16 mai 2014

Le Nutella et l'Alliance française pour une huile de palme durable

Submitted by Anonyme (non vérifié)

Depuis le début des années 2010, il existe en France une juste méfiance populaire, voire un rejet, vis-à-vis de l'huile de palme dont le Nutella - qui célèbre ce 18 mai ses cinquante ans - est un symbole. L'huile de palme entre en effet massivement dans la composition du Nutella et c'est un fait assumé de manière claire voire combative par le groupe Ferrero qui le produit.

Notre ancien média Contre-Informations avait, de manière juste, lancé en 2011 le mot d'ordre : Les révolutionnaires ne consomment pas d'huile de palme !

L'huile de palme est critiquée pour des raisons sanitaires, parce qu’elle est la cause de déforestations massives en Malaisie et en Indonésie, et dans certaines régions d'Afrique, ainsi que son exploitation est la cause d'une pollution gigantesque. Déforestation qui engendre la mort des dizaines de milliers d'animaux sauvages et va même jusqu'à risquer de provoquer l'extinction de certaines espèces comme les Orang-Outans de Bornéo par exemple.

La méfiance populaire est tellement massive que plusieurs reportages télévisés et dans les magazines ont parlé de cela et certains industriels qui pouvaient se passer sans trop de difficulté de l'utilisation de l'huile de palme se sont empressés, en l'espace des quelques mois, de le faire. Par exemple en France, il n'existe plus ou presque de chips contenant de l'huile de palme.

En 2012, Sylvain Angerand de l'association Les Amis de la Terre affirmait que :

« la France est le pays d'Europe où on trouve le plus d'entreprises agroalimentaires ayant renoncé à mettre de l'huile de palme dans leurs produits ».

Seulement c'est là une goutte d'eau dans l'océan tellement sont encore nombreux les produits qui en contiennent. Fin 2012, la commission des affaires sociales du Sénat avait lancé une petite agitation sur ce sujet en adoptant ce qui fut appelé symboliquement un « amendement Nutella ». La proposition était d'augmenter de 300 % la taxe concernant l'huile de palme afin de pousser les industriels à substituer l'huile de palme.

La proposition fut rapidement rejetée et les industriels comme Ferrero ou Nestlé ont lancé une campagne de communication importante pour se justifier et contre-attaquer. Il y a même eu un spot de publicité à la télévision par Nutella, très moderne, qui parlait ouvertement de l'huile de palme en affirmant qu'elle serait labellisée « durable ».

À l'été 2013, lors d'une visite officielle en Malaisie, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault avait pour sa part rappelé que son gouvernement n'avait jamais soutenu cette proposition et expliqué que :

« il faut éviter les malentendus : la France n'est pas hostile à l'huile de palme. »

Deux mois plus tard, plusieurs trusts de l’agroalimentaire dont Ferrero, Nestlé et Unilever ont lancé en France une « Alliance française pour une huile de palme durable ». Elle lance des campagnes de communication ciblées, telle des pages de publicité dans la presse féminine, car ce sont souvent les femmes qui sont le plus responsables vis-à-vis de cela.

Cette alliance a pour but de vanter la certification d'huile de palme « durable » RSPO, celle-là même qui est affichée par Nutella dans son spot publicitaire.

RSPO est un acronyme anglais qui se traduit par « Table Ronde sur l'Huile de Palme Durable » (Roundtable on Sustainable Palm Oil). Cette table ronde n'est rien d'autre qu'une association créée par les trusts agroalimentaires eux-mêmes pour faire croire qu'ils se préoccupent de la déforestation.

C'est ce qu'on appelle couramment du « greenwashing », un jeu de mot anglais qui combine le mot « green », vert, avec le mot « whitewashing » qui signifie blanchissement, comme pour le blanchissement d'argent sale.

En pratique, c'est exactement ce à quoi sert ce label, à « verdir » des exploitations d'huile de palme. Ainsi, les parcelles issues de la destruction de la forêt en Malaisie et en Indonésie, mais datant d'avant 2005, peuvent être certifiées durables.

Et puis de manière plus simple, les exploitations certifiées, même si elles respectent quelques critères, servent à masquer celles qui ne le sont pas. Des produits exposés à la critique comme le Nutella en France peuvent alors se vanter d'une huile de palme 100 % durable, en payant un peu plus cher, alors que la majorité de la production mondiale ne l'est pas. Seuls 40 % des producteurs mondiaux sont membres de la table ronde, et cela ne les engage pas à rendre « durable » leur production, ni même seulement une partie de leur production.

De toutes façons, les critères de la RSPO sont très souples... l'alliance française explique elle-même que :

« le non-respect des critères de la RSPO peut entraîner la suspension ou le retrait de la certification. Le dispositif prévoit aussi une médiation qui peut conduire à la réparation des préjudices subis par les populations locales. »

L'utilisation du verbe « pouvoir » n'est pas anodine, on est là dans l'hypothèse, dans la conciliation, et en fait surtout dans l'opération de communication plutôt que dans de véritables mesures en faveur de la forêt.

Le fait est que l'agro-industrie capitaliste est confrontée à un problème insoluble pour elle : les grands trusts agroalimentaires ont utilisé massivement l'huile de palme afin de produire des marchandises correspondant à leurs besoins avec des coûts limités. Ce sont typiquement des marchandises très sucrées ou très salées, avec un faible apport nutritif, mais qui s'avèrent être très rentables.

L'utilisation de graisse de palme est très rentable, car elle est peu chère et offre de la matière « facile à travailler ». Elle permet de donner de la consistance à des marchandises de faible qualité comme le Nutella. Les industriels se retrouvent donc incapables de se passer d'huile de palme.

La campagne de l'« Alliance française pour une huile de palme durable » est en fait une véritable campagne d'intimidation pour contrer le rejet de l'huile de palme. Elle vise à impressionner les masses avec de prétendues expertises scientifiques totalement à la solde des trusts agro-industriels ; à les troubler avec des slogans du type « L'huile de fruit du palme est issue à 100% du fruit » ou « L'huile de palme est 100% naturel » (slogan qui n'a aucun sens par ailleurs).

La réalité est que les monopoles de l'agro-industrie ne peuvent se passer de l'huile de palme et entendent continuer à écouler leurs marchandises de mauvaise qualité quelle qu'en soit les conséquences pour la Biosphère ou la santé des gens.

L'alimentation doit être basée sur les réels besoins naturels et pas sur les besoins des monopoles de l'agro-industrie d'écouler leur marchandises. L'alimentation doit être le support d'un développement du goût et du raffinement qui soient réellement populaires, et ni ceux des produits pleins de sucres raffinés et d'huile de palme ni ceux d'une élite tournée vers le passé comme c'est le cas aujourd'hui avec la « gastronomie française ».

La lutte contre l'huile de palme est une cause démocratique importante. Il ne faut pas se laisser intimider par les monopoles de l'agro-industrie, leurs « scientifiques » corrompus et leur culture mortifère, et continuer à développer le boycott le plus massif possible de l'huile de palme.

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