25 oct 2012

L'Islam aux yeux des masses par un sondage du Figaro

Submitted by Anonyme (non vérifié)

Le Figaro a effectué un sondage sur l'Islam en France. Les sondages ne sont pas scientifiques, néanmoins ils donnent une tendance, ils la révèlent au moins en partie. Surtout que la manière de poser des questions joue énormément. Car bien entendu, les questions sont souvent biaisées. Qui plus est, la manière dont elles sont tournées est idéologique, comme tout.

Regardons ainsi avec attention les résultats du sondage, en essayant de voir la lutte des classes à la lumière du matérialisme dialectique.

Dans ce sondage, on est censé apprendre que la classe sociale – définie socialement par le sondage selon des critères forcément différent des nôtres – qui considère le plus la « présence d'une communauté musulmane en France » comme « une menace pour l'identité de notre pays », serait la classe ouvrière (qui penserait cela à 48 %).

Or, la classe ouvrière est bien moins cultivée que la bourgeoisie. C'est la bourgeoisie qui produit, de manière ininterrompue, l'identité du pays, par les médias, les livres d'histoire, la recherche universitaire, etc. etc.

La classe ouvrière est au service du mode de production capitaliste, elle n'est présente à aucun niveau de décision de l'identité française, à part avec l'aristocratie ouvrière présente dans les syndicats et qui aide la bourgeoisie dans la gestion de la production.

Tout ce qui est décidé en France l'est par la bourgeoisie, la classe ouvrière est reléguée à la marge. Et pourtant, on a de tels chiffres qui révèlent une tendance de fond que toute personne révolutionnaire connaît malheureusement bien.

Cela signifie que la classe ouvrière accepte massivement l'idéologie dominante. C'est d'autant plus flagrant quand on voit dans le sondage que 63 % de la classe ouvrière – définie par le sondage – considère que les musulmans ne sont « plutôt pas » ou pas intégrés.

Car en pratique, si une classe sociale est bien totalement « invisible » en France, c'est bien la classe ouvrière. A part avec les fermetures d'usine, elle n'existe pas sur le plan culturel-idéologique. La classe ouvrière n'est intégrée en rien du tout.

On a les manifestations syndicales portées par les fonctionnaires, on a les « classes moyennes » qui pleurent sur leur sort, on a la bourgeoisie qui s'étale partout... Mais pas la classe ouvrière, tout sauf « intégrée », et pour cause.

Toutefois, c'est une classe volontaire, elle veut quelque chose et, par le discours républicain de la gauche, par l'influence social-démocrate, elle demande son intégration.

Il est très important de noter cela car, sinon, on passe à côté du « ressentiment » raciste d'une partie de la classe ouvrière, qui entend « s'affirmer » dans la nation en réaffirmant celle-ci. C'est très clairement le projet d'union sociale des Français, au-delà des différences de classe, des « solidaristes » de 3ème voie, ou bien des « nationalistes autonomes ».

Quand on voit que 74 % des personnes interrogées et relevant de la définition d'ouvrier dans le sondage considèrent que c'est un prétendu « refus de s'intégrer à la société française » qui est la cause de la mauvaise « intégration » dans la société française, on voit le niveau idéologique extrêmement faible de la classe ouvrière, classe la plus opprimée.

La classe ouvrière est la classe la plus méprisée, la plus niée, et elle « s'imagine » qu'il y a plus réprouvé qu'elle. Elle tombe dans le panneau de la construction idéologique de la bourgeoisie, qui lui fournit un « paratonnerre » pour justifier la situation.

Il faut ici souligner une réalité très importante. En apparence, ce racisme à l'égard des personnes musulmanes qui seraient « en-dehors » de la société française alors qu'elles y vivent pleinement, pourrait ressembler à l'antisémitisme.

Le modèle est cependant différent, car l'antisémitisme a toujours été porteur d'un anti-capitalisme romantique absolument indispensable au fascisme. L'antisémitisme se marie ainsi très bien avec la vision d'un Islam prétendument « conquérant » et « dangereux ».

La construction idéologique d'un Islam comme « ennemi intérieur » n'est donc pas un vecteur anti-capitaliste romantique. Il ne remplace pas l'antisémitisme, et à l'extrême-droite on voit facilement que l'obsession antisémite est toujours d'autant plus forte qu'il y a une prétention anti-capitaliste (de fait, on a la même chose à l'extrême-gauche petite-bourgeoise, pour qui le PCMLM « judéo-stalinien » est un grand abcès de fixation).

La construction idéologique d'un Islam comme « ennemi intérieur » est par contre un vecteur anti-universaliste. Aux yeux de la bourgeoisie, l'Islam porte en lui une vision trop internationaliste, puisque les frontières tombent, ainsi que la différence de couleurs de peau (même si bien entendu la hiérarchisation patriarcale des hommes et des femmes est sacralisée).

L'Islam est le fruit de l'affirmation de la nation arabe, mais l'échec de cette affirmation a donné naissance à un spectre internationaliste qu'est l'Islam, et la bourgeoisie française veut à tout prix ou bien briser l'Islam, ou bien fonder un Islam français.

Le grand combat de la bourgeoisie est de briser l'Islam comme idéologie internationale car cet aspect est en contradiction avec l'affirmation nationale en général, et l'affirmation nationaliste en particulier.

Voilà pourquoi on peut également constater que, dans le sondage, le nombre de gens favorables à la construction de mosquée a baissé de moitié en 10 ans grosso modo (18 % désormais), alors que le pourcentage de gens opposés a doublé (43%).

Le repli national que la France connaît, et dont la vague populiste footballistique est un avatar tout comme le « non » à la constitution européenne bourgeoise, s'impose par le conflit avec l'Islam comme idéologie transétatique.

Ce que n'ont pas compris ici les petits-bourgeois faussement révolutionnaire, c'est que cet Islam est une fiction. Il y a en fait déjà de nombreux Islam, idéologies d’État à chaque fois : Qatar, Arabie Saoudite, Maroc, Algérie, Iran, etc. etc.

Mais l'interprétation populaire – qui est une illusion, un opium – donne naissance parfois à cette revendication universaliste. C'est précisément cela que combat la bourgeoisie.

D'où le fait que le sondage enfonce d'ailleurs le clou en proposant comme mots de définition pour l'Islam des choses comme « rejet des valeurs occidentales », « soumission », « violence », etc. Car l'idée mise en avant derrière est que seul un « Islam français » pourrait modifier la donne.

Combattre ce plan bourgeois est compliqué, car cela va de pair avec le refus de contribuer au renforcement de la nature d'opium d'une religion, sans parler des variantes en tant que telles de l'Islam, qui toutes représentent des forces réactionnaires bien précises (le Qatar, l'Iran, l'Arabie Saoudite, etc.).

 

En fait, et comme déjà expliqué, il n'y a qu'un moyen : diffuser la compréhension matérialiste dialectique de la falsafa arabo-persane et l'apport au matérialisme des titans qu'ont été Avicenne et Averroès.

Ces deux points correspondent à la culture et la civilisation, ce que le socialisme développe en procédant à un saut dans le mode de production.

Si les progressistes ne sont pas en mesure d'assumer cette dimension, cette facette de l'unification sociale des masses, jamais il n'y aura de triomphe sur les plans réactionnaires et tous les obstacles bourgeois.

Cela peut sembler intellectuel à la petite-bourgeoisie pseudo-révolutionnaire, c'est en réalité une véritable position d'avant-garde, une compréhension juste des besoins culturels-idéologiques des masses populaires et de la révolution socialiste en France.

« Lorsque le christianisme s'est développé et a jeté le continent européen dans le terrible et sombre Moyen-Âge, les penseurs se situant dans le prolongement de l'Antiquité gréco-romaine durent se réfugier en Orient.

Leur pensée et leurs savoirs auraient alors pu disparaître, si ce n’est qu’une civilisation était alors en plein essor dans cette partie du monde, et avait soif de culture afin tant de se développer que d’asseoir son idéologie.

Cette civilisation, c’est la civilisation arabe ; cette culture, c’est la culture islamique. L’islam est né en tant qu’idéologie de cette civilisation, tout comme le christianisme est né comme idéologie de différentes sociétés, dans un cadre précis.

Et de la même manière que le christianisme n’était qu’une religion parmi une multitude d’autres, l’Islam n’était qu’une religion parmi une multitude d’autres. Ce n’est qu’au bout d’une longue synthèse, conditionnée par les rapports sociaux, que ces religions se développeront pour atteindre leur pleine maturité, sous différentes formes selon les cadres nationaux.

Nous allons ici étudier le cadre de ce développement, en accordant une attention particulière à l’Islam des philosophes, l’Islam des « falasifa » (pluriel de « faylasoof »).

La philosophie, la « falsafa » en arabe est un mode de pensée tendant au matérialisme et ayant contribué de manière essentielle à l'humanisme tel qu'il se développera en Europe.

Sans falsafa arabo-persane, pas d’humanisme européen. » (La signification historique de la falsafa - première partie : l'essor de la civilisation arabe)

« Ce qui s'est passé est simple à comprendre : le christianisme a rejeté les païens et, donc, également les penseurs se situant dans les traditions philosophiques, principalement de Platon et d'Aristote.

Khosro 1er (488-531), également surnommé Anushiravan (âme immortelle), qui dirigeait alors la Perse, devint alors le véritable roi-philosophe, faisant venir des philosophes de Grèce ainsi que d’Inde, faisant traduire des documents du grec, du sanskrit, du syriaque.

Exemple de ce jeu intellectuel : une cour indienne envoya un jeu d’échecs à Khosro et son premier ministre (son « vizir ») en les défiant de comprendre le principe du jeu. Ils y arrivèrent, et envoyèrent en échange un jeu de backgammon, défiant pareillement la cour indienne.

C’est également à cette époque que le Pañchatantra est traduit du sanskrit en persan (nous en parlions précédemment, alors qu’il fut traduit vers l’arabe, et arriva par la suite jusqu’à La Fontaine qui s’en inspirera).

Khosro recueillit ainsi, dans le cadre de son règne philosophique, les « néo-platoniciens » Damscius, Simplicius, Eulamios, Priscien, Hermias, Diogène et Isidore de Gaza… c’est-à-dire les derniers « philosophes », ceux de « l’école d’Athènes » expulsée par l’empereur byzantin Justinien.

Il y a ici un moment clef de l’histoire. Une académie fut en effet fondée à Gundishapur, avec une bibliothèque, un observatoire, un des tout premiers hôpitaux, et le premier à créer des sections pour chaque pathologie…

Après Khosro, l’empire perse s’effondra sous les coups des armées arabes. Mais celles-ci maintinrent le fonctionnement de l’académie pendant plusieurs siècles. Et elle servit même de modèle à la création à Bagdad de la bayt al-ḥikma, la « maison de la sagesse », sous le calife Al-Ma’mūn en 832.

Cette « maison de la sagesse », dans le prolongement de l’académie de Gundishapur, marque la naissance de ce qui est appelé « adab », c’est-à-dire à la fois la formation intellectuelle et la maîtrise des belles-lettres et des connaissances.

Furent rassemblés (et traduits en arabe) grâce à cette maison de la sagesse des documents d’auteurs comme Pythagore, Platon, (le chirurgien indien) Sushruta, Plotin, Hippocrate, Aristote, Euclide, (le médecin indien) Charaka, Ptolémée, (le médecin grec) Claude Galien, Plotin, (le mathémaricien et astronome indien) Âryabhata et (le mathématicien indien) Brahmagupta… » (La signification historique de la falsafa - troisième partie : la fondation de la maison de la sagesse, Al-Kindi et Al-Fârâbi)

Publié sur notre ancien média: 
Mots clés: 
Rubriques: