12 oct 2014

Trotskysmes et néo-socialismes français – 1re partie : néo-socialisme et trotskysme enserrant le réformisme au sein de la social-démocratie française

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Le fait que la social-démocratie française n'ait été qu'une pâle copie, vide de contenu, de la social-démocratie allemande, a amené un résultat aux conséquences politiques immenses pour le mouvement ouvrier de notre pays.

En Allemagne, la social-démocratie c'est une série d'organisations de masse, organisées autour d'une idéologie bien déterminée : le marxisme. L'objectif se veut la prise du pouvoir d'Etat, par la lutte des classes, et cela reste le cas même lorsque les forces électoralistes triomphent complètement.

En France, la social-démocratie n'a nullement atteint cette dimension de masse. En 1913, alors qu'en Allemagne la social-démocratie compte 1,1 million d'adhérents, en France il n'y en avait que 91 000.

En Allemagne, ainsi qu'en Autriche, on trouve avant 1914 une littérature marxiste toujours plus poussée tant dans le réformisme que dans la révolution, avec des auteurs comme August Bebel, Karl Kautsky, Rosa Luxembourg, Wilhelm Liebknecht, Karl Liebknecht, Victor Adler, Rudolf Hilferding, Max Adler, Edouard Bernstein ou encore Franz Mehring.

On ne trouve rien de cela en France où le marxisme a été toujours réfuté. Le plus grand théoricien français, Jean Jaurès, n'a jamais laissé d'écrit théorique exposant son point de vue, privilégiant des études historiques, dont celle sur la révolution française qui justement aboutira au conflit idéologique avec Karl Kautsky et Franz Mehring.

La clef est bien entendu que Jean Jaurès considérait la « république » comme un principe neutre, pouvant indifféremment être socialiste ou capitaliste ; à ses yeux, comme d'ailleurs pour ensuite tous les réformistes, il faut s'appuyer sur la « république » pour avancer, en lui donnant une perspective sociale. Jean Jaurès affirme ainsi :

« Nous voulons collaborer avec toute la gauche pour une œuvre d’action républicaine et réformatrice. Nous voulons en même temps poursuivre les fins supérieures en vue desquelles le prolétariat s’est organisé... Mais cette émancipation sociale, cette émancipation économique suppose un prolétariat libre, éduqué, éclairé, elle suppose une démocratie organisée et agissante, une série de réformes qui, en ajoutant aujourd’hui un peu de bien-être à la vie des salariés, leur permettent de regarder plus loin, de lever les yeux vers l’avenir et de préparer un ordre nouveau.

C’est pourquoi nous sommes doublement attachés à la république, comme républicains et comme socialistes; ici notre rôle immédiat sera de donner aux réformes préparées par la portion la plus hardie de la majorité républicaine, le plus de précision possible, d’étendue et d’efficacité. »
(Discours du 12 juin 1902)

La conséquence fut terrible. La social-démocratie française a historiquement consisté en un parti porté par une fraction réformiste et gouvernementale entourée d'une foule d'autres fractions et tendances, s'opposant au réformisme à la Jean Jaurès :

- soit en comptant pousser l'engagement dans la « république », la « nation », etc.

- soit en rejetant inversement la « république » en tant que tel.

Ainsi, on a l'existence du « néo-socialisme », voire de néo-socialismes plutôt, c'est-à-dire de théorisation du socialisme dans le sens du nationalisme, voire ouvertement du fascisme.

Et de l'autre, les courants trotskystes, qui ont pullulé comme nulle part dans le monde, dans une foule de variantes différentes jusqu'à l'antagonisme, et avec une base militante unique au monde.

Que l'on regarde la S.F.I.O de la première partie du XXe siècle ou bien le Parti Socialiste de la seconde moitié du XXe siècle, on retrouve cette constante. Cela est également vrai pour les organismes liés au Parti Socialiste, notamment dans le syndicalisme étudiant.

On trouve toujours une ligne dominante réformiste, tiraillée par une « gauche » trotskyste ou proche du trotskysme, ou issue du trotskysme, et une « droite » prônant une orientation franchement tournée vers la participation gouvernementale, rejetant catégoriquement le principe de conflits de classe et assumant un discours « national ».

En pratique justement, les trotskysmes n'ont jamais été rien d'autres qu'une tendance social-démocrate en opposition aux « néos ». Ces derniers ont de leur côté été le produit inévitable, systématique, de l'intégration du Parti Socialiste dans tout l'appareil d'Etat bourgeois, la conséquence logique de sa logique de « modernisation » par en haut.