3 déc 2011

L'Etat et la révolution (Connaitre les enseignements de Lénine)

Submitted by Anonyme (non vérifié)

Hier nous parlions de Pierre Laurent et nous évoquions le fait qu'il voudrait faire croire que l'on pourrai changer l’État impérialiste de l'intérieur. Sa vision, dans la continuité de l'idéologie révisionniste du vieux Parti « Communiste » Français, est un « ultra-démocratisme » qui, poussé jusqu'au bout, serait censé désarticuler l’État impérialiste français et le transformer en un État populaire, au service des masses.

La seule perspective pour un Pierre Laurent, c'est d'être élu « démocratiquement » grâce à « une nouvelle majorité de gauche. »

Cela est vain, absurde, idéaliste, utopiste ! L'histoire de la lutte des classe à démontré et continue de démontrer chaque jour qu'il n'existe pas de voie pacifique vers un monde nouveau.

La bourgeoisie est une classe décadente qui s’effondre, mais elle ne lâchera pas son pouvoir. Il faudra la contraindre par la force. Et plus la crise généralisée du capitalisme s'aggrave, plus le masque « démocratique » de la république bourgeoise tombe, plus le besoin de la dictature du prolétariat se fait ressentir, comme nécessité vitale pour les masses populaires.

Cela semble évident et est la base de l'idéologie communiste. Mais encore faut il savoir le démontrer.

Ici à voie lactée, nous sommes matérialiste, nous n'inventons rien. Ce qui compte c'est l'étude, le travail, la synthèse des connaissances. Sans cela pas d'analyse concrète d'une situation concrété !

« Vous n'avez pas fait d'enquête sur un problème, et on vous prive du droit d'en parler. Est-ce trop brutal ? Non, pas du tout. Du moment que vous ignorez le fond du problème, faute de vous être enquis de son état actuel et de son historique, vous n'en sauriez dire que des sottises. Et les sottises, chacun le sait, ne sont pas faites pour résoudre les problèmes, qu'y a til donc d'injuste à vous priver du droit de parler ? Or, beaucoup de camarades ne font que divaguer, les yeux fermés ; c'est une honte pour des communistes ! Comment un communiste peut-il parler ainsi en l'air, les yeux fermés ? C'est inadmissible ! Inadmissible ! Faites des enquêtes ! Et ne dites pas de sottises ! » Mao Zedong, Contre le culte du livre.

Alors les citations qui suives sont peut être longues. Mais cela est inévitable. Et c'est la moindre des chose à connaître ! Il faut étudier Lénine, L'état et la Révolution, L'impérialisme stade suprême du capitalisme, il faut connaître et maîtriser les classiques du Marxisme-Léninisme-Maoisme ! Et bien plus encore !

Revenons donc sur les enseignements de Lénine dans l'État et la Révolution pour préciser notre pensée sur l'État. Lénine commence son ouvrage ainsi [c'est nous qui soulignons]:

« Il arrive aujourd'hui à la doctrine de Marx ce qui est arrivé plus d'une fois dans l'histoire aux doctrines des penseurs révolutionnaires et des chefs des classes opprimées en lutte pour leur affranchissement. Du vivant des grands révolutionnaires, les classes d'oppresseurs les récompensent par d'incessantes persécutions; elles accueillent leur doctrine par la fureur la plus sauvage, par la haine la plus farouche, par les campagnes les plus forcenées de mensonges et de calomnies. Après leur mort, on essaie d'en faire des icônes inoffensives, de les canoniser pour ainsi dire, d'entourer leur nom d'une certaine auréole afin de "consoler" les classes opprimées et de les mystifier; ce faisant, on vide leur doctrine révolutionnaire de son contenu , on l'avilit et on en émousse le tranchant révolutionnaire. C'est sur cette façon d'"accommoder" le marxisme que se rejoignent aujourd'hui la bourgeoisie et les opportunistes du mouvement ouvrier. On oublie, on refoule, on altère le coté révolutionnaire de la doctrine, son âme révolutionnaire. On met au premier plan, on exalte ce qui est ou paraît être acceptable pour la bourgeoisie. Tous les social-chauvins sont aujourd'hui "Marxistes" - ne riez pas ! »

Cela s'applique parfaitement à Pierre Laurent et aux théories rouillés des révisionnistes du vieux Parti « Communiste » Français. Pierre Laurent prétend être communiste et bénéfice d'une aura "marxiste". Mais voyons plus précisément ce que nous enseigne la théorie de Lénine à propos de l'État. Il explique d'abord [c'est nous qui soulignons] :

« Commençons par l'ouvrage le plus répandu de F. Engels : L'Origine de la famille, de la propriété privée et de l'Etat , dont une sixième édition parut à Stuttgart dès 1894. Il nous faudra traduire les citations d'après les originaux allemands, parce que les traductions russes, bien que très nombreuses, sont la plupart du temps ou incomplètes ou très défectueuses.

"L'Etat, dit Engels en tirant les conclusions de son analyse historique, n'est donc pas un pouvoir imposé du dehors à la société; il n'est pas d'avantage "la réalité de l'idée morale", "l'image et la réalité de la raison", comme le prétend Hegel. Il est bien plutôt un produit de la société à un stade déterminé de son développement; il est l'aveu que cette société s'empêtre dans une insoluble contradiction avec elle-même, s'étant scindée en oppositions inconciliables qu'elle est impuissante à conjurer. Mais pour que les antagonistes, les classes aux intérêts économiques opposés, ne se consument pas, elles et la société, en une lutte stérile, le besoin s'impose d'un pouvoir qui, placé en apparence au-dessus de la société, doit estomper le conflit, le maintenir dans les limites de l'"ordre"; et ce pouvoir, né de la société, mais qui se place au-dessus d'elle et lui devient de plus en plus étranger, c'est l'Etat" (pp. 177-178 de la sixième édition allemande).

Ici se trouve exprimée en toute clarté l'idée fondamentale du marxisme sur le rôle historique et la signification de l'Etat. L'Etat est le produit et la manifestation de ce fait que les contradictions de classes sont inconciliables. L'Etat surgit là, au moment et dans la mesure où, objectivement, les contradictions de classes ne peuvent être conciliées. Et inversement : l'existence de l'Etat prouve que les contradictions de classes sont inconciliables. »

Cela est très clair, mais depuis les sociaux démocrate de la seconde internationale à l'époque de Lénine, jusqu'aux opportunistes du mouvement ouvrier d'aujourd'hui, les idéologues bourgeois n'ont de cesse de réviser le marxisme et de lui enlever toute substance révolutionnaire. Lenine poursuit :

"C'est précisément sur ce point essentiel et capital que commence la déformation du marxisme, déformation qui suit deux lignes principales.

D'une part, les idéologues bourgeois et surtout petits-bourgeois, obligés sous la pression de faits historiques incontestables de reconnaître que l'Etat n'existe que là où existent les contradictions de classes et la lutte des classes, "corrigent" Marx de telle sorte que l'Etat apparaît comme un organe de conciliation des classes. Selon Marx, l'Etat ne pourrait ni surgir, ni se maintenir, si la conciliation des classes était possible. Selon les professeurs et publicistes petits-bourgeois et philistins - qui se réfèrent abondamment et complaisamment à Marx ! - l'Etat a précisément pour rôle de concilier les classes. Selon Marx, l'Etat est un organisme de domination de classe, un organisme d'oppression d'une classe par une autre; c'est la création d'un "ordre" qui légalise et affermit cette oppression en modérant le conflit de classes. Selon l'opinion des politiciens petits-bourgeois, l'ordre est précisément la conciliation des classes, et non l'oppression d'une classe par une autre; modérer le conflit, c'est concilier, et non retirer certains moyens et procédés de combat aux classes opprimées en lutte pour le renversement des oppresseurs.

Ainsi, dans la révolution de 1917, quand le problème de la signification et du rôle de l'Etat se posa dans toute son ampleur, pratiquement, comme un problème d'action immédiate et, qui plus est, d'action de masse, socialistes-révolutionnaires et menchéviks versèrent tous, d'emblée et sans réserve, dans la théorie petite-bourgeoise de la "conciliation" des classes par l'"Etat". D'innombrables résolutions et articles d'hommes politiques de ces deux partis sont tout imprégnés de cette théorie petite-bourgeoise et philistine de la "conciliation". Que l'Etat soit l'organisme de domination d'une classe déterminée, qui ne peut pas être conciliée avec son antipode (avec la classe qui lui est opposée), c'est ce que la démocratie petite-bourgeoise ne peut jamais comprendre. L'attitude que nos socialistes-révolutionnaires et nos menchéviks observent envers l'Etat est une des preuves les plus évidentes qu'ils ne sont pas du tout des socialistes (ce que nous, bolchéviks, avons toujours démontré), mais des démocrates petits-bourgeois à phraséologie pseudo-socialiste.

D'autre part, il y a la déformation "kautskiste" du marxisme, qui est beaucoup plus subtile. "Théoriquement", on ne conteste ni que l'Etat soit un organisme de domination de classe, ni que les contradictions de classes soient inconciliables. Mais on perd de vue ou l'on estompe le fait suivant : si l'Etat est né du fait que les contradictions de classes sont inconciliables, s'il est un pouvoir placé au-dessus de la société et qui "lui devient de plus en lus étranger ", il est clair que l'affranchissement de la classe opprimée est impossible, non seulement sans une révolution violente, mais aussi sans la suppression de l'appareil du pouvoir d'Etat qui a été créé par la classe dominante et dans lequel est matérialisé ce caractère "étranger". Cette conclusion, théoriquement claire par elle-même, Marx l'a tirée avec une parfaite précision, comme nous le verrons plus loin, de l'analyse historique concrète des tâches de la révolution. Et c'est précisément cette conclusion que Kautsky - nous le montrerons en détail dans la suite de notre exposé - a ... "oubliée" et dénaturée."

Pierre Laurent oscille entre les deux.Tantôt, dans son livre par exemple, il est un politicien petits-bourgeois dont l'objectif est précisément "la conciliation des classes, et non l'oppression d'une classe par une autre", tantôt, lorsqu'il parle à des ouvriers par exemple, il se la joue un peu plus radical et admet que l'Etat soit au service de la bourgeoisie, ou tout du moins "des puissants", du système". Mais finnissons en poursuivant avec Engels et Lénine [c'est nous qui soulignons encore] :

« "Par rapport à l'ancienne organisation gentilice [tribale ou clanale], poursuit Engels, l'Etat se caractérise en premier lieu par la répartition de ses ressortissants d'après le territoire. "

Cette répartition nous paraît "naturelle", mais elle a nécessité une lutte de longue haleine contre l'ancienne organisation par tribus ou par clans.

"En second lieu vient l'institution d'une force publique qui ne coïncide plus directement avec la population s'organisant elle-même en force armée. Cette force publique particulière est nécessaire, parce qu'une organisation armée autonome de la population est devenue impossible depuis la scission en classes... Cette force publique existe dans chaque Etat; elle ne se compose pas seulement d'hommes armés, mais aussi d'annexes matérielles, de prisons et d'établissements pénitentiaires de toutes sortes, qu'ignorait la société gentilice [clanale]."

Engels développe la notion de ce "pouvoir" qui s'appelle l'Etat, pouvoir issu de la société, mais se plaçant au-dessus d'elle et lui devenant de plus en plus étranger. Ce pouvoir, en quoi consiste-t-il principalement ? En des détachements spéciaux d'hommes armés, disposant de prisons, etc.

Nous avons le droit de parler de détachements spéciaux d'hommes armés, parce que la force publique propre à tout Etat "ne coïncide plus directement" avec la population armée, avec l'"organisation armée autonome de la population".

Comme tous les grands penseurs révolutionnaires, Engels a soin d'attirer l'attention des ouvriers conscients précisément sur ce qui apparaît au philistinisme dominant, comme la chose la moins digne de retenir l'attention, la plus coutumière et consacrée par des préjugés non seulement tenaces, mais, pourrait-on dire, pétrifiés. L'armée permanente et la police sont les principaux instruments de la force du pouvoir d'Etat; mais comment pourrait-il en être autrement ?

Pour l'immense majorité des Européens de la fin du XIXe siècle, auxquels s'adressait Engels et qui n'avaient ni vécu ni observé de près une seule grande révolution, il ne pouvait en être autrement. Ils ne comprenaient pas du tout ce qu'est l'"organisation armée autonome de la population". A la question de savoir pourquoi est apparue la nécessité de détachements spéciaux d'hommes armés (police, armée permanente), placés au-dessus de la société et lui devenant étrangers, les philistins des pays d'Europe occidentale et de Russie sont enclins à répondre par deux-trois phrases empruntées a Spencer ou à Mikhaïlovski, en rappelant la complication croissante de la vie sociale, la différenciation des fonctions, etc.

Ce rappel a une apparence "scientifique"; il endort admirablement le vulgaire en estompant le principal, l'essentiel : la division de la société en classes irrémédiablement hostiles.

Sans cette division, l'"organisation armée autonome de la population" se distinguerait par sa complexité, le niveau élevé de sa technique, etc., de l'organisation primitive d'une troupe de singes s'armant de bâtons, ou de celle d'hommes primitifs ou associés en clans, mais elle serait possible.

Elle est impossible parce que la société civilisée est scindée en classes hostiles et, qui plus est, irrémédiablement hostiles, dont l'armement "autonome" entraînerait une lutte armée entre elles. L'Etat se forme; il se crée une force spéciale, des détachements spéciaux d'hommes armés, et chaque révolution, en détruisant l'appareil d'Etat, nous montre de la façon la plus évidente comment la classe dominante s'efforce de reconstituer les détachements spéciaux d'hommes armés qui la servaient, et comment la classe opprimée s'efforce de créer une nouvelle organisation de ce genre, capable de servir non les exploiteurs, mais les exploités.

Dans le passage cité, Engels pose théoriquement le problème que toute grande révolution nous pose pratiquement, concrètement et à l'échelle d'une action de masse, à savoir : le problème des rapports entre les détachements "spéciaux" d'homme armés et l"organisation armée autonome de la population". Nous verrons comment ce problème est illustré concrètement par l'expérience des révolutions européennes et russes.

Mais revenons à l'exposé d'Engels.

Il montre que parfois, dans certaines régions de l'Amérique du Nord, par exemple, cette force publique est faible (il s'agit - exception bien rare dans la société capitaliste - de ces régions de l'Amérique du Nord où, dans la période préimpérialiste, prédominait le colon libre), mais que, d'une façon générale, elle se renforce :

"... elle se renforce à mesure que les contradictions de classes s'accentuent à l'intérieur de l'Etat et que les Etats limitrophes deviennent plus grands et plus peuplés; considérons plutôt notre Europe actuelle, où la lutte des classes et la rivalité de conquêtes ont fait croître à tel point la force publique qu'elle menace de dévorer la société entière, et même l'Etat."

Ces lignes furent écrites, au plus tard, au début des années 90. La dernière préface d'Engels est datée du 16 juin 1891. A cette époque, le tournant opéré vers l'impérialisme, - domination absolue des trusts, toute-puissance des grosses banques, grande politique coloniale, etc., - ne faisait que s'amorcer en France; il s'annonçait à peine en Amérique du Nord et en Allemagne. Depuis, la "rivalité de conquêtes" a fait un pas de géant, d'autant plus que peu après 1910 le globe s'est trouvé définitivement partagé entre ces "conquérants rivaux", c'est-à-dire entre les grandes puissances spoliatrices. Les armements militaires et navals se sont depuis lors démesurément accrus, et pendant la guerre de rapine de 1914-1917 pour la domination de l'Angleterre ou de l'Allemagne sur le monde, pour le partage du butin un pouvoir d'Etat rapace a "dévoré" toutes les forces de la société à un tel point qu'on se trouve au seuil d'une catastrophe totale.

Engels a su montrer dès 1891 que la "rivalité de conquêtes" était un des principaux traits distinctifs de la politique extérieure des grandes puissances, tandis qu'en 1914-1917, à un moment où cette même rivalité, énormément aggravée, a engendré la guerre impérialiste, les gredins du social-chauvinisme camouflent la défense des intérêts spoliateurs de "leur" bourgeoisie par des phrases sur la "défense de la patrie", "la défense de la république et de la révolution", etc. ! »

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