Existentialisme et pessimisme - 10e partie : «L'être et le néant» de Sartre
Submitted by Anonyme (non vérifié)« L'être et le néant » est un ouvrage de plus de 700 pages écrit par Jean-Paul Sartre et dont la date de parution, 1943, révèle immédiatement la nature. Au lieu de participer à la Résistance, Jean-Paul Sartre publie de manière tranquille un ouvrage philosophique idéaliste traitant de l'existence humaine dans des termes vagues et obscurs, à l'opposé de ce qui était nécessaire historiquement.
Le fond de la démarche est ainsi précisément le même que pour « Être et temps » de Martin Heidegger : il s'agit de contrer le matérialisme dialectique. En 1938, Jean-Paul Sartre avait déjà publié un roman exprimant le même état d'esprit individualiste et subjectiviste, La nausée. Après 1945, il sera une figure de proue, avec Albert Camus, de la gauche anarchisante à gauche du Parti Socialiste, feignant la radicalité révolutionnaire, notamment avec la revue Les temps modernes.
Jean-Paul Sartre soutiendra ainsi les « révolutionnaires » en général, sur une base totalement subjectiviste ; il sera aux côtés des trotskystes et avec Frantz Fanon, le théoricien justifiant les errements du FLN algérien sur le plan des brutalités, niant la nécessité du Parti, de l'idéologie, de la morale ; il soutiendra le castrisme et dira de Che Guevara qu'il est l'homme le plus « parfait » de sa génération, etc.
Toute la démarche de Jean-Paul Sartre repose, en définitive, sur ce qui est exposé dans « L'être et le néant ». Dans cet ouvrage, Sartre commence tout de suite par se revendiquer de Edmund Husserl et Martin Heidegger ; il est d'accord pour tout réduire à la question de la conscience individuelle. Le point de départ est celui de la phénoménologie : la base de tout, c'est la manière dont la conscience « saisit » les éléments composant la réalité qui, elle, reste en soi incompréhensible, indéfinissable, etc.
Jean-Paul Sartre pousse très loin cette logique, puisqu'il « philosophe » sur le fait que les gens « prennent conscience », et donc qu'ils prennent conscience de leur conscience ; il assume totalement de suivre le « doute » de René Descartes jusqu'au bout, jusqu'à tout résumer à une conscience qui découvrirait le monde.
Pour Jean-Paul Sartre, connaître ce qu'est une table est une chose, avoir conscience de cette table est autre chose. Pour le matérialisme dialectique, avoir conscience de quelque chose est un reflet, et si ce reflet est suffisamment synthétisé il y a alors connaissance. Jean-Paul Sartre nie la théorie du reflet, à ses yeux comme pour Martin Heidegger il y a « l'être » qui amène on ne sait comment une conscience à émerger et à « saisir » son environnement, dans une modalité mystérieuse.
Selon Jean-Paul Sartre, seule la phénoménologie permet donc de saisir ce qu'est la pensée qui visualise le monde, et « ce mode de saisissement n'est pas un phénomène de connaissance, mais c'est la structure de l'être ». C'est la négation de toute la théorie de la connaissance selon le matérialisme dialectique, et même par ailleurs selon le matérialisme à travers son histoire, d’Épicure à Spinoza en passant par Averroès, au profit de la mystique de « l'être ».
Ainsi, aux yeux de Jean-Paul Sartre, il n'y a pas de reflet, mais le libre-arbitre, s'appuyant sur « l'intention » de la conscience. Et le seul moyen de ne pas être fou, de se croire seule conscience au monde, seul être au monde – ce qu'on appelle le solipsisme – c'est de reconnaître une autre conscience similaire.
« La conscience est conscience de quelque chose : cela signifie que la transcendance est structure constitutive de la conscience ; c’est-à-dire que la conscience naît portée sur un être qui n’est pas elle (…). La conscience est un être dont l'existence pose l'essence et, inversement, elle est conscience d'un être dont l'essence implique l'existence, c'est-à-dire dont l'apparence réclame d'être. L'être est partout (…). La conscience est un être pour lequel il est dans son être question de son être en tant que cet être implique un être autre que lui. »
Cela semble incompréhensible, mais en fait il y a une idée simple derrière. Selon le matérialisme, ce que pensent les humains n'est que le reflet plus ou moins synthétisé de leur réalité sensorielle, ainsi que de la réalité générale, universelle.
Ce que Jean-Paul Sartre dit, c'est que chaque être humain pense individuellement, et que sa vie consiste en des rencontres d'autres êtres pensant comme lui, individuellement, et en des découvertes de phénomènes existant en-dehors de sa pensée et perçus partiellement.
En fait, l'existentialisme est le contraire exacte de la position du matérialisme sur la pensée, avec Aristote, Avicenne et Averroès notamment, et du matérialisme dialectique sur la pensée en général par conséquent et plus particulièrement sur la pensée-guide.
La pensée est réduite à la fiction d'un individu unique, radicalement séparé des autres, dont l'existence provient d'un mystérieux « être » général, au lieu de saisir cela comme reflet, comme matière grise.