26 juin 2013

Assassinat de Clément Méric : comment la social-démocratie a roulé l'antifascisme anarchiste dans la farine

Submitted by Anonyme (non vérifié)

Alors qu'il y a trois jours avaient lieu des cortèges en l'honneur de Clément Méric dans de nombreuses villes, organisés par tout ce qui est « à la gauche du PS », voilà que l'information sort comme quoi une vidéo de la RATP – le métro parisien – existe, comme quoi aurait été filmée la bagarre.

La police « découvre » cette vidéo tellement de temps après ? C'est une blague. Et une mauvaise blague pour l'antifascisme anarchiste qui a fait profil bas, masquant sa dimension hooligan de gauche, pour se placer sous la coupe de ce qui est « à la gauche du PS».

C'est un coup politique : après avoir neutralisé l'antifascisme anarchiste en le faisant se mettre sous la coupe de ce qui est à « sa gauche » (et étant donné l'idéologie anarchiste, il ne fallait pas grand chose pour cela), le Parti Socialiste récupère cet « antifascisme ».

Ainsi, hier, le même jour que la « révélation » de la vidéo faisant de Clément Méric un « agresseur », on apprend que l'Etat compte interdire l'Oeuvre Française et les Jeunesses Nationalistes, alors que de son côté Troisième Voie se dissout de lui-même (et donc avec les « Jeunesses nationalistes révolutionnaires »).

La social-démocratie a donc roulé l'antifascisme anarchiste. Il y avait la possibilité historique d'affirmer un antifascisme autonome. Au lieu de cela, en n'ayant aucune analyse du fascisme et en ciblant uniquement les « fachos », l'antifascisme anarchiste a été happé par ce qui est à la gauche du PS, alors que la social-démocratie manoeuvrait habilement pour apparaître comme sauvant la « république ».

C'est un échec complet, sur toute la ligne – et surtout une soumission franche au Parti Socialiste : ces gens imaginent que le Parti Socialiste reste au fond protecteur, bienveillant. Ils refusent la rupture avec la social-démocratie, ils ne voient pas que c'est le frère jumeau du fascisme.

Aux yeux de l'antifascisme anarchiste, le Parti Socialiste est finalement seulement « réformiste », et donc nullement contre-révolutionnaire. Une erreur fatale, qui a amené l'antifascisme anarchiste à se soumettre idéologiquement et culturellement à la social-démocratie.

Celle-ci donc a été particulièrement habile, ou plus exactement, politique, ce qui est logique. Voici comment RTL a présenté la fameuse vidéo qui, comme par hasard, sort après les manifestations « le fascisme tue » et en même temps que les interdictions d'organisations d'extrême-droite :

« La scène a été filmée par une caméra de surveillance de la RATP, située côté rue, au niveau de la station Havre-Caumartin. Les experts de la police technique et scientifique ont travaillé pendant plusieurs jours sur ces images pour les faire parler. Elles permettent de se faire une idée précise de la scène, jusqu'alors uniquement racontée par des témoins.

On y voit notamment Clément Méric se précipiter vers Esteban Morillo, le meurtrier présumé, alors de dos, semble-t-il pour lui asséner un coup. Le skinhead se retourne alors et le frappe avec son poing en plein visage. »

Le problème est facile à comprendre : n'assumant pas l'affirmation selon laquelle le fascisme est une tendance historique, l'antifascisme anarchiste a réduit celui-ci aux vilains fachos agressifs, racistes et stupides.

Il s'est couvert en se plaçant sous l'aile protectrice de ce qui est à la gauche du Parti Socialiste, or celle-ci est elle-même placée sous la protection du Parti Socialiste...

Et le grand perdant est l'antifascisme, alors que l'extrême-droite pavoise d'apparaître comme « révolutionnaire », faisant face aux interdictions, défendant un « jeune travailleur » agressé par un étudiant gauchiste alors qu'il voulait simplement acheter des polos...

Car ce qui va inévitablement se passer par la suite, c'est que l’État va frapper à l'extrême-gauche, comme effet de balance. Sauf que là, l'antifascisme apparaîtra comme passif, extrémiste, agressif, décalé, etc.

Et ce qui est « à la gauche du PS » sera très content de cela, puisque cela empêchera l'émergence d'un pôle radical, autonome face aux institutions. 

Or, sans même parler de révolution, l'antifascisme même ne peut naître qu'en dehors des institutions, sur une base populaire, par en bas, développant une culture et une démarche prônant le mélange, le métissage, la synthèse, comme reflet de la réalité, comme reflet du mouvement de la matière.

L'antifascisme anarchiste n'est pas à la hauteur, car il conçoit le fascisme comme une gangrène qui serait séparée du capitalisme. C'est une thèse erronée, parmi bien d'autres (« il n'y a pas de menace fasciste » comme l'expliquent certaines tendances anarchistes radicales, ou bien « le fascisme est déjà là  » comme la ridicule thèse sur le soi-disant fascisme moderne professée par les faux maoïstes de service, etc.).

Ce qu'il faut saisir, c'est que le fascisme est le produit des monopoles qui prennent progressivement le contrôle de l'Etat bourgeois; c'est un processus contradictoire au sein de la bourgeoisie elle-même. La bourgeoisie n'est pas unifiée, l'appareil d'Etat est le lieu d'une bataille.

Et l'antifascisme est la tendance à l'unification au sein du peuple, comme regroupement de la culture populaire, comme combat pour les valeurs, la morale, les principes même de la civilisation.

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