union Populaire « zvéno », le Parti Ouvrier Social-démocrate et le Parti Radical, récoltant 88,18 % des voix, avec un taux de participation de 85,60 %...
En mars 1941, la Bulgarie rentra dans la Seconde Guerre mondiale impérialiste, en rejoignant le pacte tripartie (regroupant l'Allemagne nazie, l'Italie fasciste et l'Empire du Japon). Elle participe à l'offensive contre la Grèce et la Yougoslavie.
Les communistes lancèrent alors comme appel :
« Pas un grain de blé bulgare, pas un morceau de pain bulgare pour les fascistes allemands ! Pas un seul Bulgare à leurs service ! »...
« Pourquoi et de quelle façon le fascisme a-t-il pu vaincre ?
Le fascisme est le pire ennemi de la classe ouvrière et des travailleurs.
Le fascisme est l'ennemi des neuf dixièmes du peuple allemand, des neuf dixièmes du peuple autrichien, des neuf dixièmes des autres peuples des pays fascistes...
Une fois en URSS, Georgi Dimitrov participa à de très nombreuses célébrations, devenant une figure importante du pays.
Ce ne fut cependant pas tout : il participa aux travaux du VIIe congrès de l'Internationale Communiste, où il présenta dès le premier jour, le 2 août 1935, le rapport « L'offensive du fascisme et les tâches de l'Internationale Communiste dans la lutte pour l'unité de la classe ouvrière contre le fascisme ».
Il prononça également le discours de clôture du rapport au VIIe congrès, le 13 août, sous le titre « Pour l'unité de la classe ouvrière contre le fascisme »...
Après le procès, Georgi Dimitrov se retrouva en première ligne pour exposer la nature du fascisme, ce qu'il fit tout d'abord dans la presse soviétique (Les premiers enseignements, Ce que nous devons dire avant tout). Voici l'extrait principal d'un article qu'il écrivit pour la Pravda, l'organe du Parti Communiste d'Union Soviétique (bolchévik). Paru dans ce quotidien le 4 mars 1934, l'articile s'intitule Une victoire de la solidarité prolétarienne :
L'incendie du Reichstag devait marquer et marqua effectivement l'origine d'une campagne terroriste du fascisme allemand contre le mouvement révolutionnaire du prolétariat.
La provocation du 27 février 1933 visait à être le signal de l'« anéantissement » du marxisme, en entendant par là le mouvement révolutionnaire du prolétariat allemand...
Dimitrov. - En vertu du paragraphe 258 du code de procédure criminelle, j'ai le droit de parler comme défenseur et comme accusé.
Le président. - Vous avez le droit de parler le dernier. Cela vous est accordé maintenant.
Dimitrov. - En vertu de ce code, j'ai le droit de discuter avec le ministère public et, ensuite, de faire une dernière déclaration.
Messieurs les juges, messieurs les accusateurs, messieurs les défenseurs, déjà, au début du procès, il y a trois mois de cela, j'ai adressé, en tant que prévenu, une lettre au président du tribunal...
Georgi Dimitrov s'installa à Vienne à partir de la fin janvier 1927, ville abritant la direction du Comité Central du Parti Communiste de Bulgarie (étroit). Il se rendit en 1928 en URSS, pour assister au IVe congrès du Profintern (l'Internationale Syndicale Rouge) et au VIe Congrès du Komintern, où il fut le délégué bulgare, parlant à ce titre le 6 août 1928.
L'écrasement de 1923 provoqua une véritable onde de choc dans l'esprit de Georgi Dimitrov, surtout que la situation en Bulgarie n'était pas marquée par une amélioration.
Par la suite, le Parti Communiste de Bulgarie (étroit) tenta en effet de prolonger le mouvement, en coopération avec les agrariens et des généraux de gauche.
L'apogée de cela consista, le 16 avril 1925, en la décision d'une partie de la direction de mener l'attaque à l'explosif de la cathédrale Sveta Nedelia devant accueillir la cour du roi lors des obsèques du général Konstantin Georgiev, exécuté par les communistes quelques jours auparavant pour son rôle dans la ligue militaire...
Un événement essentiel vint modifier la situation en Bulgarie en 1921. La victoire de l'Armée rouge dans la guerre civile russe amena les troupes du général Wrangel à se réfugier en Bulgarie.
La présence d'environ 36 000 soldats de l'armée blanche polarisait grandement la situation, faisant planer la menace d'un coup d’État.
Les communistes appuyèrent alors le gouvernement agrarien (« Union nationale agraire bulgare ») et socialiste, malgré sa répression menée jusque-là sous l'égide du premier ministre agrarien Alexandre Stamboliyski...
L'irruption des guerres balkaniques à partir de 1912 – la Bulgarie, la Grèce, la Serbie contre l'empire ottoman, puis la Bulgarie contre la Grèce et la Serbie – désorganisa relativement le Parti, même si en 1913 il obtint 18 députés (contre un seul auparavant), dont Georgi Dimitrov. Le Parti mena ensuite campagne en faveur de la cessation de la Première Guerre mondiale, Georgi Dimitrov étant arrêté pour cette raison à de nombreuses reprises de manière brève, la polarisation se produisant d'autant plus qu'à partir de septembre 1915, la monarchie bulgare fit entrer le pays dans la guerre, du côté de l'Allemagne.
Finalement, Georgi Dimitrov fut condamné à trois ans de prison, qu'il commença en août 1918, pour s'être rebellé en août 1917 contre un officier chassant un blessé de la première classe d'un train. L'accusation officielle fut « l'incitation des militaires à la désobéissance et à l'indiscipline en temps de guerre »...
Georgi Dimitrov est né le 18 juin 1882, dans le village de Kovatchevtsi près de Pernik, une région minière non loin de Sofia. Il est né dans les champs, sa mère servant d'aide aux champs, avant de devenir servante, tandis que son père parvint par la suite à s'installer comme artisan de chapeaux à Sofia.
Ses parents provenaient tous deux de la région de Krésna-Razlog, marquée à la fin du XIXe siècle par un soulèvement bulgare anti-ottoman, dans le cadre du refus de la Macédoine bulgare de rester dans le giron ottoman...
Georgi Dimitrov a été l'une des personnalités les plus connues mondialement durant les années 1930, marquant de son sceau l'histoire des années 1940 et 1950. Il est impossible de s'intéresser à l'Histoire du monde sans lui accorder une place extrêmement importante.
Les raisons pour cela sont multiples : tout d'abord, il fut la victime d'un procès retentissant en Allemagne nazie en 1933, attirant une attention très approfondie de la presse mondiale et de l'opinion démocratique mondiale...
Lorsque le KKE décide de cesser la lutte armée, la DSE dut organiser son repli. 55 381 personnes, dont 17 352 enfants, quittèrent la Grèce.
Environ 70 % des réfugiés venaient de la paysannerie ; environ un tiers était membre du KKE. En URSS, c'est l'Ouzbékistan qui accueillit les réfugiés, dans le quartier Politeies de la capitale Tachkent.
Le KKE tint rapidement son troisième congrès, du 10 au 14 octobre 1950, réaffirmant ses positions. Le prestige historique du KKE est alors très grand et lors du XIXe congrès du PCUS en octobre 1952, Níkos Zachariádis est mis en avant comme l'une des principales figures du mouvement communiste international...
De manière officielle, l’État grec réactionnaire avait perdu 55 528 soldats, alors que 38 839 soldats de la DSE avaient été tués ou blessés.
Mais la cessation de la lutte armée ne signifiait nullement la fin de la lutte des classes ; il restait d'ailleurs différentes unités et les deux derniers partisans de la DSE, Giorgos Tzompanakis et Spiros Blazakis en Crète, descendirent par exemple de la montagne en 1975 seulement, après l'effondrement de la dictature des colonels le 24 février.
C'est le général Aléxandros Papágos, le dirigeant des armées réactionnaires soutenues par les États-Unis d'Amérique, qui reçut la charge de réorganiser le pays...
La lutte démocratique pour l'émancipation de la femme est une cause essentielle. Les femmes représentent la moitié de l'Humanité et, pour des raisons historiques, elles ont été marginalisées socialement avec la mise en place de l'agriculture et de l'élevage.
C'est justement cette cause historique qui fait que le communisme, amenant le dépassement de la contradiction entre villes et campagnes, entre travail manuel et travail intellectuel, permet la réalisation de l'émancipation de la femme...
Les événements de l'année 1949 sont à la fois rapides, nombreux et extrêmement complexes, tout en étant relativement trompeurs. En effet, si d'un côté la DSE est défaite, le KKE considère que ce n'est un épisode particulièrement douloureux d'une vaste séquence dont il va sortir victorieux.
La situation est à considérer comme suit : les forces du progrès doivent chercher à éviter les campagnes d'encerclement et d'anéantissement des forces de la réaction. Jusque-là, la DSE avait montré ses capacités tout à fait excellentes à ce niveau...
La venue de Paul Eluard coïncide avec un moment où le KKE est le fer de lance pour la bataille de la démocratie populaire, au point qu'il est considéré dans l'est européen que la Grèce allait bientôt rejoindre le camp démocratique. Voici comment le KKE voit les choses, au début de l'année 1949, dans une résolution.
Celle-ci est issue de la tenue du cinquième Plénum commun du Comité Central du KKE, qui s'est tenu les 30 et 31 janvier 1949 ; elle a comme titre La Grèce sur la voie de la victoire devant le tournant décisif. On remarquera que le rôle essentiel de la révolution chinoise est soulignée dès le début du document...
L'ensemble du mouvement communiste international apporta son soutien à la DSE. Le quotidien du Parti Communiste français, L'Humanité, envoya Simone Téry comme reporter dans la Grèce libre, dans le nord du pays, en octobtre1947, ses reportages étant publiées dans une série intitulée Les hommes de cœur sont plus forts que les dollars, publiée dans le quotidien du 19 décembre 1947 au 14 janvier 1948. Par la suite, un événement marquant fut la venue en Grèce, en 1949, du poète et résistant français Paul Eluard.
Il fut accompagné notamment de gens issus de la gauche socialiste se rapprochant du PCF par leur parcours dans la Résistance : le journaliste et homme politique Yves Farge, à l'origine de la dénonciation d'un grand scandale de corruption en 1946, l'ancien journaliste du journaliste socialiste Le Populaire Jean Maurice Herman, fondateur du Syndicat National des Journalistes CGT, ainsi que l'instituteur Henri Bassis...
La clique de Tito poignarde dans le dos la Grèce démocratique populaire
par NICOS ZACHARIADIS
Cet article a été publié pour la première fois dans l'organe du Bureau d'Informations des Partis Communistes et Ouvriers « Pour une Paix durable pour la Démocratie Populaire » N°15 du 1er aout 1949
L'exploitation infâme de la question Macédonienne par la clique traîtresse de Tito
par PANAYOTIS MAVROMATIS
La question nationale fut toujours une des questions les plus délicates et les plus difficiles qu'avaient eu et ont à envisager les Partis de la classe ouvrière.
Les impérialistes anglais et la résistance nationale de Grèce et de Yougoslavie
par COSTAS CARAGHIORMS
Rien ne pourrait, peut-être illustrer plus nettement et d'une manière plus caractéristique la dégénérescence trotskiste et chauviniste des dirigeants du PCY que leur conduite envers la lutte antiimperialiste de libération nationale du peuple grec. A l'heure actuelle leur position est devenue plus franchement et plus ouvertement hostile.
La clique de Tito et le Parti Communiste de Grèce
par ZISSIS ZOGRAFOS
La trahison de Tito et de sa clique aboutit, ces derniers temps, à son extrême conséquence logique envers l'Union Soviétique, les Démocraties Populaires, le front anti impérialiste en général.
La clique de Tito au fond de la trahison
par MILTIADE PORFYROGENIS
Quand, vers la fin de juin 1948 fut communiquée la résolution du Bureau d'Informations des Partis Communistes et Ouvriers, sur la situation dans le Parti Communiste de Yougoslavie, et avant même que le Parti Communiste de la Grèce eût annoncé sa thèse sur la résolution, des simples membres du Parti, ici dans la Grèce Libre, exprimaient leur indignation pour l'attitude des dirigeants du P.C. de Yougoslavie.
RÉSOLUTION du 4e Plenum du CC du PCG
GRAMMOS 30-31 juillet 1948
La trahison de Tito et le PCG
par PETROS ROUSSOS
Cet article a été transmis pour la première fois par la Radio de la Grèce Libre le 6.8.49.
L'agence télégraphique « Grèce Libre » a révélé que le 5 juillet 1949 des officiers de Tito ont collaboré à la frontière avec des collègues monarcho-fascistes.
L'échec de l'opération Couronne fut un revers de taille pour l'impérialisme américain et les forces réactionnaires grecques.
Van Fleet décida alors de fasciser complètement l'armée grecque, dont le commandement revint en janvier 1949 à Aléxandros Papágos, dont l'une des premières mesures fut d'autoriser l'utilisation du napalm par les forces américaines.
Les officiers reçurent l'autorisation d'abattre ceux qui ne combattraient pas de manière assez décidée, les commandants eux-mêmes risquant la court martiale, les retraites n'étant autorisées que sur ordre exprès du quartier-général...
Níkos Zachariádis avait tout à fait compris que la question de la guerre civile était celui de l'affrontement entre la démocratie populaire et le fascisme. La DSE n'était pas une fin en soi, pas plus que l'EAM ; il ne s'agissait que d'éléments dans une séquence plus générale.
La force du mouvement de libération national avait ainsi résidé, selon Níkos Zachariádis, dans le fait que l'indépendance nationale avait été affirmée en rapport avec la bataille pour la démocratie, ce qui allait avec la question agraire ; la question nationale de l'indépendance était inséparable du rapport à la démocratie...
Si la DSE représentait la tendance démocratique, progressiste, se renforçant par rapport à une réaction déchaînée, mais s'épuisant, un nouveau facteur vint entièrement modifier la donne.
Les États-Unis considérèrent en effet qu'il était nécessaire qu'elles interviennent, afin d'empêcher la Grèce de devenir une démocratie populaire, étant donné que la Grande-Bretagne n'était plus en mesure de porter le régime grec...
La non-participation aux élections fut une erreur tactique, donnant le champ libre aux réactionnaires : le référendum sur le retour du Roi obtint 69 % de voix favorables à celui-ci, qui revint alors le 27 septembre 1946 à Athènes, accueilli triomphalement par ses partisans.
Le régime avait également auparavant annulé en mai 1946 la victoire (88%) aux élections syndicales de l'ERGAS (Ergatikos Antiphasistikos Synaspismos – Bloc ouvrier antifasciste), tout comme il avait en juin 1946 modifié la direction du syndicat GSEE, jusque-là communiste.
Jusqu'en 1947, le bilan de la répression s'élevait à 24 000 personnes assassinées, 105 exécutés par les cours martiales, 6 671 personnes grièvement blessées, 31 682 torturés, 84 931 détenus, 18 867 foyers saccagés, 577 bureaux et imprimeries mis à sac, 165 viols, 5 817 exils, 12 000 personnes envoyés en camp de concentration...
Le paradoxe du gigantesque succès du KKE avec l'EAM et l'ELAS, c'est que le théoricien de la ligne de libération nationale qui amena cela n'était plus présent depuis plusieurs années.
Arrêté en 1936 par la dictature de Ioánnis Metaxás, Níkos Zachariádis fut envoyé au camp de concentration de Dachau en 1941. Le KKE n'avait plus aucune nouvelle de lui depuis.
Grande figure historique cependant du KKE - à ce titre, Níkos Zachariádis était très connu des masses - la nouvelle de son retour annoncé le premier mai 1945 dans l'organe du Parti Rizospastis provoqua une onde de choc...
Winston Churchill, le Premier ministre anglais, avait exigé lors de la conférence de Moscou en octobre 1944 un découpage en zones d'influence, suivant les modalités suivantes : Hongrie et Yougoslavie : 50%- 50%, Roumanie : 10% - 90%, Bulgarie: 25% - 75% et Grèce : 90 % - 10%.
Ces pourcentages n'ont aucune signification en soi, à part qu'ils signifiaient que l'impérialisme britannique ne tolérerait pas d'intervention ouverte de l'Armée rouge en Grèce.
Impossible pour l'URSS de ne pas accepter cela, de par la nécessité de l'alliance générale contre l'Allemagne nazie – le risque n'étant pas de ne pas battre celle-ci, mais que celle-ci réussisse un retournement d'alliance avec les États-Unis et la Grande-Bretagne dans une optique anti-soviétique...
Si le KKE avait l'initiative jusque-là, la présence britannique allait se révéler être un énorme un obstacle. Cette question allait être au cœur du positionnement du KKE et la source de la guerre civile.
Quelles sont les raisons à cela ? Déjà, parce que cela signifiait à court terme une reformation de l'EDES, qui put mener une dernière contre-offensive en janvier 1944, ce qui provoqua immédiatement une réponse acharnée de l'ELAS. Ensuite, parce que l'impérialisme britannique s'était placé au centre des négociations entre l'ELAS, l'EKKA et l'EDES. Enfin, parce qu'avec ce positionnement, l'impérialisme britannique appuyait tout azimut les initiatives anti-communistes, récupérant toutes les forces possibles, même celles ayant été auparavant des fervents soutiens de l'Allemagne nazie...
L'opposition à l'occupation prit en Grèce rapidement un large aspect populaire, comme en témoigne la vague de grèves et de rassemblements à Athènes à la fin d'octobre 1941. L'EAM, bien que très faible dans certaines zones, organisait notamment des cuisines populaires pour faire face à la famine ; cela restait embryonnaire, mais une dynamique s'affirmait.
Cela aboutit notamment à la vaste grève à Athènes à l'été 1942, à laquelle participèrent les ouvriers d'une usine de caoutchouc pour l'Armée allemande, ceux du port, ceux des tramways et de la production d'électricité, des assurances, de quelques banques, des postes et télécommunications, etc...
Le coup d’État d'août 1936 porta un coup terrible au KKE : 1 000 membres furent arrêtés, les archives du bureau politique furent découvertes par les services secrets et l'organisation clandestine démantelée, alors que 150 membres furent encore arrêtés en 1938.
A la fin novembre 1939, l'ensemble du Comité Central de 1935 était en prison. Le régime pratiqua l'isolement et la torture, encourageant à des formes ouvertes de repentir, avec publications dans la presse, etc. Il mit même en place une fausse organisation du KKE se posant comme « direction provisoire » afin de saboter la reconstitution organisationnelle illégale du KKE...
L'histoire politique de la Grèce est marquée par la tentative de réaliser la « Grande Idée » et son échec avec la « grande catastrophe », c'est-à-dire que l'opposition à la domination ottomane réalisée par l'instauration d'une monarchie en 1832 s'est prolongée en un nationalisme ouvertement expansionniste, qui se brisa toutefois face à la Turquie. Au cours de ce processus, la Grèce put s'agrandir initialement, à la suite de la guerre balkanique de 1912-1913, sa population passant de 2,8 à 5 millions de personnes.
Mais la Première Guerre mondiale et ses conséquences, avec l'apparition de la Turquie, eut comme résultat une défaite militaire complète en 1922, l'échange de population, avec un million et demi de chrétiens quittant l'Anatolie et la Thrace orientale (et 388 000 Turcs la Macédoine), provoquant un procès en Grèce contre les prétendus responsables de la défaite (le « procès des six », avec la condamnation à mort de cinq ministres et du chef de l'armée en Asie mineure), puis même l'effondrement de la monarchie en mars 1924...
En 1919, Karl Kautsky publia Domination populaire ou domination de la violence et son point de vue est très simple. Les Alliés ont gagné la guerre, car leur prolétariat les a soutenu, la lutte s'étant présentée selon lui comme une lutte contre le militarisme et l'autocratie. Pour cette raison, le prolétariat ne pourra désormais plus que prolonger sa logique de revendications et le socialisme apparaîtra comme nécessaire, sans même une révolution violente.
Cela montre à quel point Karl Kautsky n'a en rien saisi la nature de l'impérialisme, que Lénine a justement défini...
Le centrisme de Karl Kautsky se prolongea y compris en pleine effervescence révolutionnaire en Allemagne. Lors d'un conférence générale de l'opposition en avril 1917, Karl Kautsky s'opposa ainsi tant à la présence des spartakistes qu'à la formation d'une nouvelle organisation, le Unabhängige Sozialdemokratische Partei Deutschlands - USPD (Parti social-démocrate indépendant d'Allemagne).
L'USPD eut pourtant un succès immédiat, obtenant 120 000 adhérents en quelques mois, alors que le vieux parti social-démocrate n'en avait alors plus que 240 000. Karl Kautsky et Eduard Bernstein prirent dans ce cadre une position tellement réformiste qu'ils devinrent les chefs de file de son aile droite...
Il est nécessaire ici de voir que c'est précisément cette passivité typique de Karl Kautsky que Lénine dénonce sous le vocable de kautskysme. Le kautskysme est ici un centrisme, c'est-à-dire une collusion avec la droite contre la gauche, au nom du succès mécanique inévitable censé arriver.
Karl Kautsky assuma cette position centriste jusqu'à la caricature. En 1915, il publia dans ce cadre État national, État impérialiste et fédération des États. C'était un ouvrage étrange : Karl Kautsky tentait d'y formuler une ligne de pseudo-critique de l'impérialisme, en pleine guerre...
La question de la grève de masses révéla tout ce que le kautskysme contenait de problématique. En 1893, Karl Kautsky abordait ainsi la question du parlementarisme, dans un long document cherchant à définir la position de la social-démocratie. Ce qui y est frappant, c'est que dès le début, il insiste sur une de ses anciennes positions : à ses yeux, même lorsque le peuple donnera directement le pouvoir, le parlementarisme est absolument nécessaire.
C'est très exactement la critique que fera Rosa Luxembourg à Lénine à la suite de la révolution russe de 1917. La principale erreur de la social-démocratie historique a été, en effet, une conception de la démocratie qu'elle opposait, non pas à la bourgeoisie comme le fit Lénine, mais à l'absolutisme...
Karl Kautsky considérait que la social-démocratie allait l'emporter de manière naturelle, submergeant le capitalisme pourrissant. Cette conception combinant mécanique historique et mouvement populaire se trouva relativement mise en défaut avec l'un des débats les plus importants dans la social-démocratie, celui de la grève de masses.
Il s'agissait d'une forme nouvelle, développé par le mouvement ouvrier belge, dans le cadre de la bataille pour le droit de vote, réservé à 44 000 personnes par la monarchie parlementaire née en 1830. Le Parti Ouvrier Belge en 1885 développa une ligne de masses aboutissant à de multiples grève politique de masse, en 1891, 1892, 1893, 1902 et 1913...
Comment comprendre historiquement que Karl Kautsky ait été la grande figure de la social-démocratie, mais soit devenu ensuite ce que Lénine appellera un renégat?
La source de ce mystère tient bien entendu à la matrice idéologique même de Karl Kautsky. Le problème essentiel de celui-ci est la séparation complète qu'il réalise entre le matérialisme dialectique et le matérialisme historique. S'il reconnaît la dialectique dans la nature comme dans la société, il considère qu'il y a des modalités spécifiques, n'ayant pratiquement rien à voir...
Karl Kautsky œuvra à une critique approfondie de la position d'Eduard Bernstein, qui apparut comme un « révisionnisme ». Il ne s'agissait pas de rejeter le fait que le socialisme scientifique devait progresser, que certaines affirmations de Karl Marx et Friedrich Engels apparaîtraient comme insuffisantes ou erronées : les progrès de la science seraient ininterrompus et il y aurait forcément des améliorations.
Avant de voir quelle fut la position de Karl Kautsky quant aux thèses d'Eduard Bernstein, regardons comment celles-ci ont pu être comprises et soutenues.
En France, le théoricien syndicaliste-révolutionnaire Georges Sorel apprécia par exemple énormément cette dénonciation du marxisme. Voici ce qu'il écrit, dans une lettre au philosophe italien Benedetto Croce :
Eduard Bernstein était un intellectuel qui, avec Karl Kautsky, était le plus proche de Friedrich Engels, dont il fut même l'exécuteur testamentaire. Son positionnement fut cependant totalement différent de celui de Kautsky et il provoqua une bataille idéologique dans les rangs de la social-démocratie allemande.
Eduard Bernstein savait tout à fait ce qu'est le marxisme. Il était tout à fait conscient, de manière pertinente, qu'il ne contient pas simplement un aspect économique, mais bien une base philosophique. Dans Les présupposés du socialisme et les tâches de la social-démocratie, la première partie de l'ouvrage est consacré à présenter la conception marxiste, on y lit, de manière juste :
« La question de la justesse de la conception matérialiste de l'histoire est la question de la nécessité historique et de leurs causes. Être matérialiste cela signifie de fait de ramener tout événément aux mouvements nécessaires de la matière...
La Revue des Deux Mondes accorda en 1904 son attention au congrès social-démocrate d'Amsterdam. L'article de J. Bourdeau présente de manière très intéressante comment l'orthodoxie de la social-démocratie allemande avec Karl Kautsky posait un souci fondamental à la gauche française. En voici des extraits significatifs, où l'observateur amusé constate bien la différence totale d'approche.
De tous les Congrès socialistes internationaux, celui d’Amsterdam a provoqué en France le plus d’attention et soulevé le plus de polémiques.
C’est à peine si la presse anglaise en a fait mention. Les socialistes d’Amsterdam ont aussi peu excité la curiosité des Anglais, que s’il s’était agi d’une réunion cosmopolite de médecins ou de philosophes, bien que les socialistes se proposent non d’améliorer ou d’interpréter le monde, mais de le changer ; — c’est que les Anglais professent la plus parfaite indifférence pour les phrases et les théories. Les socialistes du continent sont d’habiles metteurs en scène, et ils savent organiser leurs représentations théâtrales...
Karl Kautsky était le défenseur du matérialisme historique, faisant tout pour populariser les thèses de Karl Marx et Friedrich Engels, reconnaissant entièrement que leur approche était scientifique et qu'il fallait se placer historiquement dans cette orientation. C'était le sens de son orthodoxie.
En 1887, Karl Kautsky publia ainsi un écrit sur les enseignements économiques de Karl Marx, qui sont à ses yeux la clef de voûte du marxisme et donc de la social-démocratie. A ses yeux, Le Capital compte comme une œuvre d'histoire et ce qui compte, c'est l'analyse objective de la réalité, en portant son attention sur le mode de production...
Karl Kautsky aborde de manière plus directe la question française dans La république et la social-démocratie en France, série d'articles publiée dans la Neue Zeit en 1904 et en 1905.
A l'arrière-plan, il y a l'opposition idéologique avec Jean Jaurès, qui a une conception de la république « au-delà » de la lutte des classes qui n'est pas considérée comme marxiste.
Tous deux ont d'ailleurs étudié la révolution française, Karl Kautsky publiant en 1899 Les antagonismes de classes à l'époque de la Révolution française. Jean Jaurès se positionnait à la base même contre Karl Kautsky et le marxisme...
Karl Kautsky représente l'approche orthodoxe du marxisme ; à l'opposé d'en France, la direction de la social-démocratie reconnaît le marxisme comme science.
La différence est fondamentale entre le socialisme de type français, éclectique, anti-idéologique, Jean Jaurès lui-même n'ayant jamais formulé de corpus théorique, et le marxisme défendu par la social-démocratie allemande...
Karl Kautsky est né à Prague le 16 octobre 1854. Sa famille appartient alors au milieu du théâtre ; sa mère est actrice et écrivain, son père peint dans les théâtres. Installée d'abord à Prague, ensuite à Vienne 1875, Karl Kautsky étudia à l'université de cette ville, jusqu'en 1878, dans les domaines de l'histoire, de la philosophie, de l'économie.
Influencé lors de ce parcours par un enseignant à la maison appartenant au hussitisme, il devint un démocrate radical, avant que la Commune de Paris ait un impact significatif sur lui, l'amenant au socialisme...
En France, quand on parle du marxisme, on se réfère aux œuvres de Karl Marx et on pense que le marxisme consiste précisément en ces œuvres. Ce point de vue est fondamentalement erroné et à lui s'associe une phrase de Karl Marx, mise hors contexte :
« Tout ce que je sais, moi, c’est que je ne suis pas marxiste. »
La réalité est toute autre. Historiquement, le marxisme n'a jamais consisté en les œuvres de Marx, mais en l'interprétation des œuvres de Karl Marx et Friedrich Engels effectuée par Karl Kautsky dans le cadre de la social-démocratie allemande...
Pourquoi le libéralisme fut-il en mesure de s'affranchir aussi aisément du mercantilisme ? L'exemple français est ici très pertinent.
En 1615, déjà, le protestant Antoine de Montchrestien (1575-1621) avait dans Traité d’économie politique fournit les principales thèses mercantilistes. L'impact historique s'effaça cependant, en raison du poids du catholicisme et de la féodalité.
Or, le poids du catholicisme et de la féodalité ne signifie rien d'autre que le capitalisme n'a pas encore pénétré les campagnes de manière suffisante...
Le mercantilisme anglais est, de fait, celui qui fut le plus authentique, car le plus poussé, au point de paver la voie à une véritable analyse économique capitaliste.
Les figures qui y participèrent furent très nombreuses et jouèrent un rôle historique de grande importance ; il est souvent parlé de mercantilisme « commercialiste » pour désigner leur approche.
On trouve ainsi Thomas Gresham (1519-1579), marchand et financier richissime, fondateur de la bourse du commerce de Londres, la Royal Exchange...
À l'opposé de l'esprit modernisateur de Jean-Baptiste Colbert, l'Espagne pratiqua une forme totalement décadente de mercantilisme. Si la France était une monarchie absolue, avec une base féodale et une superstructure en contradiction avec sa propre base, tel n'était pas le cas en Espagne, bastion du féodalisme et du catholicisme.
Le processus de conquête espagnol en Amérique se déroula, par conséquent, dans une optique d'esprit étroit, borné, féodal, ce qui aboutit au fétichisme complet pour l'or. C'est la fameuse figure du conquistador avec son obsession pour ce métal précieux...
Le mercantilisme se fonde sur le cadre national, théorisé en France par Jean Bodin ; dans la logique du mercantilisme, un pays ne peut s'enrichir qu'aux dépens d'un autre, le niveau des richesses ne se modifiant pas.
C'est là une vision bien entendu réductrice, dont la faiblesse réside dans la focalisation unilatérale sur l'argent, dans le cadre d'une évaluation de la balance commerciale. Il faut vendre plus que les autres, vendre plus cher, et ce moment-là le pays s'enrichit...
La préface de Jean Bodin pour Les Six Livres de la République a donné naissance au mercantilisme, parce que le mercantilisme est une réflexion sur la richesse des nations. Or, pour cela, il faut une nation.
C'est justement la monarchie absolue qui en France lui donne naissance.
Jean Bodin inaugure un discours qui est celui de ce qu'on appelle la politique, soit le débat sur la richesse nationale et ses modalités...
Pour comprendre la genèse du mercantilisme, il faut en France remonter au XVIe siècle. On sait que les guerres de religion ont secoué terriblement le pays alors, amenant la fraction dites des politiques à lancer une opération dont la réalisation sera l'arrivée au trône de Henri de Navarre, sous le nom de Henri IV.
L'Édit de Nantes ne fut qu'un aléas dans l'histoire du drame protestant, dans la mesure où les huguenots furent toujours plus les victimes de la monarchie absolue en formation. Toutefois et justement, la monarchie devenant absolue est née en profitant des guerres de religion pour former une faction au-dessus de la mêlée...
Il serait erroné de penser que, de manière logique, les commerçants et les marchands partent à la conquête du monde non capitaliste. En effet, lorsque les commerçants et marchands ont les mains libres, ils tentent de maintenir leur monopole, d'avoir une démarche agressive.
Karl Marx, dans Le Capital, constate ainsi :
« Là où le capital marchand domine, il représente, par conséquent partout, un système de pillage tout comme d'ailleurs son évolution chez les peuples commerçants des temps anciens et des nouveaux est directement liée au pillage par la violence, à la piraterie, au rapt d'esclaves, à la soumission (dans les colonies) ; ainsi à Carthage, à Rome, plus tard chez les Vénitiens, les Portugais, les Hollandais, etc. (…). »
Historiquement, la première forme de capital est le capital marchand. Il est porté par les commerçants et les marchands, qui ont accumulé suffisamment de travail pour disposer de suffisamment de moyens d'échanges et tentent de généraliser autour d'eux les échanges, en en tirant un bénéfice.
Les commerçants et les marchands apparaissent initialement comme des intermédiaires troquant, achetant des objets pour les revendre. Le capital accumulé alors sert à renforcer les achats et les ventes, afin d'élargir toujours plus les capacités du capital à s'approprier davantage de biens, afin des les vendre plus et plus cher...
Dans le Discours de la servitude volontaire, on trouve une grande réflexion sur les aides administratives et techniques dont dispose le tyran. Ce dernier profite du soutien d'une poignée de gens, qui sont au coeur de ce que nous devons désormais appeler l'appareil d’État.
Voici comme est présenté le « secret » de l'existence même de la domination du tyran : déjà, il ne s'agit pas du pouvoir armé...
Le Discours de la servitude volontaire dénonce les superstitions, tout le folklore utilisé par le puissants pour justifier leur parasitisme général. Redonnons un exemple parlant :
« Le premiers rois d’Égypte ne se montraient guère sans porter, tantôt une branche, tantôt du feu sur la tête : ils se masquaient ainsi et se transformaient en bateleurs.
Et pour cela pour inspirer, par ces formes étranges, respect et admiration à leurs sujets, qui, s’ils n’eussent pas été si stupide ou si avilis, n’auraient dû que s’en moquer et en rire. »
Nous avons donc une œuvre, le Discours de la servitude volontaire, qui dénonce non pas une forme générale de pouvoir comme la monarchie, mais bien spécifiquement la tyrannie. Il est parlé du pouvoir et ce sont des exemples historiques qui sont donnés, mais on peut très bien appliquer ce qui est expliqué à l’Église catholique et dénoncer le Pape, pour aboutir à une forme d'organisation comme celle des protestants.
Cet appel à rejeter la tyrannie s'appuie, par ailleurs, sur un principe d'autonomie individuelle propre au protestantisme et à l'humanisme...
Comme on le sait, la monarchie française s'est fondée en lien étroit avec la religion. C'est un processus qui prolonge les périodes romane et gothique.
Ainsi, la légende catholique veut que Clotilde la femme de Clovis, alla prier avec un ermite, dans la forêt de Cruye (désormais forêt de Marly), lorsqu'un ange apparut et lui demanda de remplacer les trois crapauds de l'écusson royal par trois fleurs de lys en or.
On retrouve par la suite la fleur de Lys à l'époque de la dynaste carolingienne (à la suite de Charlemagne), avant d'être officialisé en tant que tel par Louis VII le Jeune au XIIe siècle. Il semble bien cependant que le nombre de trois fleurs de lys fut décidé par Charles V le Sage au XIVe siècle, en référence à la « Sainte Trinité »...
On se souvient que Michel de Montaigne avait prétendu dans les Essais que le Discours de la servitude volontaire était une sorte d'écrit de jeunesse d'Etienne de La Boétie, qui serait sans prétention, juste un exercice de style ayant comme but de témoigner de la connaissance de l'histoire de la Grèce et de la Rome antiques.
C'est clairement un masque pour une tentative d'analyse du principe d'opinion publique. L'auteur du Discours fait exactement comme l'auteur des Essais : il propose, soupèse, fait des digressions… Il n'y aucune rupture entre le Discours et les Essais à ce niveau...
Dans le Discours de la servitude volontaire, on trouve cet appel pathétique :
« Chose vraiment surprenante (et pourtant si commune, qu’il faut plutôt en gémir que s’en étonner) ! c’est de voir des millions de millions d’hommes, misérablement asservis, et soumis tête baissée, à un joug déplorable, non qu’ils y soient contraints par une force majeure, mais parce qu’ils sont fascinés et, pour ainsi dire, ensorcelés par le seul nom d’un qu’ils ne devraient redouter, puisqu’il est seul, ni chérir puisqu’il est, envers eux tous, inhumain et cruel...»
Lorsque dans les Essais, Michel de Montaigne annonce que c'est Etienne de La Boétie qui a écrit le Discours de la servitude volontaire, il fait une révélation à laquelle personne ne s'attendait. En feignant d'avoir voulu le publier, mais de ne plus le pouvoir, il attire l'attention de manière précise dessus.
En plaçant 29 poèmes à la place du Discours, il souligne bien l'importance de ce dernier, par son absence dont il est pourtant parlé, et qu'il faut même combler. En en parlant au sein d'un vaste discours philosophique sur l'amitié, il se couvre : s'il parle du Discours de la servitude volontaire, ce n'est qu'en référence à son ami… qui fut comme une partie de lui-même... Michel de Montaigne a de plus bien souligné par ailleurs qu'il a connu Etienne de La Boétie parce qu'il avait connu son Discours…
Le thème du Discours de la servitude volontaire d'Etienne de La Boétie est simple : le peuple accepte un régime en lequel il ne croit pas ou ne devrait plus croire, par la force de l'habitude. Nicolas Machiavel en Italie à la même époque avait raisonné au sujet de cette question de l'opinion publique, tout comme Kautilya en Inde au IVe siècle avant Jésus-Christ. Cependant, Machiavel et Kautilya s'adressaient au Roi, tout au moins le prétendaient-il.
Or, le Discours de la servitude volontaire parle du peuple, en espérant faire réagir les couches intellectualisées non liées au « tyran ». C'est précisément la position de Jean Calvin...
Influencé par le Discours merveilleux, La France-Turquie, c’est à dire, conseils et moyens tenus par les ennemis de la Couronne de France, pour réduire le Royaume en tel état que la tyrannie turquesque fut publié en 1575, en trois parties distinctes tout d'abord.
La première, Conseil du Chevalier Poncet, donné en presence de la Royne mere & du Conte de Retz, pour reduire la France en mesme estat que la Turque, consiste en la présentation des conseils donnés par un chevalier Poncet à Catherine de Médicis après avoir visité l'empire ottoman...
Aux côtés de François Hotman comme grande figure monarchomaque, on trouve Philippe Duplessis-Mornay (1549-1623), grand érudit protestant maîtrisant parfaitement le latin, mais également le grec, l'hébreu, l'allemand, ayant des connaissances larges en néerlandais, en anglais, ainsi qu'en italien.
Il sera ainsi un proche conseiller de Henri de Navarre, avant que celui-ci ne devienne Henri IV, cherchant à propulser celui-ci comme roi protestant maintenant une tolérance vaste pour les deux religions chrétiennes. La trahison de Henri IV l’amènera à gérer la situation inverse avec la négociation de l'Édit de Nantes, lui-même étant mis de côté par la suite, alors que s'intensifiait la vague monarchique anti-protestante...
Avec l'opposition entre protestantisme et catholicisme, la situation était explosive ; avec l'existence de la faction italienne au sein de la royauté, le besoin d'une rupture devenait complet pour les protestants.
La Francogallia eut donc un impact retentissant ; en pleine guerre civile, l'appel de François Hotman possédait un sens dépassant le simple cadre protestant. C'est toute l'option ultra du catholicisme et de la faction italienne de la royauté qui apparaissait comme précipitant le pays dans le chaos...
Le P«C»F est divisé en trois entités bien déterminées : la base, les cadres et les élus. Ces derniers ont conscience de la pression sur la survie de leur structure, la base vit dans une mythologie directement issue du révisionnisme.
Quant aux éléments intermédiaires, ils tanguent entre les deux, espérant en tout cas maintenir coûte que coûte la structure générale que les élus pourraient avoir tendance à dissoudre dans un regroupement plus vaste...
Le problème historique de la France est qu'elle a été influencée tant par l'humanisme et le protestantisme d'un côté, que par la Renaissance italienne et le baroque de l'autre. Or, cela est résolument contradictoire, de par les bases historiques de chaque mouvement, le premier étant progressiste, le second ancré dans le catholicisme, l'aristocratie, la réaction.
Pire encore, la nation française étant née à travers l'unification de ces deux pôles antagoniques, leur antagonisme est pour cette raison profondément masqué, inconnu, alors qu'il est justement à la source de profonds déséquilibres et fournit la base à maints événements historiques de notre pays...
Au XVIe siècle, tout un courant de pensée se développe sur la base du protestantisme (mais la dépassant largement) développant une conception politique qui sera, par la suite, qualifiée de monarchomaque, c'est-à-dire d'opposant à la monarchie.
Cette irruption d'une démarche politique était inévitable, pour deux raisons. Tout d'abord, il y avait l'affrontement entre le pouvoir royal et l'aristocratie, avec en arrière-plan la tendance à la formation de la monarchie absolue, pour centraliser et moderniser le pays...
L'année prochaine, tous les révolutionnaires authentiques du monde salueront la révolution d'octobre, la prise du pouvoir en Russie, il y a cent ans. Avec le grand Lénine à la tête des « bolcheviks » formant la majorité du Parti Ouvrier Social-Démocrate de Russie, les révolutionnaires ont été capables de renverser l’État réactionnaire et d'établir le socialisme.
Comme communistes suivant le chemin de 1917, nous voulons profiter de ce centième anniversaire à venir pour souligner un très impo..rtant aspect de la révolution d'Octobre : la question de la direction, c'est-à-dire l'importance de Lénine...
Ainsi, la France des années 30 a connu de nombreuses organisations d'extrême-droite, mais les historiens bourgeois ont toujours nié que celles-ci relevaient du fascisme. Ils ont en particulier cherché à nier la nature des Croix de Feu et du Parti Social Français.
Seuls deux historiens bourgeois se sont opposés à cette vision : Bernard-Henri Lévy et Zeev Sternhell, qui ont considéré qu'il y a eu toute une scène fasciste qui a fait office de laboratoire et est passé ensuite dans le camp du pétainisme...
Connaître l'histoire des Croix de Feu et du Parti Social Français est capital pour qui veut comprendre les mentalités et la politique dans notre pays. En effet, ces deux organisations, la seconde étant issue de la première, ont formé ce qui a été historiquement le parti politique français avec le plus d'adhérents, sur une base idéologique et culturelle représentant le fascisme français.
Là réside d'ailleurs une sorte de secret, que seul le matérialisme dialectique permet de percer : ce dossier est une arme politique, idéologique et culturelle très puissante...
Il est très difficile d'établir le panorama du P.S.F. pendant l'Occupation, tellement les contradictions de la situation le firent imploser. Tous les choix possibles ont été faits au P.S.F., avec toutes les nuances.
On a ainsi Bernard Dupérier, pilote de François de La Rocque, qui prendra lors de la Résistance le commandement de l'escadre aérienne de chasse française en Grande-Bretagne, ou encore le député Edmond Barrachin qui rejoint Londres, tandis que le député Jacques Bounin organisa la Résistance à l'intérieur du pays.
Mais on retrouve aussi Paul Touvier, figure même du milicien, Paul Creyssel qui fut un temps secrétaire général à la propagande du régime de Vichy...
La défaite face à l'Allemagne nazie fut un coup terrible à la stratégie de François de La Rocque, entièrement fondée sur l'indépendance française complète, avec un partenariat proposable uniquement à l'Espagne franquiste et l'Italie fasciste, une opposition franche à l'Allemagne.
Bien entendu, une prise de contact eut lieu ; en septembre 1936, un représentant du P.S.F. alla en Allemagne discuter avec Rudolf Hess, en présence d'un consul espagnol anti-républicain et du fasciste anglais Oswald Mosley. En décembre de la même année, François de La Rocque se rend à Bruxelles, afin de rencontrer Léon Degrelle, le dirigeant belge du mouvement rexiste, ainsi que le banquier allemand Dessler...
A l'opposé des ligues espérant le coup d’État, François de La Rocque comptait phagocyter la République. La question électorale se posa alors inévitablement. Ce n'était pas du tout dans la démarche des ligues, ce qui souligne sa spécificité.
Cela ne veut pas dire que la prise du pouvoir soit conçue comme un simple processus électoral. Le P.S.F. ne se cachait pas sur ce plan, expliquant :
« Pour réaliser son programme, le Parti Social Français réclame LE POUVOIR...
L'anarchisme est une théorie du XIXe siècle, né sur le terrain de la petite propriété et faisant de l'individu la figure historique de notre époque, tout comme le libéralisme.
Au sein de la première Internationale, le marxisme a réussi à vaincre l'anarchisme, dont les figures les plus connues étaient alors Pierre-Joseph Proudhon et le russe Mikhaïl Bakounine...
L'opposition droite-gauche en France est issue, du point de vue du matérialisme dialectique, de l'affrontement entre deux fractions de la bourgeoisie : celle ouvertement réactionnaire, lié au royalisme et au catholicisme, et celle moderniste et laïque. Cette opposition est directement issue du compromis du tout début du XXe siècle. Le Parti Communiste n'a pas réussi à saisir cet arrière-plan, ne saisissant pas les contradictions au sein de la bourgeoisie.
Il n'a donc pas compris le radicalisme, cette forme de républicanisme de centre-gauche, expression de la bourgeoisie modernisatrice, partisane d'un capitalisme libéral et, de ce fait, opposé aux fractions de la bourgeoisie historiquement liées au féodalisme, au catholicisme, au monarchisme, etc...
Si le Parti Communiste a été amené aussi aisément dans les bras du jauressisme, ce n'est pas seulement pour des raisons d'incompréhension du matérialisme dialectique. François de La Rocque est, en fait, peut-être le seul en France à avoir compris ce qu'est le léninisme, et il était contre. Sa dynamique vise clairement, comme le national-socialisme allemand, à siphonner le développement d'un Parti Communiste s'établissant dans l'Histoire de son pays, impulsant des positionnements idéologiques et culturels révolutionnaire.
François de La Rocque a compris qu'il s'agissait d'une guerre de positions et le Parti Communiste s'est aperçu qu'il était en retard dans ce processus. C'est la raison pour laquelle il s'est précipité aussi facilement dans le républicanisme, tentant de lancer un mouvement Croix de Feu inversé...
A la mi-septembre 1937, la police mène une opération contre des dépôts d'armes dans tout le pays, mettant la main sur des centaines de fusils-mitrailleurs, des dizaines de mitrailleuses, ainsi que 10 000 grenades de provenance italienne et allemande. Fin janvier 1938, un de ces dépôts saute accidentellement, tuant 14 personnes ; il cachait 6 000 grenades et 200 kilos d'explosifs.
Telle était l'atmosphère lourdement pesante où l'extrême-droite s'organisait et s'armait. Dans ce cadre, le Parti Communiste, par l'intermédiaire de L'Humanité a très régulièrement parlé de François de La Rocque, des Croix de Feu et du P.S.F., tout à fait conscient de son importance dans le dispositif d'extrême-droite...
La position de François de La Rocque devint de plus en plus antagonique avec l'extrême-droite traditionnelle qui, fin 1937, met en place le plan d'un coup d’État. Le gouvernement devait avoir à sa tête le maréchal Franchet d'Esperey, le maréchal Weygand ayant refusé, le maréchal Pétain ayant « réservé son avenir » même si son chef de cabinet, le commandant Loustanau-Lacau, assurait la liaison entre les putschistes. Philippe Pétain considérait que le Front populaire s'effondrerait de lui-même et qu'il pourrait alors prendre les commandes des institutions.
François de La Rocque, comme en 1934, refusa de participer en mettant ses troupes à la disposition du coup d’État...
La ligne du P.S.F. est ainsi orientée vers les masses, car il s'agit, ce que les autres organisations de l'extrême-droite n'avaient pas compris, de faire nombre, comme le dit l'article « Le nombre » :
« En face des partis marxistes, il n'y a qu'un parti de masse : le P.S.F. Cela n'est plus contesté par personne. Et pourtant, cette constatation a le droit d'irriter certains qui, pour marquer leur dépit, répètent que le nombre n'est rien.
Or, il en est du nombre comme de la force. C'est une chose odieuse et méprisable, si elle est au service du mal – mais combien précieuse lorsqu'un noble idéal peut s'appuyer sur elle. »...
Pour rendre crédible la théorie de la profession organisée, François de La Rocque mit en place de vastes campagnes se voulant sociales, visant à contribuer à l'apolitisme d'orientation nationaliste, afin de produire une atmosphère rendant crédible sa proposition corporatiste. Il résumera sa stratégie ainsi, en juin 1936 dans une note aux chefs de sections :
« Qu’il s’agisse de l’ascension de nos idées vers le pouvoir, de la pénétration des milieux ouvriers et paysans ou, dans un champ d’action moins élevé, de la période électorale, cette action sociale est la condition sine qua non de nos succès. »...
Les Croix de Feu étaient nés comme structure d'anciens combattants, mais le glissement vers une ligne ouverte à tous avait donc été impulsée par François de La Rocque. En 1935, on lit d'ailleurs dans le Programme du Mouvement Social Français des Croix-de-Feu que :
« Nous ne pratiquerons jamais la religion de l’État, mais nous voulons un État tuteur, un État qui serve, contrôle, sanctionne.
Le Mouvement Croix-de-Feu est aussi loin de la conception totalitaire, à la mode italienne, allemande, où l’enfant dès sa naissance est voué à l’État, que de la conception marxiste où l’individu devient un numéro anonyme, écrasé sous la tyrannie collective d’une poignée de dictateurs. L’épithète fasciste convient à d’autres. Pas à nous. »...
Il faut bien être conscient que si le principe de « profession organisée » est une aberration technocratique, un corporatisme relevant du fascisme, ce principe sert avant tout une mystique que François de La Rocque a réussi à développer puissamment en profitant du fait que les ligues ont dû cesser d'exister. Le processus a été accompagné d'une de maître, avec une grande finesse politique.
Depuis 1935, les Croix de Feu s'appuient sur un Mouvement Social Français des Croix-de-Feu, avec une base idéologique ayant largement quitté l'approche unilatérale du nationalisme du type « anciens combattants ». Le 22 juin 1936, François de La Rocque faisait passer une circulaire indiquant aux adhérents qu'ils doivent rester en contact avec leur chef de « dizaine », expliquant le 24 juin dans une communication interne : « Le gouvernement… a prononcé dans l'arbitraire un nouveau décret de dissolution des Croix de Feu et des Volontaires Nationaux. Nous nous y attendions… Nous créons le « Parti Social Français ». »
Dans son ouvrage publié en 1934, Service public, François de La Rocque formulait sa théorie corporatiste sous le nom de « profession organisée ». Cela donnait la définition suivante, tout à fait contradictoire par ailleurs :
« Organiser la profession, explique-t-il ailleurs, c’est, dans le plan local, régional, national, réunir entre elles les différentes catégories de travailleurs, depuis l’ouvrier manuel jusqu’au patron, pour une même branche de production...»
Quelle est la différence entre les Croix de Feu et le Parti Social Français? Elle est très simple à comprendre.
Les Croix de Feu étaient une structure anti-marxiste : le P.S.F. se voulait la structure anti-marxiste par excellence. Toute sa forme tendait à ce but.
En janvier 1938, il devint une « union interfédérale », avec chaque fédération existant de manière officiellement autonome. Le comité exécutif, de son côté, se centralisait davantage, se réunissant quatre fois par ans seulement, alors qu'une commission administrative permanente s'occupait des activités au jour le jour...
Historiquement, le Front populaire a procédé à la dissolution des ligues. Les Croix de Feu devinrent le Parti Social Français, les autres ligues tentant de former des partis, sans grand succès, et en tout cas sans aucun rapport avec l'expansion numérique gigantesque du Parti Social Français.
Les historiens bourgeois se fondent dessus pour nier l'existence d'un fascisme français, en disant que le Parti Social Français – historiquement le parti qui en France a eu le plus d'adhérents – était un parti de droite dure, ayant même été finalement un obstacle à l'extrême-droite. François de La Rocque aurait fait basculer la ligue des Croix de Feu vers les institutions. En faisant cela, il aurait empêché le fascisme d'avoir une base populaire...
Le Parti Communiste français n'avait pas compris le caractère spécifique des Croix de Feu et du P.S.F., les assimilant avec François de La Rocque à l'extrême-droite ayant existé jusque-là sous la forme de groupes de pression nationalistes, favorables à un coup d’État. Il le paiera cher, car la conséquence sera l'incompréhension du gaullisme, qui est dans la continuité directe de la position de François de La Rocque.
Pourtant, les événements de 1934 auraient dû l'amener à comprendre cela. On sait que le 6 février 1934 a été un événement capital de l'Histoire de notre pays, avec plusieurs dizaines de milliers de manifestants des « ligues » d'extrême-droite tentant de marcher en direction du parlement, pour le prendre d'assaut...
En pratique, les Croix de Feu, aidés des Volontaires Nationaux qui étaient une structure de soutien, étaient une organisation de guerre civile. Les structures fonctionnaient de manière autonome, mais avec en leur sein une hiérarchie très stricte, avec des responsabilités paramilitaires et militaires bien définies.
Cinq adhérents, de la même maison, de la même rue, habitant près les uns des autres, formaient une « main ». Deux « mains » formaient une dizaine, trois dizaines une « trentaine », qui elle-même était associée à deux autres trentaines, pour former une « centaine ». Les centaines étaient reliées par « secteur »...
Dans l'optique d'un refus de l'opposition droite contre gauche et dans l'idée d'une renaissance-réconciliation, les Croix de Feu fondaient leur activité publique sur la mobilisation. Il ne s'agissait pas, comme l'extrême-droite liée au royalisme, de passer par la violence pour mener des coups d'éclat.
Il s'agit de diffuser un état d'esprit, une mentalité, ce qui correspond absolument aux démarches des S.A allemands et des chemises noires italiennes...
François de La Rocque se pose donc en sauveur de la Nation, qu'il veut refonder, en procédant à la réconciliation de la population et en purifiant l'administration. En cela, sa position peut se conjuguer aux Croix de Feu, qui ont également des attentes de réorganisation nationale, de valorisation du patriotisme complet, de rétablissement des valeurs traditionnelles, etc.
Cette dynamique est puissante et elle n'a pas besoin, par conséquent de s'inspirer d'autres tentatives du même genre ou différentes effectuées ailleurs. François de La Rocque rejette donc le fascisme, ce dernier étant considéré comme correspondant uniquement au modèle italien...
Que veut François de La Rocque, que compte-t-il faire des Croix de Feu ? En fait, tout comme avec les dirigeants nationalistes de l'époque, il n'a pas d'idéologie bien définie. Il agit, parce qu'il considère qu'il doit le faire, pour le bien de la Nation. Il transporte quelque chose qui est inhérent à la Nation, qui est nécessaire. C'est pourquoi il a pu affirmer que : « Le but est l'existence nationale. Un régime est un moyen. »
Et, de par sa base idéologique et culturelle, François de La Rocque a une certitude : s'il y a des problèmes sociaux, il est possible de les résoudre en se fondant sur une approche chrétienne et nationale, car les deux sont liés...
Maurice d'Hartoy n'était pas un idéologue, mais un sentimental nationaliste pétri de romantisme. Mais l'idéalisme s'effondre nécessairement dans la vie quotidienne la plus misérable.
En pratique, François Coty avait une liaison avec une secrétaire, dont il eut pas moins de quatre enfants. Celle-ci eut également une liaison avec Maurice d'Hartoy, qu'elle rejoindra par ailleurs à la mort de François Coty, qui finira par revenir en fait avec sa femme. Entre-temps, François Coty propose un marché à Maurice d'Hartoy, l'éloignant avec sa femme pendant une année au moins, par contrat, secret, lui finançant des voyages à l'étranger sous prétexte d'articles...
Avec cet arrière-plan, on ne s'étonnera guère que François de La Rocque se soit rapproché des Croix de Feu, initialement un mouvement d'anciens combattants d'orientation nationaliste.
Tout part de Maurice-Lucien Hanot, dit lieutenant d'Hartoy, au moment où il se rapproche de Joseph Marie François Spoturno dit François Coty, qui est alors un des hommes les plus riches du monde grâce à son industrie de parfum...
En novembre 1925, le ministre de l'intérieur Camille Chautemps fit procéder à des perquisitions : sont visés les sièges de l'extrême-droite, plus précisément de l'Action française, des Jeunesses Patriotes, de la Ligue des chefs de section (une organisation nationaliste d'anciens combattants), du Faisceau.
La raison en était que les quelques maréchaux qu'avaient alors la France travaillaient sur l'hypothèse d'un coup de force, provoquant une certaine panique au gouvernement du Cartel des gauches. Au cœur de cette logique putschiste, on a Hubert Lyautey...